C’est l’histoire d’un Pissarro confisqué sous l’Occupation à un collectionneur juif. Ses descendants ont retrouvé le tableau entre les mains d’un couple d’Américains qui dit ignorer sa provenance. À qui appartient-il ? La justice française examine mardi ce dossier cousu de blessures anciennes.
“La cueillette des pois”, une gouache peinte en 1887 par Camille Pissarro, était l’un des 93 tableaux de maître de la collection de Simon Bauer, un grand amateur d’art né en 1862 et qui avait fait fortune dans la chaussure.
Cette collection lui avait été confisquée en 1943 et vendue par un marchand de tableaux désigné par le commissariat aux questions juives. Interné à l’été 1944 à Drancy, Simon Bauer avait échappé à la déportation et à l’extermination grâce à une grève des cheminots.
A sa mort, en 1947, il n’avait réussi à récupérer qu’une petite partie des oeuvres.
Soixante-dix ans plus tard, en 2017, ses descendants, qui s’attellent sans relâche à poursuivre ce travail, ont appris que “La cueillette” était exposée au musée Marmottan, à Paris : le tableau a été prêté par un couple d’Américains dans le cadre d’une rétrospective consacrée à Pissarro de février à juillet, “Le premier des impressionnistes”.
Les Bauer en avaient perdu la trace depuis un demi-siècle.
À 87 ans, Jean-Jacques Bauer, petit-fils de Simon Bauer, a donc saisi la justice et obtenu, en mai, le placement sous séquestre du tableau, afin qu’il ne quitte pas la France une fois l’exposition terminée, le temps d’assigner le couple américain dans une procédure de restitution.
Le tableau, d’abord placé sous séquestre à l’Académie des Beaux-Arts, dont dépend le musée Marmottan, est désormais conservé par l’établissement public des musées d’Orsay et de l’Orangerie.
Libérer le tableau
C’est mardi, devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris, que sera examinée cette question de la propriété de la toile.
Question épineuse, car le couple qui possède actuellement “La cueillette” n’entend pas s’en séparer, invoquant sa bonne foi.
En face, les quinze descendants de Simon Bauer soutiennent que la vente des tableaux de leur aïeul avait été annulée par la justice dès novembre 1945, et soulignent que les oeuvres qu’ils ont retrouvées leur ont, jusqu’alors, toujours été restituées.
Dans le cas de la “Cueillette”, les époux Toll avaient acheté la toile en 1995, au cours d’enchères publiques chez Christie’s à New York. Mécènes du musée de la Shoah de Washington et du musée de Tel Aviv, ils assurent qu’ils ignoraient totalement que le tableau était issu d’une spoliation.
“Ce n’est pas M. Toll, qui a acheté ce tableau dans une vente aux enchères publiques en 1995, qui doit payer pour les crimes de Vichy”, s’émeut l’avocat du couple américain, Me Ron Soffer, auprès de l’AFP.
La bataille promet aussi d’être juridique, car la famille Bauer a assigné les époux Toll devant le juge des référés du TGI de Paris, habituellement juge de l’urgence, sur la base d’un texte d’avril 1945 sur la nullité des actes de spoliation. Mais les Toll, qui estiment que cette ordonnance ne peut s’appliquer au cas présent, entendent contester la compétence de cette juridiction.
Si ce juge se révélait incompétent, il faudrait “libérer le tableau”, souligne Me Soffer, qui a par ailleurs fait appel de la mise sous séquestre de la “Cueillette”.
Sur le fond, l’avocat du couple américain estime que l’issue de ce dossier revêtira une “grande importance” dans le monde de l’art, pointant “un risque d’insécurité juridique pour les tableaux qui sont prêtés à des expositions en France”.
Contacté par l’AFP, l’avocat des descendants de Simon Bauer, Me Cédric Fischer, n’a pas souhaité faire de commentaires avant l’audience.
Pissarro, notre bon juif, est le père incontesté de l’impressionnisme.
Je lui dois son humanisme qui ne laisse pas indifférent à savoir son amour de l’être humain que l’on retrouve dans presque toutes ses œuvres sans insister, pour les oublier, sur les mondanités d’un Renoir ou d’un Monet.
Deux autres peintres nous restent attachants dans ce bouillonnement impressionniste: Manet et son fabuleux « déjeuner sur l’herbe » et d’autres moments de vie rendus dans ses œuvres qui et nous rapprochent de la découverte d’un Guy de Maupassant transmis par nos lectures d’adolescents (e) .
Et enfin Cézanne, l’inoubliable Cézanne, grand ami d’Émile Zola.
Ils sont « Gadol » comme on dit chez nous en Israël!
Viviane Scemama Lesselbaum