En 1984, fraichement libérée d’un très mauvais mariage, mon premier acte de femme indépendante fut d’entreprendre les démarches pour devenir américaine. Après de nombreuses années en tant que résidente et uniquement détentrice de la fameuse « carte verte » il me tardait d’obtenir la citoyenneté, mes deux enfants étant américains par naissance. Sans l’aide d’un avocat car mes finances étaient limitées, je remplis tous les papiers et envoyais ma grande enveloppe aux services de l’immigration, pleine d’espoir. Je vous passe les méandres administratifs, mais un beau jour, je fus convoquée pour prêter serment et recevoir mon certificat de citoyenneté avec un millier d’autres immigrants fraichement acceptés dans cette grande République. Dans un immense hangar, nous étions une marée humaine de toutes les couleurs et origines, agitant nos petits drapeaux et chantant l’hymne américain avec respect, puis regardant sur un écran géant les plus beaux paysages de notre pays d’adoption au son de « America the Beautiful »… Larmes aux yeux et grand moment d’émotion, et bien que seule, je partageais avec cette foule fervente, heureuse et reconnaissante le droit de pouvoir franchir légalement et la tête haute le seuil de notre nouveau pays d’adoption.
Cela fait maintenant 40 ans que j’ai émigré aux Etats-Unis et 34 ans que j’en ai la nationalité. Et c’est avec effarement que je vois comme mon pays a changé. Hier en a été un exemple encore plus flagrant.
CHECKS AND BALANCES
La Constitution , « joyau de la couronne » et texte fondateur du système de gouvernement américain, que l’on doit grossièrement étudier pour devenir citoyen est une des choses que j’ai le plus admiré en dehors de ses paysages, de sa liberté de penser, de son énergie et de son enthousiasme. Ce gouvernement, divisé en trois branches, l’exécutif, dévolu au Président pour la conduite de la politique et des affaires courantes ainsi que la politique extérieure, le legislatif au Congrès (Sénat et Chambre des Représentants) pour l’élaboration des lois et le judicaire pour la vérification de la conformité à la Constitution et l’application des lois. Avec son système de « checks and balances » (contrôle et équilibre) aucun de ces trois pouvoirs ne peut agir sans coopération avec les deux autres. Aujourd’hui malheureusement ce système merveilleux est battu en brèche par une société devenue de plus en plus divisée et un antagonisme frisant l’hystérie. Hier nous en avons eu une parfaite illustration.
Un des attributs du Président est de pouvoir nommer les juges à la Cour Suprême, plus haut degré de juridiction du pays. Ces juges pour être indépendants, sont nommés à vie. Donald Trump, grâce à des circonstances exceptionnelles, s’est retrouvé en position de pouvoir en nommer deux en moins de deux ans révolus de son mandat présidentiel, par la démission pour depart a la retraite il y a dix jours du juge Anthony Kennedy. Trump ayant basé sa campagne sur une plateforme conservatrice et républicaine a bien entendu choisit un premier juge, Steve Gorsuch, puis un second, Brett Kavannaugh qui s’alignent sur ces tendances politiques comme il en avait fait la promesse lorsqu’il était candidat à la présidence. Vu l’importance de ces choix, il avait même pris l’initiative, jamais faite auparavant de dévoiler, en toute transparence, la liste de 25 juges susceptibles de retenir son attention le moment venu.
FASCISTES BLANCS
Hier, avant même la nomination de Brett Kavannaugh, on a vu le Parti Démocrate, déclarer à tout va que quel que soit le nominé, il s’y opposerait et ferait tout, utilisant l’arsenal administratif, politique et médiatique pour faire dérailler sa confirmation sans même considérer les mérites et la carrière, les qualifications et le curriculum impeccable du candidat. Et comme à chaque élection les « épouvantails » de l’avortement et du mariage pour tous sont ressortis des placards et brandis pour l’assaut contre les « fascistes blancs » républicains.
L’Amérique se retrouve à chaque fois prise en otage de questions sociétales personnelles qui ne concernent qu’une partie négligeable de la population et qui deviennent le point d’orgue de tout débat politique. Il est à remarquer que lors de la nomination de juges à cette Cour Suprême par des présidents démocrates, un consensus a toujours été trouvé, alors que les nominés étaient connus pour des opinions particulièrement progressistes et libérales et que les républicains n’ont jamais exposé ni démontré des déclarations ou comportements extrêmes de haine pure et de diffamation comme les démocrates s’en donnent à cœur joie depuis l’élection de Trump et davantage encore depuis hier car avec l’élection du juge Kavannaugh existe la possibilité de revenir à des décisions plus sereines, en strict accord avec l’esprit des pères fondateurs de la Constitution et moins sujettes à un électoralisme débridé qui mine le système.
La Maison Blanche espère obtenir une confirmation de Brett Kavannaugh d’ici le 1er Octobre. D’ici là nous allons malheureusement assister à un déferlement d’insultes, d’antagonisme exacerbé, de malveillances en tous genres jusqu’à la nausée.
Martine Eckerling
Texte intéressant. Je m’attendais à une conclusion exactement l’inverse: indication, de plus, à quel point on est « formaté » par le politiquement correct de la presse.
Lilian P.