Attention Pépite! Une fois encore le cinéma israélien tient ses promesses et nous offre avec Don’t forget me un petit bijou.
Don’t forget me C’est la rencontre amoureuse de Niel et de la jolie Tom, deux jeunes israéliens fragiles. Lui, 27 ans, musicien, et dont l’hébreu est ponctué d’injures en Néerlandais, est atteint d’un trouble psychotique. Il est là, en phase de réadaptation et voilà qu’il rencontre Tom, 24 ans, hospitalisée pour anorexie. Ces deux-là, magistralement incarnés par Nitaï Gvirtz et Nitzan-Layla Shavit, vont tomber amoureux.
D’entrée, le spectateur devient Tom, ce joli brin de fille qui se prive de nourriture pour enfin devenir mannequin. Se prive jusqu’à se retrouver dans cet institut, sommée de répondre aux questions machinalement posées à tout patient d’un centre spécialisé dans les troubles alimentaires : Mouvements intestinaux ? Menstruations ? Voilà Tom sur la balance, échangeant avec le psy. Elle va mieux ! La preuve ? Vous l’aurez voulu : ses menstruations sont revenues. Elle n’est pourtant pas guérie : elle l’a encore, ce je ne sais quoi qui l’entraîne vers la mort plus que vers la fête.
Lui, épris de tuba et décidé à se produire en Europe, le voilà échangeant avec un réparateur d’instruments de musique. A l’entendre, le spectateur sait d‘emblée que Neil n’a pas toute sa tête. Ça doit bien être là la raison de sa présence en ce lieu. Qui fait office aussi de clinique psychiatrique. Souvent je vous ai parlé et reparle de La raison du plus fou[1]…
Quelques heures après s’être rencontrés par hasard, Neil et Tom sont là. Faisant déjà moult projets. Mais ensemble. Imaginant une vie normale. Mais hors ce lieu.
Tous les deux un brin à la dérive, tous les deux certes borderline, nous embarquent dans leur monde. La Raison du plus fou, disais-je : certes Lui et ses visions. Certes Elle et ses obsessions : Tom, jeune et belle, qui semble si lucide, et se prétend néanmoins immortelle…
Le film obéirait presque à la règle théâtrale des 3 unités. 24 heures de leurs deux quotidiens. Bouleversé par la possibilité d’un amour que chacun des 2 rêve et veut atteindre. Comme une suggestion dans ce lieu improbable. Un tableau impressionniste : Ce déséquilibre si proche et si loin de chacun de nous…
Je voulais que les personnages soient chimiquement et émotionnellement déséquilibrés. Ils ne se rendent pas compte de leur situation et les aventures qu’ils vivent sont simples et parfois pathétiques. […] Faire rire les gens est mon combat pour le respect de soi : C’était là la gageure de Ram Nehari, le réalisateur, déjà coupable de courts-métrages sur les personnes touchées par des troubles mentaux.
Pas de pathos : Faire pleurer serait une manière d’implorer la pitié du spectateur. Objectif réussi : humour et ironie côtoient la satire féroce de nos sociétés qui ont promu ces corps androgynes et fait parfois de manière sectaire l’apologie du véganisme. Entre autres diktats. Sans lesquels nul ne saurait être heureux.
Ces deux êtres différents et qui se sont à raison reconnus l’un en l’autre décident de s’enfuir -le temps d’une nuit- et leur cavale effrénée révèlera autant leurs deux pathologies que cette passion qui laisse les autres désemparés : La médecine. La famille. La société. Qui n’avaient pas prévu… la chose.
Pour le reste, ne manquez pas Don’t forget me, primé au Festival de Turin dans la catégorie Meilleur Film, et emportant dans la foulée les 2 prix d’interprétation Meilleur Acteur, Meilleur Actrice. Sélectionné encore à Rotterdam, Haïfa, Buenos Aires, entre autres…
Don’t Forget Me Al Tishkechi Oti
Drame
Co-production 2017 Israël. France. Allemagne.
Date de sortie en France : 30 janvier 2019
1h 25min
De Ram Nehari
Scénario : Ram Nehari et Nitai Gvirtz
Avec
Nitai Gvirtz dans le rôle de Neil
Moon Shavit dans le rôle de Tom
Tal Berkovich dans le rôle de Einav
Eilam Wolman dans le rôle d’Alon
Rona Lipaz-Michael. Lev Keret. Carmel Beto. Tom Yaar. Bar Belfer. Adam Coman.
Directeur de la photo : Shark De Mayo
Auteur de la musique : Steve Nieve
Sortie en France le 30 janvier 2019.
Production Yif’at Prestelnik Films – Tabo Tabo Films
Sarah Cattan
[1] De Daniel Karlin et Tony Lainé. Editions La Dispute. 1977.
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