Joël Mergui : le tribut de la Communauté durant la pandémie

À la veille des fêtes de Chavouot, l’une des grandes fêtes du calendrier juif, qui marque le don de la thora au peuple juif, Sylvie Bensaid s’est entretenu avec Joël Mergui, le Président des Consistoires.

Entretien

Tribune Juive : notre communauté a payé un large tribut face à cette pandémie. Les chiffres de décès dans notre communauté liés au covid 19 sont impressionnants ? Confirmez vous ?

Joël Mergui : Nous avons été très durement touchés avec 580 décès sur l’ensemble de la France. Une période extrêmement difficile vécue par notre communauté.

Le service de la Hevra Kadisha a toujours été là pour faire face à des situations dramatiques et a assuré un travail continu auprès des familles des victimes

Nous sommes intervenus auprès des autorités pour éviter la crémation, ouvrir les cimetières, et faire en sorte que nos défunts soient enterrés au plus vite dans le respect qui leur était du

130 personnes ont pu être enterrées selon leur souhait en Israël et nous avons pu le faire grâce au consulat d’Israël qui s’est mobilisé à nos côtés

Un défi important que nous avons relevé.

Toutes mes pensées vont à nos chers disparus, aux familles endeuillées qui n’ont pu veiller leurs morts, nous ferons des cérémonies en hommage à ceux qui nous ont quitté dès que cela sera possible et à tous les malades qui se battent encore.

Tribune Juive : Comment avez vous géré cette crise pendant le confinement, une période qui coïncidait avec les fêtes de Pessah ?

Joël Mergui : Ça a été une période très difficile, personne n’était préparé. Je voudrais ici rendre hommage à tous les acteurs et au staff du consistoire sans qui rien n’aurait été possible.

Il a fallu avant Pessah se poser la question de la cacherout, vérifier les conditions d’abattage et d’approvisionnement de la viande cacher, cela n’a pas été simple pour nos chohatims, chevillards et bouchers.

L’Aumônerie des hôpitaux s’est investie auprès des malades pour leur fournir des repas cacher au moment de Pessah.

Le Secours Juif a gardé un contact constant avec les fidèles en situations précaires pour leur offrir des paniers de Pessah.

Durant cette période toute la communauté a su se montrer solidaire et unie.

Tribune Juive : Et pour le reste des activités comment le consistoire a géré ?

Joël Mergui : Nous avons été présents sous une forme différente.

Les services consistoriaux ont continuer à travailler pour ceux qui le pouvaient, en télé travail. On s’est efforcés de proposer des programmes en continu. Nous avons remplacé les Talmud thora par des elearning.

L’enrichissement spirituel n’a pas été mis de côté, les rabbins et présidents de communauté ont échangé des cours, des conférences, tous les jours virtuellement par zoom et sur Facebook. Nous avons proposé pour les grands evenements, lag bahomer, Yom hatsmaout,Yom yerushalaim, des soirées festives avec des plateaux d’artistes prestigieux.

Nous avons réuni via zoom plus de monde que si ces événements s’étaient déroulés en direct, nous avons inventé une nouvelle manière de nous réunir. Nous avons fait de notre mieux dans cette période inédite et incroyable.

Tribune juive : Que pensez vous de la réouverture des synagogues autorisée par le Conseil d’Etat ? Pour Shavouot comment cela va t il se passer ?

Joël Mergui : Bien que le Conseil d’Etat ait autorisé l’ouverture des lieux de culte, la responsabilité de cette ouverture revient aux institutions.

Après une réunion avec le Grand rabbin de France, le Grand rabbin de Paris,et plus de soixante Présidents de communautés, nous avons décidé, alors que le nombre de malades est encore important, de ne pas ouvrir nos lieux de culte pour les fêtes de Shavouot. C’est très douloureux de garder nos synagogues fermées aussi longtemps, sans prières publiques. Nous avons fait le choix de privilégier la vie, de protéger nos fidèles, garantir leur sécurité . La halakha est très claire là dessus.

Notre préconisation est celle de la prudence et de la sécurité sanitaire. Nos synagogues sont soumises aux règles de l’état.

À partir du 4 juin nous ouvrirons progressivement les synagogues avec des effectifs réduits, sur inscription, dans le strict respect des mesures sanitaires obligatoires, des gestes barrières et des mesures de distanciation sociale. Les espaces communs bénéficieront de la même vigilance. Les commissions administratives veilleront au respect de ce protocole.

 » La désignation d’un référent sanitaire dans chaque synagogue « 

Une synagogue est un lieu de convivialité comme dans une famille. Les gens se connaissent, on doit tenir compte de la tentation du risque qu’ils ne respectent pas les gestes barrières.

On a encore des clusters qui se développent un peu partout, les risques de diffusion du coronavirus ne sont pas encore terminés il ne faudrait pas qu’on soit à l’origine de nouvelles contaminations et de nouvelles morts.

Tribune Juive : Où en sommes nous pour les mikvaots, les circoncisions et les mariages ?

Joël Mergui : la vie Juive continue, on doit libérer les moments essentiels de la cellule familiale. Les mikvaots sont ouverts. Nous avons constitué une cellule de réflexion avec le Grand Rabbin de France, le Grand Rabbin de Paris, les Dayanims, Rabbins, Médecins de l’AMIF, Représentants de mikvaots. Un cahier des charges très strict a été mis en place avec un protocole rigoureux passant aussi par la formation des balaniots.

La Brit Mila est à nouveau autorisée le 7 eme jour, si l’état de l’enfant le permet, dans le respect des gestes barrières et en tout petit comité, avec toujours peu de monde autour de l’enfant.

Très prochainement, Edouard Philippe annoncera je pense, la reprise des mariages civils. Dès lors que les unions civiles auront lieu, il sera possible d’organiser les cérémonies religieuses, en effectifs réduits, dans le courant du mois de juin.

Tribune Juive : L’Etat d’Israel a semble t-il bien géré cette crise sanitaire. Qu’en pensez vous ?

Joël Mergui : Il faut rendre hommage à l’Etat d’Iraël qui a très vite reagi face à la pandémie, en confinant très tôt sa population et en fermant ses frontières. Nous avons eu des échanges avec les comités scientifiques français et israélien, je me suis entretenu avec le Professeur Eli Wixman qui m’a apporté ses éclairages sur la gestion de la crise.

Israël n’a autorisé l’ouverture des synagogues une fois qu’il n’y avait plus de morts et très peu de malades en réanimation.

Tribune Juive : Pendant toute cette période le consistoire n’a pas bénéficié des dons habituels, comment allez vous faire face financièrement ?

Joël Mergui : J’ai privilégié la santé de nos fidèles à la santé économique de nos institutions. C’est un énorme défi de maintenir les structures et d’accompagner cette crise. il y a un défi financier énorme à relever ; l’ensemble de nos services sont restés en activité, nos charges se sont maintenues.

Nous avons continué à payer les salaires des 600 personnes qui s’occupent de la partie religieuse, n’ayant pas le même statut que le personnel administratif, ne bénéficient pas d’aide de l’Etat ni de chômage partiel.

Nous avons entretenu le patrimoine, assuré les réparations.

Je veux remercier les Bénévoles qui ont fait un travail formidable et qui allègent les charges de fonctionnement de notre institution.

Le consistoire est la colonne vertébrale de la communauté. La sécurité sanitaire est une charge supplémentaire. Nous avons besoin du soutien financier de tous nos fidèles pour faire vivre l’ensemble de nos structures. J’espère que ceux qui paient l’impôt sur la fortune immobilière penseront à le verser au consistoire. Tous les dons sont déductibles Des impôts. Je fais confiance à notre communauté. Il faut continuer à prolonger cet élan de solidarité.

Propos recueillis par Sylvie Bensaid

Photo : © Alain Azria

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11 Comments

  1. Mergui dit : « Nous avons été très durement touchés avec 580 décès sur l’ensemble de la France. »

    Il aurait peut-être fallu demander ce que chiffre représente :

  2. J AI ENTENDU AUTOUR DE 1500 DECES
    MR JOEL PEUT CONFIRMER LE CHIFFRE DE 580
    JE PENSE QU IL Y A ERREUR
    VOIR HORS COVID
    PLUS ISRAEL
    EN TOU??????????????

  3. Mr mergui si vous connaissez bien votre communauté vous saurez que plus de 1200 juifs sont décédés. Il faudra plus vous intéresser à votre communauté au lieu de vous montrer avec des personalites

  4. Je suis un petit peu surpris par cette fermeture totale de toutes les synagogues de France et de Navarre. Je pense qu’il eût fallu plus de circonspection.
    Il faut savoir que 95% des synagogues du Consistoire tirent la langue tout au long de l’année pour avoir Minyan. Dire qu’on a peur que les participants ne respectent pas les distances dans une synagogue commela Victoire ou Buffault ou les Tournelles ou bien province Breteuil à Marseille, Tilsitt à Lyon ou à Bordeaux est quand-même risible, elles sont tristement vides.
    On va voir le consistoire à l’oeuvre pour la réouverture des synagogues et surtout les remplir de nouveau. La mobilisation pour les fermer fut sans précédent, on va voir le consistoire à l’oeuvre en termes de mobilisation pour les rouvrir et les remplir (au moins pour Minyan). Le défi est bien là.

    • La fermeture des synagogues est une mesure de prudence . C’est sûr que les petits jours, les petites synagogues peinent à rassembler 10 participants mais pour une Bar Mistva, un mariage, des prières de deuil, une fête religieuse… ça débordera et les distances salutaires seront oubliées ou non respectées . Haïm Korsia a été sage de reporter la réouverture !

      • Cher André, Haïm Korsia aurait pu interdire les Bar Mitsva ou les grands rassemblements voire même demander aux synagogues qui sont remplies de réduire la voilure. Mais de là à priver toutes les synagogues de Minyan c’est cruel pour les personnes dont l’attache spirituelle , ne serait-ce que répondre Amen, c’est incompréhensible.
        J’ai rarement vu un tel zèle du consistoire. C’est pour cela que nous souhaitons à notre consistoire de faire preuve du même zèle pour la réouverture et avec un minimum raisonnable de participants pour redynamiser ces 95% de synagogues tristement vides toute l’année.

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