Il y a trois ans que la guerre civile a éclaté en Syrie,
on compte plus de 120.000 morts et deux millions et demi de réfugiés, les dommages matériels sont estimé à 3 milliards de dollars, et personne ne voit de fin à ce conflit.
Tout le monde a oublié comment cette horreur a commencé, et en fait le détonateur était un incident banal, juste une manifestation de plus de la brutalité policière du régime. Des enfants de la ville de Deraa, près de la frontière jordanienne, taguent dans la rue des graffitis anti-Assad, des policiers les arrêtent, les molestent durement et les emprisonnent. Les habitants de la ville manifestent contre les arrestations, et c’est le point de départ de cette guerre meurtrière.
Chaque jour apporte son lot d’atrocités, les barrières sautent sans pour autant provoquer la moindre intervention : non respect des civils, utilisation d’armes chimiques, massacres de communautés chrétiennes, viols et meurtres de femmes systématisés en tant qu’arme de guerre, rien ne semble émouvoir assez une communauté internationale sourde et aveugle, dont les sens ne se réveillent curieusement que s’il s’agit d’Israël.
Imperturbablement l’armée d’Assad continue à bombarder, et à commanditer des groupes armés parallèles pour perpétrer les massacres les plus épouvantables. Personne n’est dupe, mais personne ne bouge. Il en va de l’équilibre occidental….
Le rapport d’Amnesty International
Néanmoins, comment ne pas être interpellé par le rapport publié en début de semaine par Amnesty International sur la situation à Yarmouk. Jusqu’au début de la guerre civile, Yarmouk était le plus grand camp de réfugiés palestiniens en Syrie. Près de 150.000 personnes y vivaient dans des logements surpeuplés. En décembre 2012, nous attirions déjà votre attention sur le sort déplorable des habitants de ce camp, mais depuis l’été 2013, leurs conditions de vie se sont encore bien dégradées, de par la volonté délibérée d’Assad qui a assiégé Yarmouk, y enfermant ceux qui n’avaient pas encore fui. Les membres du Hamas ont pris une part active dans la lutte contre l’armée syrienne, les habitants de Yarmouk le payent et il ne reste plus que 20.000 résidents dans ce que l’on peut difficilement qualifier de lieu de vie.
Voici ce que dit le rapport d’Amnesty International publié le 10 mars :
« Le camp de Yarmouk, en périphérie de Damas, subit un siège très dur imposé par les forces gouvernementales syriennes. Le nouveau rapport d’Amnesty International expose les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité commis contre des civils palestiniens et syriens à Yarmouk.
Intitulé Squeezing the life out of Yarmouk: War crimes against besieged civilian, ce rapport publié à l’approche du troisième anniversaire de la crise en Syrie révèle que près de 200 personnes sont mortes depuis que le siège a été durci en juillet 2013 et que l’accès aux denrées de base et aux fournitures médicales a été bloqué. Les civils de Yarmouk sont traités comme les pions d’un jeu meurtrier qu’ils ne contrôlent absolument pas »
Et Philip Luther, Directeur du programme Afrique du Nord et Moyen-Orient d’Amnesty International, rajoute : « La vie à Yarmouk est devenue insupportable pour les civils désespérés qui se retrouvent affamés et piégés dans une spirale de souffrance, sans aucun moyen de s’échapper ».
Mais curieusement, ce siège ne suscite aucune indignation internationale, contrairement aux réactions nombreuses et rapides qui fusent sans que l’on sache vraiment pourquoi en réaction au « siège » de la bande de Gaza. Selon Amnesty International, le régime d’Assad est tout simplement de en train d’affamer les rescapés de et l’aide humanitaire qui arrive au camp est négligeable. Amnesty rappelle que l’utilisation de la famine comme arme de guerre contre des civils est un crime de guerre : qui a parlé de convoquer Assad au tribunal à La Haye? Pas ceux qui ont hurlé comme des hyènes pour réclamer le passage devant cette cour de responsables israéliens, dont Ariel Sharon, leur silence me choque, et m’épouvante.
Le régime d’Assad bloque l’accès au camp à tous les convois, il a arrêté et torturé du personnel médical, bombardé des écoles et des hôpitaux, a provoqué la malnutrition sévère d’une bonne partie de la population qui subsiste encore à Yarmouk.
Et le monde se tait encore. Même ceux qui hurlent au scandale, au crime impardonnable, si un blocus à un check-point, ou une situation de crise comme celle de ces derniers jours, a le malheur de provoquer un retard de quelques heures dans la livraison d’un sac de riz ou de ciment à Gaza, sont frappés de mutisme.
Ce constat se répète immuablement, mais il faut le souligner inlassablement : les foudres des bien pensants ne se déclenchent pas, ou peu, quand Israël n’est pas mis en cause. Comment un drame de cette ampleur peut-il les laisser indifférents? Comment leur indignation peut-elle être aussi sélective? Je n’attends d’eux aucune réponse, et toutes les victimes des conflits dont Israël n’est pas partie prenant, continueront sans doute à faire les frais de leur indifférence.
Line Tubiana
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