Docteur en physique moléculaire, Daniel Zajfman, dirige l’Institut Weizmann des sciences (Israël). Un parcours original.
Il se trouve à la tête de l’un des principaux centres mondiaux de recherche interdisciplinaires, mais revendique le droit à la » musarde scientifique « . Daniel Zajfman, 59 ans, croit fondamentalement que les plus grandes découvertes n’ont pas été faites par des gens qui cherchaient à résoudre des problèmes, mais de façon inattendue. Cette notion a un nom poétique – sérendipité – qui se lirait bien au frontispice de l’Institut Weizmann des Sciences (Israël) qu’il dirige depuis maintenant douze ans.
Pour ce professeur en Physique moléculaire, chaque détail, même le plus infime, compte pour attirer dans son institution les meilleurs. « Il faut choisir les scientifiques pour leur curiosité et leur donner des moyens », résume celui qui a quintuplé le budget alloué aux chercheurs depuis 2006. Un effort qui passe par la construction de nouvelles infrastructures, l’ouverture de nouveaux laboratoires et un infatigable travail pour récolter des fonds. Pas évident pour ce Belge d’origine qui a consacré la majeure partie de sa vie à ses travaux de physique moléculaire à basse température. » J’ai toujours été obsédé par comment se créée la vie et seule la physique, moins théorique que les mathématiques, permet de tout comprendre « , explique Daniel Zajfman. Avec une telle spécialité, il s’est vite tourné du côté de l’astrophysique pour déterminer comment des molécules se forment dans des nuages interstellaires des galaxies.
Poser les bonnes questions
Un cursus qui l’a mené de Bruxelles (Belgique) à Tel-Aviv (Israël), en passant par Chicago (Etats-Unis), mais aussi à Heidelberg (Allemagne) où il a dirigé le Max Planck Institute de physique nucléaire en 2005. « Lorsque l’on m’a proposé de prendre la tête de l’Institut Weizmann, cela revenait clairement à interrompre mes recherches, se souvient-il. Mais j’ai toujours fonctionné par challenge : aller vers quelque chose que l’on ne connaît pas, à condition de penser que l’on peut le faire. Et les carrières linéaires ne m’intéressent pas. »
Collaboration franco-israélienne
Même s’il a prévenu qu’il quittera son poste fin 2019 pour revenir à sa « simple passion de chercheur », Daniel Zajfman goûte avec délectation ce sentiment de faire avancer la science au quotidien. L’intérêt de gérer un centre multidisciplinaire est de voir certains domaines évoluer à grands pas. Comme la biologie « qui va bouleverser le monde médical grâce aux progrès exponentiels de la technologie. » De passage à Paris ce mardi 19 juin dans le cadre de la saison croisée France-Israël qui voit à l’Institut de France se rencontrer des Prix Nobel, des médailles Fields comme Cédric Villani ou des prix Abel avec de jeunes étudiants, il promet d’encourager la collaboration scientifique entre les pays.
« La recherche est universelle parce lorsque l’on trouve un médicament contre le cancer il profite au monde entier, ajoute-t-il. Mais pour le mettre au point, les différences de cultures sont primordiales. Regardez ce qui fait la force d’un campus américain : l’incroyable variété des nationalités qui le composent. Ce sont les différentes approches culturelles qui font avancer la science. » En France, dans le domaine médical, l’Institut Weizmann entretient une relation privilégiée avec Pasteur depuis quarante-cinq ans. Et à la fin du mois de juin, il signera un accord semblable avec l’Ecole Polytechnique. « Chez vous, il existe une tradition unique en mathématiques et en physique « . Et de conclure : « Elle nous intéresse et vous devez en être fier. »
Bruno D. Cot
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