La communauté juive marocaine compte en 1940 quelques 260 000 personnes.
Charles Noguès, résident général, représente au Maroc le régime de collaboration avec l’ennemi dirigé depuis Vichy par Philippe Pétain. Il œuvre sans relâche à l’ extension aux Juifs marocains du «statut des Juifs» de France datant du 3 octobre 1940 et publié au journal officiel de l’« Etat français » du 18 octobre suivant.
En dépit de sa répulsion, le sultan du Maroc Mohamed V fait procéder à la publication du dahir (décret royal) du 31 octobre 1940 portant application au Maroc du « statut des Juifs » de France.
Si les institutions communautaires juives sont maintenues, les prohibitions professionnelles et politiques sont désormais appliquées aux Juifs du Maroc qu’ils soient sujets marocains ou non.
Les personnes ayant fui les persécutions antisémites en France et en Europe pour se réfugier au Maroc sont internées en un ancien camp militaire au sud de Casablanca.
Jugée trop laxiste, la «législation» antisémite en cours est remplacée par le dahir du 8 aôut 1941, extension marocaine de la loi française du 3 juin de la même année. Ce dahir aggrave la ségrégation et étend le champs des interdictions dévolues aux Juifs.
Afin de se rendre compte par lui-même de l’application locale des mesures antisémites, le collaborateur Xavier Valat, «commissaire aux affaires juives», se rend au Maroc dès le 18 août 1941. Il y rend visite au sultan puis se déplace au mellah (quartier juif) de Fez. Il estime la situation des Juifs trop favorable et peu conforme à l’esprit de la «révolution nationale». Peu après, l’ arrêt du 22 août 1941 oblige les Juifs à résider dans les mellahs.
La libération du territoire chérifien par l’armée des Etats-Unis d’Amérique à la fin de 1942 sauve la communauté juive de la famine.
Contre toute attente et en raison de manigances stratégiques et politiques, le débarquement américain de 1942 en Afrique du Nord ne met pas fin à la «législation» antisémite en vigueur au Maroc. Il faut attendre les lois de rétablissement de la légalité républicaine du 14 mars 1943 pour que les mesures anti-juives soient annulées sur l’étendue du territoire marocain.
Pour autant, tout au long de cette triste période, la qualité des actions, réactions, relations des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaires marocains sous l’autorité active du sultan auront permis aux Juifs du Maroc d’éviter le pire.
La véritable dévotion des Juifs marocains pour leurs souverains en est une conséquence et le respect réitéré par les souverains pour leurs sujets juifs constituent un élément d’étude et de considération suffisamment rare pour être souligné.
Pierre Saba
L’opinion d’un historien sur la question dans :
http://www.cclj.be/actu/politique-societe/georges-bensoussan-sultan-maroc-jamais-protege-juifs