C’est hier soir (26 novembre 2018) que s’est achevée au théâtre Cameri de Tel Aviv la sixième saison de « Livres en fête ».
Cette manifestation clôt en quelque sorte les échanges croisés- fort riches et divers- entre La France et Israël pour saluer les 70 ans de l’état hébreu.
Au théâtre Caméri, « Livres en fête » permet toutes sortes de rencontres, de chocs entre les littératures israélienne et française.
J’ai souvenir de la saison 2013 où-pour cause du centenaire de sa naissance- Albert Camus était à l’honneur.
Pour cette saison 6, juste quelques noms-et pas tous-pour juger de l’éclectisme et de la qualité des auteurs cités et lus : Marguerite Duras, Jean-Philippe Toussaint, Maylis de Kérangal ; côté israélien : Ronit Matalon, Itamar Orlev, Aaron Appelfeld (et sa talentueuse traductrice Valérie Zenatti).
Cette soirée de clôture s’est faite en deux temps.
Le premier temps intitulé : « La minute de silence…Une histoire assourdissante ».
Pendant 60 minutes, devant une salle pleine (des séniors surtout et des dames en particulier), Patrick Boucheron, Mélanie Traversier et Christophe Brault nous ont parlé de l’histoire de la minute de silence, née avec la fin de la Grande Guerre. De ces longues minutes de silence de Yom Hashoa en Israël, habitées par toutes les sirènes du pays. À celle d’Hiroshima, à 8h 16 précises.
Comment passer de l’étymologie du mot silence aux propos de Michelet, des mots de Flaubert à la pensée de Walter Benjamin…
Comment passer du silence religieux au silence éloquent du politique. Ou au silence de mort en temps de guerre. Cette sorte de vagabondage, cet « objet » non identifié qui mêle avec bonheur érudition et réflexion, histoire et littérature nous le devons à Patrick Boucheron.
Notre brillant historien (Je conseille à chacun d’entre vous d’écouter sa leçon inaugurale au Collège de France), nous l’avons écouté sur les ondes de France Inter dans « Un été avec Machiavel ». Prendre son petit déjeuner avec Machiavel, quel bonheur !
Mélanie Traversier, historienne de la musique européenne du XVIII et comédienne, et Christophe Brault furent en répons aux propos de Patrick Boucheron.
« Conférence théatralisée » à trois, oui. Nos comédiens allèrent jusqu’à fredonner la chanson de Michel Berger : « La minute de silence »
Écoute, ce qu’il reste de nous
Immobile et debout
Une minute de silence
Le second temps de cette soirée s’intitulait :
« Écrire le temps qui passe, un défi intemporel de la littérature »
Éric Génovèse et Guillaume Gallienne, tous deux sociétaires de la Comédie Française, ont su nous rendre l’épaisseur du Temps à travers les mots de Jean-Philippe Toussaint et ceux de Marcel Proust.
Avec les mots de « La télévision », le texte de Jean-Philippe Toussaint, Éric Génovèse a su non seulement nous faire sourire mais nous faire rire. Et, je vous prie de croire que plus d’une fois la salle entière a chaviré.
Saluons, ici, les intermèdes jazzistiques du trio Deborah Dery.
Enfin vint Guillaume Gallienne.
Les familiers de la Comédie Française le connaissent. Plus modestement, pour votre serviteur, c’est dans l’émission « Ça peut pas faire de mal », sur les ondes de France Inter que j’ai découvert et apprécié Guillaume Gallienne.
Les auditeurs savent avec quelle gourmandise, Guillaume Gallienne égrène les mots de Victor Hugo, Bossuet ou La Fontaine.
Ce soir, place aux mots de Marcel Proust.
Guillaume Gallienne avec ses moindres inflexions, ses moindres mimiques et ses gestes mesurés a fait pouffer de rire plus de 300 personnes.
Quelle prouesse pour « une lecture à la table » !
Ce soir, nous étions dans le salon de madame Verdurin. Ce soir, nous étions les invités de la duchesse de Guermantes.
Ce soir, nous avons ri aux propos féroces du duc.
Ce soir, nous avons eu de la peine en écoutant la confession de Swann.
En rentrant chez moi, je me suis promis de relire Proust, en commençant par les Guermantes. Et je suis persuadé que beaucoup de spectateurs feront la même démarche.
Cette soirée du 26 novembre 2018, au théâtre Caméri, à Tel Aviv, avait bien mis « Le livre à la fête » !
À l’année prochaine à Tel Aviv et partout ailleurs en Israël.
Norbert Bel Ange
Patrick Boucheron c’est bien ce brillant historien qui parle d’immigrés au paléolithique en France, non ? Et par conséquent à l’ouest rien de nouveau et tout va bien madame la marquise…
« Il faut dire avec force que l’hospitalité n’est pas un devoir qui s’impose aux sociétés, elle est un droit que peuvent réclamer les réfugiés. Et ce droit n’est pas soumis à la discussion politique. »
Bref, fermez-la c’est moi le brillant historien qui commande et décide…