Les écoles japonaises ont décidé de faire face à la pénurie de professeurs d’anglais en proposant à leurs élèves de suivre des cours dans la langue de Shakespeare proposés par des robots, dès l’école primaire. Le besoin est palpable dans un pays où le niveau d’anglais reste faible.
On connaît le goût des Japonais pour la technologie. Les écoliers de l’archipel vont être servis. À la rentrée scolaire prochaine, fixée en avril 2019, les élèves pourront côtoyer des enseignants en chair et en os, mais aussi des robots professeurs d’anglais. Pour faire face à une pénurie d’enseignants dans cette matière, le gouvernement a en effet décidé de se lancer dans un programme pilote dans un pays peu polyglotte.
Des robots profs d’anglais dotés d’une intelligence artificielle
Avec ce déploiement, le Japon entend améliorer le niveau en langue anglaise des jeunes Japonais qui reste faible. Cinq cents écoles de la péninsule seront dans un premier temps concernées par ces professeurs d’anglais robotisés et dotés d’une intelligence artificielle. Si l’initiative fonctionne, elle pourrait se généraliser d’ici à deux ans, dans tout le pays. Pour mettre toutes les chances de son côté, le ministère prévoit d’associer à ces robots des applications et des sessions de conversations avec des instituteurs anglophones.
Outre le projet linguistique, le projet est aussi économique. Car même si cette mise en place de robots coûte au gouvernement 250 millions de yens (près de 2 millions d’euros), cela lui permet d’économiser sur les recrutements d’enseignants ou d’assistants anglophones.
L’enseignement japonais en question
Le niveau des Japonais en langues étrangères reste faible en comparaison des pays voisins. L’anglais est l’unique langue étrangère enseignée à l’école. L’âge du premier apprentissage va bientôt passer à 10 ans, contre 12 ans à l’heure actuelle.
« Les Japonais sont de très bons travailleurs mais n’ont pas de talent particulier pour les langues », observe Jean-François Sabouret, directeur de recherches émérite au CNRS. « Ils rechignent à apprendre l’anglais et à sortir de leur pays pour se frotter aux autres. Or comment apprendre à nager sans aller dans la piscine ? », interroge le chercheur qui a vécu vingt-quatre ans dans l’archipel et qui attend de voir ce que donnera ce projet de robots profs d’anglais.
Le mode d’enseignement est lui aussi en question. « C’est un apprentissage livresque, presque celui d’une langue morte », note Jean-François Sabouret. Trop littéraire, l’apprentissage ne mise pas assez sur « la communication » essentielle pour intégrer du vocabulaire, oser parler et se perfectionner.
Beaucoup de jeunes Japonais sont d’ailleurs paniqués à l’heure de prendre la parole en cours d’anglais, d’autant que cette prise de parole est évaluée. Et de fait, les Japonais affichent le niveau plus bas au test du TOEFL (test d’anglais comme langue étrangère)
Renverser la vapeur à deux ans des JO de Tokyo
Jean-Luc Azra, diplômé de phonologie à l’université Paris 8 et professeur à l’université Seinan-Gakuin à Fukuoka au Japon considère que « l’anglais n’est jamais vu comme une langue de communication, mais comme une simple matière à test ». Dans un article qu’il a rédigé pour le site Internet Japon Infos, le professeur observe que « tout au long de la scolarité puis de la vie d’adulte, l’anglais n’est jamais utilisé pour échanger avec d’autres personnes sur des sujets personnels, professionnels, culturels ».
L’enjeu est de renverser la vapeur. À deux ans de l’organisation des Jeux Olympiques de Tokyo (24 juillet au 9 août 2020), la pratique et le niveau d’anglais doivent nécessairement décoller. La troisième puissance économique mondiale en a conscience. En 2016, plus de 24 millions de visiteurs sont venus dans l’Archipel. Ces chiffres seront boostés en 2020 comme ce fut le cas en 2016 à Rio de Janeiro, dernière ville d’accueil des JO. La ville brésilienne avait alors enregistré une hausse de 6,2 % du secteur du tourisme.
Alors adieu bientôt les polis « no sorry » ou les hochements de tête, faute de maîtriser l’anglais ? Ce qui est sûr c’est que les Japonais, très férus de nouvelles technologies, vont adorer tester grandeur nature ces professeurs et assistants en langue robotisés et « repeat after » leur nouveau professeur.
Bénédicte Galtier
J’espère que les robots ont appris l’anglais et que maintenant ils vont …. l’enseigner .