Cet été, un panneau touristique a été installé sur la N88, à l’entrée de la Haute-Loire. Un panneau qui réactive de vielles tensions entre le Chambon-sur-Lignon et les communes voisines.
Le « panneau de la discorde » se trouve à l’entrée du département de la Haute-Loire, sur la RN88, dans le sens Saint-Étienne-le Puy-en-Velay. Il annonce : « le Chambon-sur-Lignon, terre de Justes ». Une manière pour la mairie du Chambon d’informer et d’interpeller les automobilistes sur le passé des habitants de la ville, qui ont caché et sauvé plus de 3.000 juifs pendant la Seconde Guerre mondiale.
Pour saluer la mémoire locale
Les « Justes » est un terme créé par l’État d’Israël pour désigner ceux qui ont risqué leurs vies en aidant des juifs pendant la Shoah. Au Chambon-sur-Lignon, en 2013, on a d’ailleurs inauguré un lieu de mémoire pour rendre hommage à ces habitants ayant sauvé de nombreuses personnes juives, notamment des enfants, entre 1939 et 1945. C’est pour transmettre cette mémoire et ce passé que la mairie du Chambon a proposé ce panneau, validé ensuite par la préfecture. « Combien de personnes empruntent la N88 et ne savent rien de notre histoire ? », explique Denise Vallat, adjointe à la culture du Chambon-sur-Lignon.
Mais l’initiative ne plaît pas à tout le monde. Pour le maire du Mazet-Saint-Voy, petit village à 6 kilomètres de là, ce panneau réactive les tensions nées au moment de l’ouverture du lieu de mémoire. Plusieurs communes avaient en effet dénoncé que le Chambon tentait de s’approprier un passé commun aux villes du plateau du Lignon. Le maire estime que ce panneau « usurpe la mémoire des Justes et pervertit l’histoire locale« . Bernard Cotte ne mâche pas ses mots, tout comme Marianne Mermet-Bouvier, son adjointe : « Le texte me choque. Le Chambon n’est pas la seule commune qui a agi. On a accueilli partout, sur cette montagne. S’il y avait eu un panneau : ‘le Chambon, lieu de mémoire’, nous n’aurions rien eu à dire ! ». La mairie du Chambon refuse cette accusation : « Si vous regardez bien le panneau, il est écrit ‘terre de Justes’, et non pas ‘terre des Justes’. Cela veut dire que nous sommes une terre de Justes parmi les autres. Nous ne voulons pas nous accaparer ce passé », insiste Denise Vallat.
Une récupération touristique
L’autre aspect qui provoque la colère des communes voisines, c’est en effet l’attrait touristique que représente ce panneau. Certains habitants du Chambon reprochent d’ailleurs à leur mairie de vouloir faire commerce de ce passé et de cette mémoire. Denise Vallat se défend en expliquant que ce panneau a seulement pour but d’informer les automobilistes qui traversent le département. Entre 10 et 15.000 touristes viennent chaque année au Chambon-sur-Lignon, notamment pour visiter le lieu de mémoire.
Tout ça est assez ridicule, d’autant que l’exposition que j’ai visitée cet été rend largement justice à tous les habitants du plateau qui ont hébergé des juifs, sans faire de différence entre ceux du Chambon ,des villages alentour dont le Mazet-Saint-Voy et des hameaux isolés.
Nos amis protestants méritent mieux que des querelles « de clochers ».