La gendarmerie estime que le procureur Alberto Nisman, magistrat en charge de l’enquête sur l’attentat contre le bâtiment de la mutuelle juive Ami qui avait tué 85 personnes en 1994, mort en 2015, a été assassiné, contrairement à la version officielle qui avait conclu au suicide.
Le 19 janvier 2015 au petit matin, le procureur Alberto Nisman était retrouvé mort à son domicile de Buenos Aires, quelques heures avant une audition devant le Congrès. Une expertise de la gendarmerie remise vendredi 22 septembre à la justice conclut à l’assassinat, contredisant les analyses privilégiées jusqu’alors qui menaient au suicide.
Un rapport troublant
Selon la presse argentine, c’est un rapport de plus de 150 pages qui a été adressé vendredi 22 septembre au procureur fédéral Eduardo Taiano. Près d’une trentaine de spécialistes de la gendarmerie nationale ont participé à cette expertise qui invalide la thèse du suicide.
Selon les éléments du rapport, communiqués par les médias locaux, Alberto Nisman aurait été drogué à la kétamine, un puissant anesthésique, et roué de coups portés au nez, au foie et aux jambes avant d’être abattu dans sa salle de bains.
L’analyse de la gendarmerie contredit donc les conclusions de la justice argentine, dont les experts disent ne pas pouvoir mettre en évidence la présence d’une autre personne dans l’appartement du magistrat le jour de sa mort et penchent pour la thèse du suicide.
Une affaire à fort retentissement
Cette mort mystérieuse avait eu un grand retentissement en Argentine. Le dossier sur lequel enquêtait Alberto Nisman était en effet très sensible : il était en charge, depuis 2004, de l’enquête sur l’attentat qui, en 1994, avait ravagé le bâtiment de la mutuelle juive Ami, tuant 85 personnes et faisant 300 blessés, dans le centre de Buenos Aires.
Or quatre jours avant son décès, le procureur avait accusé Cristina Kirchner, alors présidente, d’avoir entravé l’enquête pour protéger les liens avec l’Iran, des ressortissants de ce pays étant soupçonnés d’être responsables de l’attentat.
Le magistrat, décédé un week-end, devait présenter aux parlementaires, le lundi, les preuves de ses accusations contre la présidente argentine et son ministre des affaires étrangères, Hector Timerman.
Pour les proches d’Alberto Nisman, il ne fait aucun doute que le procureur a été assassiné, et des manifestations avaient secoué le pays pour demander justice.
L’attentat de l’Amia
L’attentat visant l’Amia (Association mutuelle israélite argentine) n’a jamais été revendiqué. Une importante communauté juive réside à Buenos Aires, dont les premiers membres sont arrivés dès le XVIe siècle.
L’Iran est soupçonné d’être impliqué dans l’attentat par la justice argentine, qui réclame l’extradition de huit responsables iraniens. L’ancien président Akbar Hachémi Rafsandjani, décédé en janvier 2017, figurait sur cette liste.
Selon Alberto Nisman, les autorités argentines auraient cédé à un chantage de la part de l’Iran, qui faisait miroiter à Buenos Aires de juteux contrats commerciaux. Avant Cristina Kirchner, au pouvoir de 2007 à 2015, Carlos Menem, président au moment des faits, avait lui aussi dû répondre de ses actes devant la justice pour les mêmes motifs.
Vingt-deux ans après, aucun coupable n’a encore été arrêté pour cet attentat, le plus meurtrier de l’histoire du pays.
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