70 ans d’Israël : Malgré la guerre, on se sent plus en sécurité ici qu’en France

Deux Françaises racontent les raisons de leur départ en Israël, l’une il y a près de 60 ans, l’autre il y a 3 ans seulement. Toutes les deux condamnent la montée d’un antisémitisme en France.

Nous adorons la France, la langue française, les Français, mais il y a l’extrême droite et l’islamisme… », témoigne Ariella Lauer à RTL.fr. En 1961, elle a 18 ans, elle quitte Paris et la France pour s’installer en Israël afin de faire son service militaire. Israël qui célèbre les 70 ans de sa création lundi 14 mai.

Elle n’est pas partie vivre ailleurs par peur, mais par sionisme (idéologie politique qui a mené à la conception d’un État hébreu), dit-elle. C’est la différence avec les Français qu’elle voit arriver aujourd’hui dans l’État hébreux pour y vivre. Elle, qui fait partie de l’Assemblée des Français de l’Étranger, rapporte que de nombreux nouveaux arrivants ne se sentent plus en sécurité en France, notamment à cause du « problème islamiste » qu’elle qualifie de « crucial ». 

« On ne se sent plus en sécurité », résume-t-elle. Un sentiment partagé par Ruth Haziza, une retraitée partie en 2015 : « On ne se sentait pas en sécurité avec Toulouse (les attentats perpétrés par Mohamed Merah, ndlr) ou Ilan Hamili (assassiné parce que juif en 2006, ndlr), on avait peur d’en faire partie un jour ». Environ 150.000 Français ont fait le choix de poser leurs valises en Israël au total selon les estimations du Quai d’Orsay.

« On n’a plus de liberté pour assumer son identité, pas au niveau des Français, mais de ceux qui se disent musulmans », lance Ruth Haziza en promettant de ne pas « tous les mettre dans le même panier ». « Il y a une certaine agressivité vis-à-vis de nous », insiste celle qui vivait à Créteil, en banlieue parisienne, il y a encore trois ans. En 2017, d’après le dernier bilan publié par le ministère de l’Intérieur, l’année a été marquée par une hausse des actions violentes contre les Juifs, ainsi que des atteintes aux sites de culte juifs.

Un sentiment d’insécurité forcément renforcé par la vague d’attentats qui a touché le pays depuis début 2015 et le dernier en date, l’attaque au couteau qui a fait un mort samedi 12 mai, à Paris. Ruth Haziza est d’ailleurs partie quelques mois après la fusillade à Charlie Hebdo et la prise d’otages à l’Hyper Cacher en janvier de la même année. Un événement qu’il l’a « secouée ».

Toutes deux soulignent ainsi le paradoxe de se sentir davantage en sécurité dans un pays en guerre comme Israël, que dans un pays comme la France. Mais elles sont catégoriques. Ruth Haziza, qui vit près de Tel Aviv, n’a plus peur de sortir le soir seule, « même juste en tant que femme »« On n’est pas agressé dehors ». Puis elle ajoute : « En France quand je sortais mon téléphone dans le métro j’épiais tout le monde, là non. »

Elle raconte que dans les maisons, tout le monde est équipé d’une « chambre très forte », sorte de bunker mais pas en souterrain, pour se protéger des bombardements. Quand on lui demande si c’est vraiment sécurisant d’avoir une telle pièce chez soi, elle répond « oui, ça rassure quand même ». Finalement, « tout le monde vit avec ça ici, on n’a pas le choix, on n’a pas d’autres terres », explique-t-elle en citant d’autres Français qui ont fait leur Alyah. Là où elle vit, près de Tel Aviv, elle ne ressent pas les secousses du conflit. Mais « peut-être qu’ils entendent davantage à la frontière », concède-t-elle.

Un sentiment de sécurité que Ariella Lauer met, elle, sur le compte de l’armée israélienne, entres autres. « Vous savez que quoi qu’il arrive, vous avez une armée, vous allez être défendu », explique-t-elle. Sa famille a été très touchée par la Seconde Guerre mondiale. La fonction protectrice de l’armée française n’est donc pas évidente pour elle.

« Les gens partent parce qu’ils sentent que la France ne s’est pas occupée des gens qui se sont attaqués aux Juifs.Alors qu’ici, c’est un pays où tout le monde peut vous défendre car tous ont fait leur service militaire », ajoute-t-elle. Ruth Haziza pointe aussi la responsabilité de l’État : « On a l’impression que le gouvernement français ne fait rien ou pas assez, il ne met pas les mots sur les maux ».

Et pourtant, l’intégration en Israël n’est pas toujours facile. Il faut savoir parler hébreux et/ou anglais couramment. Même si elle n’a pas l’intention de revenir, Ruth Haziza avoue que « Paris [lui] manque ». « Ce n’est pas évident au départ, on n’a pas la même culture, pas la même langue, on est attaché à la France, on y pense très souvent ». « Tous les Français disent que la France leur manque, martèle-t-elle. La plupart des Français ont la France dans le cœur ». Mais revenir semble encore impossible. « Vu ce que j’entends et lis sur les réseaux sociaux, ça ne me rend pas vraiment optimiste », explique-t-elle.

Certains Français fuient l’extrême droite française, ce qui ne les empêche pas de se mettre à voter à « droite et à l’extrême droite » en Israël après avoir acquis leur double nationalité, se désole Ariella Lauer. « J’ai remarqué la même chose », ajoute Ruth Haziza. La première résume cette adhérence par une défiance envers les Arabes en France : « Les Arabes, j’en ai eu assez en France, je n’en veux pas ici ». Mais Ruth Haziza nuance : « Ici, on voit trois communautés qui coexistent » et d’ajouter que l’extrême droite en Israël « n’est pas l’extrême droite de la France ».

Cécile De Sèze

Source rtl

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