Le débat sur le projet de budget pour 2018 est accompagné par une bataille verbale entre le président de la République, Emmanuel Macron, et son prédécesseur, François Hollande. Ce combat singulier augmente la désaffection de la gauche à l’égard de la politique du président en exercice.
C’est M. Hollande qui a déclenché les hostilités au mois d’août : il a sorti ses concitoyens de la torpeur de l’été en déclarant qu’il ne fallait pas « demander aux Français des sacrifices qui ne sont pas utiles ». A quoi le chef de l’Etat a répondu : « Il serait étrange que l’impossibilité qui a été la sienne de défendre son bilan devant les Français motive une tentation de le justifier devant les journalistes ». M. Macron a compris en effet que le jugement soudainement négatif rendu par son prédécesseur trahissait sa crainte que l’on ajoute à l’humiliation de son retrait une communication fondée sur l’héritage encombrant qu’il a laissé. Or M. Hollande s’acharne aujourd’hui à protéger son bilan de la médisance et de la calomnie. Il est de plus en plus irrité par des déclarations (et des actes) de M. Macron qui prolongent sa trahison politique par la sévérité de ses propos sur le passé récent.
Propos très violents.
Ceux de ses anciens ministres qui restent attachés à M. Hollande, Bernard Cazeneuve, Stéphane Le Foll, Michel Sapin (qui travaille encore avec l’ancien président), Christian Eckert participent au match entre la vieille gauche et la toute neuve République en marche. M. Sapin a publié dans « le Monde » une tribune d’une sévérité quelque peu excessive et qui, en tout cas, ne mâchait pas ses mots : « Un budget à rebours de notre histoire (…), une faute morale qui contredit les grands principes républicains de progressivité de l’impôt (…), un dédain vulgaire et un mépris hautain ». Cette sentence est d’une violence exceptionnelle. Elle ne laisse guère de place à un rapprochement ou à une réconciliation. Elle exprime colère, esprit de vengeance, exaspération. La « filiation » entre le père et le fils, entre l’ancien et le nouveau présidents, entre le plus âgé et le plus jeune ne représente plus qu’une notion éphémère qui a cédé le pas au ressentiment.
La montée en puissance du conflit s’explique en outre par une politique économique, celle de MM. Macron et Philippe, qui s’appuie sur l’idée de « budget insincère », celui qu’ont concocté les ministres de M. Hollande pour 2017. D’abord rendu par la cour des Comptes, puissante référence, ce verdict a servi d’élément de langage pour le gouvernement actuel. L’accusation semble avoir fait bondir François Hollande et ses amis, qui veulent défendre leur honneur, et tentent de minimiser la mauvaise réputation d’une politique qui, en cinq ans, a augmenté le chômage et les impôts, notamment pour la classe moyenne.
L’ISF au coeur de la bataille.
Le débat sur l’ISF est arrivé à point nommé pour transformer leur hargne à l’égard de M. Macron en acharnement. Le procès fait au gouvernement à propos de la suppression de l’impôt sur la fortune représente un obstacle de taille dans la marche du changement. Dans son entretien télévisé de dimanche soir, le chef de l’Etat n’a rien lâché. Fort de sa majorité absolue, il ira sans défaillir jusqu’à l’adoption de la réforme de l’ISF. Aujourd’hui, une centaine d’élus exigent dans « Libération » que le gouvernement fasse la plus grande transparence sur le bénéfice qu’apportera la suppression de l’ISF aux gens les plus fortunés. M. Macron, bien sûr, n’est pas obligé de céder à une interpellation de ce genre alors qu’il suffit de laisser la représentation nationale faire son choix. Cependant, il apparaît que, dans l’opposition (de droite et de gauche), personne ne veut se laisser enfermer dans le piège parlementaire et que diverses forces entendent mener le combat en dehors du Palais-Bourbon. Chaque mot prononcé par les porte-parole de M. Macron, chaque expression qui sort du politiquement correct sont aussitôt disséqués par les voltigeurs de l’opposition, dont l’intention est de les présenter comme des atrocités verbales. Cette forme de contestation est prodigieusement agaçante et nous renvoie aux techniques du totalitarisme. Mais elle existe et elle n’est pas sans influencer le point de vue de nos concitoyens.
RICHARD LISCIA
Le totalitarisme c’est plutôt, au contraire, la gouvernance actuelle aidée pour l’instant (loin de la prochaine échéance législative), par la pauvreté du débat au Palais Bourbon où la majorité absolue se comporte en godillots et vote, souvent sans comprendre, ce qu’on leur demande de voter. Le seul risque est l’erreur de bouton.
Alors, vive Mélenchon. Je vous souhaite d’en faire l’expérience, vous reviendrez à de meilleurs sentiments à l’égard Macron.
R.L.