Réintégrer la société par l’armée: La Mehinat Liel

L’armée en Israël est un véritable creuset social. Elle permet à des personnes issues d’horizons et d’origines différentes de se rencontrer et de partager des expériences fortes et uniques.

Mais il faut savoir qu’un certain nombre de jeunes dans notre pays sont rejetés par cette même armée parce qu’ils présentent des addictions à la drogue ou à l’alcool ou qu’ils se distinguent par une adolescence délinquante.

Ce rejet est d’ailleurs souvent réciproque et alors que la structure militaire pourrait apporter tellement à des jeunes hommes en perte de repères, ils s’enfoncent dans une attitude qui les voue à un avenir très sombre.

Betsalel Vieberman a fait partie de ces jeunes au parcours compliqué. Au terme d’une enfance et d’une adolescence perturbées, il a aujourd’hui trouvé sa place dans la société et s’occupe des jeunes en perdition. 

Quand tout bascule

Si Betsalel a créé une Mehina pour préparer les jeunes en perdition à l’armée, ce n’est pas par hasard. C’est son histoire personnelle qui lui permet d’être au quotidien le moteur d’un projet qui aide des dizaines de jeunes depuis sa création, il y a seulement quatre ans.

Betsalel a grandi dans le quartier de Kiryat Moshé à Jérusalem. Il vivait dans une famille aimante et religieuse. Il est un bon élève, un enfant sans problème et qui ne fait pas de problèmes. C’est à 9 ans que la vie de Betsalel bascule. En route pour l’école, il est le témoin direct d’un attentat : c’était en 2002 au carrefour Pat, un terroriste se fait exploser dans un bus. Le bilan est très lourd, 19 morts. « Je me souviens des corps, des gens qui hurlaient… Des images horribles. Le soir, mon père m’a emmené manger une pizza pour en parler. La télévision sur place montrait les photos des personnes tuées. Je regardais ce chauffeur sourire mais je le voyais mort sur le sol… ».

Betsalel ne s’en remet pas, il fait des cauchemars, ses parents l’envoient chez un psychologue, mais rien n’y fait. Il ne s’adapte plus à aucune structure, commence à toucher à la drogue, à avoir de mauvaises fréquentations, est arrêté par la police pour des faits de délinquance, s’éloigne de ses amis, de sa famille, de la religion : « Comment D’ peut-il permettre à un enfant de 9 ans de voir cela » ?! Son père finit par l’envoyer à Itamar dans une école auprès du chalia’h Habad. Au départ, Betsalel ne respecte pas les règles : il ne va pas en cours, s’enfuit de temps en temps à Jérusalem pour retrouver ses amis et se bagarre aussi parfois avec les Arabes… Arrivé à l’âge de faire l’armée, Betsalel ne voulait pas en entendre parler : « Et de toute façon, ils ne voulaient pas de moi non plus. Ça m’arrangeait ». Finalement le chalia’h Habad parvient à trouver les mots pour le convaincre de s’enrôler. Il sera accepté dans le commando Guivati.

Pour la seconde fois, la vie de Betsalel s’apprête à basculer. Il est certes plus discipliné à l’armée que dans le civil, mais il est puni à plusieurs reprises. À la suite d’un accrochage avec l’un de ses officiers, il finit par lui raconter son histoire. « J’ai pris deux semaines de prison au lieu d’une peine beaucoup plus lourde et pendant ces deux semaines, j’ai beaucoup réfléchi à ma vie. J’ai décidé que je devais changer du tout au tout. Je devais arrêter d’être indulgent avec moi-même et de tout m’excuser parce que j’avais vécu un attentat à l’âge de 9 ans » !

 

Une main tendue vers une jeunesse qui se cherche

Betsalel reprend ses études à l’armée pour passer le bac et quand il rentre chez lui à Kiryat Moshé, il décide de former pour l’armée les jeunes en perdition. Il y a quatre, alors qu’il est lui-même un jeune de 20 ans, il met en place des activités pour attirer les jeunes en difficulté. « Je leur apprends tout ce que j’ai appris. Au début, ils étaient quelques-uns à venir. Au terme de la première année, ils étaient 17 et tous sont aujourd’hui officiers à l’armée ».

Deux semaines avant de passer son bac au sein de l’armée, Betsalel décide de tout laisser tomber pour répondre à l’appel de Tsouk Eytan. Il va sur le terrain avec ses amis, il assiste impuissant à la mort de trois d’entre eux : Liel Guidoni, Bnaya Sarel et Hadar Goldin הי »ד . Betsalel décide alors que son association pour les jeunes sera à la mémoire de Liel : « Il m’a appris qu’il faut toujours sourire, parce que le sourire donne la force pour avancer ». Betsalel enseigne aux jeunes considérés « problématiques » les techniques de krav maga, la course à pied, les marches comme à l’armée mais aussi des cours de Torah, des conférences sur la drogue et autres travers dans lesquels les jeunes ont pu sombrer. De toutes ces activités, ils tirent la force et la conviction pour se sortir de leur situation.

 

Créer un but, un rêve. Donner des valeurs

Les jeunes dont s’occupe Betsalel à travers son association sont des cas compliqués d’addiction à la drogue ou à l’alcool. Ils ont perdu toute valeur et n’ont, pour beaucoup, plus de maison. A ceux-ci s’ajoutent  »les jeunes des collines » qui tiennent aussi beaucoup à cœur à Betsalel, lui qui a vécu le tournant de sa vie à Itamar.

Très rapidement, son objectif est de dépasser les activités de quartier proposées à travers le pays. Betsalel veut ouvrir un village à Itamar pour offrir une alternative de projet de vie.

Cette volonté s’est concrétisée, il y a presque un an. La Mehinat Liel a ouvert ses portes et accueillent des jeunes hommes qu’elle se fixe de remettre sur les rails en leur créant un but, un rêve et en leur inculquant des valeurs. On offre à ces jeunes un cadre pastoral et des activités qui les relient à la terre, à leur corps et à leur âme. Le Conseil régional du Shomron oriente vers la Mehina de Betsalel, les jeunes qui en ont besoin. La majorité des pensionnaires ne sont pas ces  »jeunes des collines » mais il y en a et s’ils n’étaient pas dans cette mehina, ils seraient certainement en train d’avoir maille à partir avec le Shabak…

 

« La Mehina est comme une maison de désintoxication mais qui se fixe comme objectif de préparer les jeunes à entrer à l’armée. On leur dispense des cours de Torah parallèlement aux entraînements physiques et aux soins pour sortir des dépendances ».

Les modèles que propose la mehina à ces jeunes sont des Rabbanim, des assistantes sociales, des anciens d’unités d’élite, des personnes qui ont agi pour la société.

« Chaque garçon qui arrive chez nous est un ange avec une mission », estime Betsalel. Pour lui, certes ces jeunes ont déraillé à un moment donné de leur vie, mais il n’est jamais trop tard pour les rattraper: « Dans chaque personne, il y a une voix qui réclame la réussite. Cette voix, certains ont du mal à la mettre en avant. Nous sommes là pour la faire ressortir ». Et cela fonctionne. Les méthodes employées à la Mehinat Liel font leurs preuves. Les jeunes entrent tous à l’armée et se distinguent par leurs capacités physiques et même leur comportement. Beaucoup deviennent officiers. « Après l’armée, ils reviennent dans le village et travaillent; toutes sortes de travaux manuels. Ils commencent aussi des études ».

 

« Je ne renoncerai pas à toi »

Quelle est donc cette recette miracle? Pour Betsalel, qui a lui-même vécu cette transformation, la réponse est claire:  »Ces jeunes ne demandent qu’à entendre qu’ils ne sont pas différents. Ils veulent sentir que nous ne les laissons pas tomber, que nous ne renoncerons jamais à aucun d’entre eux ».

Betsalel poursuit: « La vie est compliquée. Elle nous met au défi. Pour savoir de quoi on est réellement capable, il faut oser. Pour moi, avec mon histoire, ce qui me donne la force aujourd’hui c’est d’abord mon épouse qui est mon partenaire véritable dans cette aventure. Nous nous sommes mariés deux semaines avant l’ouverture de la Mehina, elle me renforce beaucoup. Cette force, je la tire aussi des jeunes dont je m’occupe. Je les aime, ils m’apportent beaucoup. Quand ils entrent à l’armée, ils y deviennent les ambassadeurs de Liel et de ses valeurs. Ils perpétuent sa mémoire ».

S’il y a un message que Betsalel veut transmettre à travers toute son histoire c’est qu’il a compris qu’il « ne faut pas se demander pourquoi moi, pourquoi je suis dans cette situation. Il faut se demander  pour-quoi, qu’est-ce que je dois faire avec ce que je suis. C’est ce que je fais maintenant depuis quelques années. Je remercie D’ pour les « coups » que j’ai pris, pour me donner la force de prendre en mains ces jeunes. Je regrette les erreurs que j’ai commises, le comportement que j’ai eu. Mais je me sers de ces années noires pour construire ma vie et apporter mon aide aux jeunes à qui j’ai pu ressembler. Et à vrai dire, ils m’apportent peut-être plus que je ne leur apporte » !

 

Donner à autrui

En cette veille de Rosh Hashana, nous demandons à Betsalel ce qu’il souhaite pour l’année 5778. « L’amour gratuit! Donner à autrui est un acte fort et indispensable à notre avenir. Je souhaite également qu’il n’y ait plus de guerre et que s’il devait y en avoir, alors que nous soyons assez forts pour les remporter. Enfin, j’espère la venue du Libérateur! ».

Pour plus de renseignements :
Sur FaceBook: מכינת ליאל
Mail: bv22230@gmail.com

Source lphinfo

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