Alain Herbeth. « Je me souviens ». La bonne et la mauvaise annexion

En six jours, du 5 au 10 juin 1967, Israël gagne la troisième guerre qui lui est imposée par la coalition des Etats arabes voisins. Une guerre éclair, décisive, menée sur l’ensemble de ses frontières terrestres et dans les airs. Elle va clouer au sol ceux qui, la veille encore, promettaient d’anéantir l’entité sioniste. La Cisjordanie toute entière, jusqu’aux rives du Jourdain, est occupée par Tsahal.

Jérusalem n’est plus coupée en deux, délivrée de l’occupation jordanienne qui durait depuis le cessez-le feu de 1949. Occupation transformée en annexion pure et simple, l’année suivante, lorsque le parlement d’Amman ratifie le 24 avril 1950 un décret d’unification qui officialise l’annexion de la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, au Royaume de Transjordanie qui devient ainsi le Royaume de Jordanie[i].

Une situation reconnue immédiatement par le Royaume-Uni et les Etats-Unis, suivis par l’Irak et la Ligue arabe, autant de créations politiques et géographiques à mettre à l’actif des Britanniques.

Le vote de l’ONU, en 1947, est désormais bien loin. Il partageait, nous l’avons vu, ce qui restait de la Palestine mandataire en deux Etats distincts, l’un arabe à qui était dévolu la Cisjordanie, la Galilée et une partie du Néguev, dont la ville de Beer-Sheva, l’autre juif, essentiellement côtier. Ce partage ayant été refusé par les Arabes au prétexte que la « terre arabe » ne se partage pas, ils ont donc fait le pari de la guerre afin de régler cette question définitivement. Mauvais calcul car, à l’issue d’une guerre qu’Israël n’a pas voulu, le jeune Etat a gagné la Galilée et le Néguev alors que la Transjordanie a absorbé, à l’Est, la Cisjordanie. L’ancienne Palestine mandataire est bel et bien coupée en deux, mais pas comme il était prévu à Manhattan, au siège de l’ONU. Elle est désormais partagée par l’Etat juif et le Royaume Hachémite.

L’Etat arabe promis par les Nations-Unies n’a donc jamais vu le jour, et cela arrange bien les différents Etats arabes de la région. Les Jordaniens convoitaient la Cisjordanie et les Egyptiens la bande de Gaza qu’ils administraient auparavant. Ni les uns, ni les autres, ne voulaient d’Etat palestinien indépendant. Le roi Abdallah de Jordanie paiera cher cette politique de coexistence avec l’Etat juif. Il sera assassiné par des hommes de main du Mufti de Jérusalem rendu furieux par la connivence tacite que le roi entretient avec Israël et par son refus de lui laisser contrôler la Cisjordanie.

A cette époque, personne de parle de Palestine ou de Palestiniens. Il faudra, pour cela, attendre 1964, l’année de la création par l’Egypte de l’OLP (Organisation de libération de la Palestine). Un nom à prendre au second degré car il dissimule habilement qu’il est en réalité question de rayer Israël de la carte. Israël, c’est la Palestine.

Des décennies plus tard, le gouvernement israélien prévoit d’annexer 30% de la Judée et de la Samarie. 30%, ce n’est pas la totalité du territoire. Il s’agit d’annexer les localités juives comme Ma’al Adoumim, le Gush Etsion, ou la vallée du Jourdain, pas Ramallah ni Naplouse, ni même Hebron.

Quel concert d’indignité cela soulève dans le monde entier, quels cris, quel déchaînement de haine.

Une bonne illustration du « deux poids, deux mesures ».


[i] Après s’être vu confier, au printemps 1922, un mandat politique sur l’ensemble de la Palestine ottomane, le Royaume-Uni, dès septembre de la même année, fonde l’émirat arabe de Transjordanie, sur la rive Est du Jourdain. Le Foyer national juif promis par Lord Balfour diminue comme peau de chagrin.

Pour rappel: Pour son ouvrage « Jacques Chevallier. Les fidélités successives du dernier maire d’Alger« , Alain Herbeth s’est vu attribuer le Prix de la FM-GACMT ( « Fondation pour la mémoire de la guerre d’Algérie, des combats du Maroc et de Tunisie », créée, avec le concours de l’État. Une mention spéciale lui a été attribuée pour sa Trilogie algérienne.

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2 Comments

  1. Moshe Dayan était un général extraordinaire, bon tacticien, homme courageux et généreux. Il a même accueilli en eretz Israel des boat people ignorés par les bateaux occidentaux. Il nous a rendu Jerusalem. A l’entrée des soldats israéliens à Jerusalem, les femmes arabes ont même poussé des youyous. Les prophéties bibliques s’accomplissaient. Malheureusement, Dayan, n’a pas récupéré l’espace du temple et l’a cédé aux Jordaniens, commettant une faute incroyable car même les croisés en avaient fait le quartier général de l’ordre des templiewrs…Nous en payons le prix aujourd’hui…

  2. Quand la Jordanie a annexé Jérusalem-est et la Cisjordanie le 24avril 1950 et l’Egypte accaparé Gaza, pas de contestation internationale mais quand c’est Israël c’est Le tollé De toute façon tout ce que fait Israel est toujours condamné et pourtant ce sont les arabes qui ont refusé le plan de partage et donc privé les arabes de Palestine de leur État en attaquant Israël il serait temps qu’ils reconnaissent leurs torts et leur part de responsabilité !
    Merci pour cet article rare qui remet les pendules de l’histoire à l’heure !

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