Pour que soit autorisée la captation du procès Merah, par Sarah Cattan

France Info, la chaîne que je me promets chaque matin de boycotter, m’apprend qu’une famille de victime dépose une requête pour que le procès d’Abdelkader, frère de Merah soit filmé et enregistré.

Merah. Le tueur au scooter ? Non : Merah, la bombe, le cataclysme, l’horreur, la brute meurtrière. Merah, ça dépasse Toulouse et Montauban, Merah c’est l’humanité touchée en plein cœur. Merah et ses sept victimes. Imad. Mohamed. Abel. Jonathan. Gabriel. Arieh. Myriam.

Et ajoutons Loïc, le para resté tétraplégique dont nous oublions hélas le calvaire : il est vivant, Loïc.

Maître Olivier Maurice, l’avocat de la famille de Mohamed Chemse Dine Legouad, l’un des trois militaires abattus par Merah,  a déposé ce jeudi 7 septembre une requête écrite auprès de la Présidente de la Cour d’appel de Paris pour que le procès du frère Merah, qui comparaîtra du 2 octobre au 3 novembre devant la Cour d’assises spéciale de Paris pour complicité et associations de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste, soit filmé et enregistré : L’intérêt historique du dit procès mérite bien ça, plaide-t-il.

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Que va décider la Présidente de la Cour d’appel ? Accéder à cette requête serait comprendre l’intérêt incontestable que soit filmé ce procès, que soient rendues publiquement essentielles la leçon à tirer de l’acte indicible que constitua ce premier attentat terroriste islamiste, et que soient actées les insuffisances d’un Etat qui n’a pas su protéger ses enfants.

La Justice française a le devoir d’autoriser la captation du procès Merah, cette affaire marquant le  tournant que l’on sait dans l’histoire du terrorisme : Je crois, plaide à raison le demandeur, qu’elle préfigure de nombreux autres actes terroristes qui se sont déroulés depuis.

Pour info, rappelons que le 11 juillet 1985 précisément fut votée la loi Badinter sur la constitution d’archives audiovisuelles de la justice, autorisant l’enregistrement audiovisuel de certaines audiences[1]. 32 ans après, se comptent sur les doigts des deux mains les procès qui furent filmés : celui de Klaus Barbie en 1987, ceux de Paul Touvier puis Maurice Papon, l’affaire du sang contaminé, et en 2014 le premier procès d’un génocidaire rwandais.

Nous savons tous que l’intérêt historique du procès pour l’avenir de la France ne fait aucun doute et qu’une captation, parce qu’elle permettra la constitution d’archives historiques de la justice qui pourront être consultées par les générations futures, sera le garant de la vérité historique, attestant de ce qui se sera exactement passé et actant la décision que rendra la justice pour répondre à ce qui restera l’acte I de la tragédie du XXIème siècle.

3 semaines : voilà le temps imparti à la cour d’appel de Paris pour faire connaitre sa décision, que dis-je : son courage.

Et nous, nous pourrons cesser de n’avoir en mémoire que ces multiples renoncements, ces laisser-faire successifs, la pièce de Kacimi[2] qui osa nous parler d’un suicidé de la société plus que du terroriste islamiste qu’il fut et contre laquelle une plainte pour apologie du terrorisme est d’ailleurs déposée, ni le combat du seul Abdelghani Merah qui marcha longtemps, seul, tentant d’ éveiller les consciences en rappelant l’odieux nom qui lui colle à la peau.

[1] Le délai de 20 ans pour pouvoir diffuser l’enregistrement fut supprimé en 2008, et, après 50 ans, la diffusion est libre.

[2] Moi, la mort je l’aime comme vous aimez la vie, de Mohamed Kacimi.

Sarah Cattan

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