En décembre 2015 pour le 110è anniversaire de la loi de 1905, j’ai été contacté par une association des Bouches-Du-Rhône pour une conférence sur la laïcité ayant pour thème « La laïcité au coeur de la société ». J’ai donc répondu à l’invitation, et c’est à cette occasion que j’ai connu le président du Comité Laïcité et République de l’époque qui intervenait également.
A la fin de mon intervention, j’avais lancé un slogan « décomplexer la parole laïque » qui est devenu le titre de la première tribune publiée sur le site du CLR. C’est ce président qui m’avait demandé d’arranger un peu ma communication et de la leur proposer. Depuis, je ne me suis jamais arrêté de publier sur cette question qui est celle, à la fois, du devenir et de l’avenir.
Entre temps, paraphrasant Nietzsche, j’ai lancé un autre slogan « La laïcité au marteau », je m’y tiens.
Il y a 2 jours, j’ai publié ma dernière HUMEUR sur le site Esprit Laïque « Du besoin d’impertinence », en l’introduisant par une phrase : « Chers amis! La laïcité s’accommode très bien de l’impertinence. Je vous propose donc une petite dérive à ce sujet ».
La première personne à réagir s’est fendue de cette remarque : « La laïcité à toutes les sauces, pour mieux faire accepter ses humeurs vagabondes ». Disons que la personne fait partie de « ces gens-là » qui veulent avoir l’air mais qui n’en ont pas; je n’ai pas répondu par souci d’élever le niveau et non de l’abaisser.
Je me suis alors dit que ce serait utile de revenir à l’exhortation à « décomplexer la parole laïque ».
Voici donc quelques fragments de cette tribune :
1- Les évènements récents au niveau national nous rappellent que la problématique de la radicalisation religieuse se pose désormais avec acuité, dans la mesure où elle repose le problème du vivre ensemble dans des termes nouveaux.
Aussi, ils nous interpellent sur la sous-estimation des islamistes à remettre en cause le système des valeurs sur lequel fonctionne la société.
Le traitement d’une question aussi complexe, aussi sensible que la radicalisation religieuse ne saurait consister à répondre aux intégristes de toutes les religions et notamment aujourd’hui les islamistes sur leur registre uniquement, le théologique.
L’enjeu est de réaffirmer le primat selon lequel la société n’est pas condamnée à l’enfermement dans les thèses islamistes et l’agenda qu’ils imposent.
L’alternative existe : produire et réhabiliter un contre-discours qui fissure et démystifie le discours intégriste, et introduit, ce faisant, des failles dans la stratégie d’endoctrinement.
L’accent doit être mis sur la compréhension du principe de laïcité mis à mal par l’interférence grandissante du religieux dans tous les domaines de la vie quotidienne.
2- La peur doit changer de camp et l’impunité, l’état de grâce, doivent cesser pour les intégristes et leurs adeptes ; il n’est que grand temps de les neutraliser, de les mettre hors d’état de nuire, dans le cadre de la loi, bien entendu.
Mais, eu égard aux coups de boutoir que subit la république, et qui traduisent une volonté implicite de remise en cause de ses principes et des droits de l’homme, il ne saurait y avoir de prévention sans une éducation à la laïcité et la mise en œuvre d’une véritable pédagogie qui fait la part entre ce qu’est la laïcité et ce qu’elle n’est pas. Ce faisant, il importe de décomplexer la parole laïque en la portant haut et fort, partout.
Une telle démarche est rendue plus que jamais incontournable par la nécessité de démystifier le discours des islamistes et de leurs complices qui se recrutent un peu partout ; il est important de faire intégrer l’idée que même s’il peut faire illusion auprès de publics non avertis, il suffit de gratter un peu pour se rendre compte que derrière le vernis religieux il n’y a ni consistance, ni pertinence ; c’est un discours fumeux, d’un autre âge et destiné à des victimes dont l’intelligence a été mise en jachère. Le mal, c’est l’absence de pensée, nous sussurait la lumineuse Anna Harendt.
3-L’ « islamophobie » est une invention des obscurantistes et des ténébreux, relayée par des intellectuels semi-habiles qui confondent le moment où il faut lutter contre les stigmatisations et l’amalgame faciles et celui où la raison impose son magistère en retrouvant son autorité sur la subjectivité et où l’on doit réaliser que ce concept n’est ni plus ni moins que l’expression de la parade que les islamistes ont trouvée en s’appuyant sur une victimisation à outrance. La xénophobie est de leur côté, car c’est le ton sur lequel ils défendent leur foi.
Cette invention a eu pour conséquence immédiate au niveau de l’état l’émergence d’une conception paralysante de la laïcité, dont on n’a certainement pas fini de mesurer les dégâts.
Ne soyons plus terrorisés à l’idée de critiquer ce qui peut relever de près ou de loin de l’islamisme.
4- La distinction au sein des islamistes entre modérés et extrémistes est une ineptie, j’ose utiliser le terme d’hérésie. En réalité, il y a le musulman, citoyen normal, dont la foi se suffit à elle-même et qui n’a rien à prouver à qui que ce soit. La pudeur fait partie de la foi dit un célèbre hadith du prophète. Et il y a les activistes, ceux qui prêchent l’islam de combat et qui sont dans la politisation et l’idéologisation de la religion.
Ceux qui ne sont pas dans une logique de violence sont peut être plus dangereux, car leur stratégie est de travailler le corps social et de remettre en cause par petites touches les valeurs de la république (il ne saurait y avoir d’autre constitution que le Coran) et les droits de l’homme sont purement et simplement rejetés en bloc (car Kufr ou mécréance). Ce qui est alarmant aujourd’hui, c’est que ce ne sont pas de simples usagers qui portent atteinte à la laïcité, ce sont des professionnels qui agissent de façon déterminée et délibérée là où ils interviennent (enseignants, médecins, éducateurs, avocats…).
La stratégie des islamistes use et abuse de l’entrisme à grande échelle, et pour les contrer efficacement l’Etat gagnerait à déployer une vigilance à toute épreuve.
Ce n’est pas à un Ghaleb Bencheikh et son phrasé stérile, ni à El Karoui, ni au CFCM, ni aux « Musulmans de France » que l’Etat peut déléguer un sujet aussi crucial.
Conclusion :
Oui ! La meilleure des impertinences c’est celle qui a permis au temporel de s’affranchir du spirituel, au politique du religieux, et au profane du sacré; mieux encore, c’est celle qui a permis à l’Homme de s’émanciper de Dieu. Et d’ailleurs Dieu, grand seigneur, permet la liberté de croire ou de ne pas croire :
« Le vrai ne procède que de votre seigneur, que croie celui qui veut, et que dénie celui qui veut » Coran (18,29).
Oui ! Il faut marteler l’idée et l’exigence de laïcité; mais pour cela, il y a besoin de libérer la parole et d’en parler sans complexe.
Une bonne journée !
A la prochaine ! Avec de l’impertinence.
Khaled Slougui
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