La France court au désastre. Ce qui paraissait impossible il y a peu de temps encore n’est plus aujourd’hui improbable : Mme Le Pen peut devenir la Présidente de la République française ; à tout le moins le score du Front National au deuxième tour peut dépasser la barre des 40%, voire des 45%, ce qui serait déjà un coup de tonnerre politique.
La trahison de N. Dupont-Aignant, l’attitude ambigüe de J.L. Mélenchon, l’effondrement du PS, les finasseries de certains de mes propres « amis » politiques ajoutent à la confusion générale sur laquelle prospère le FN.
La victoire de l’extrême-droite en France constituerait un séisme géopolitique. L’Union européenne qui peut résister au Brexit, et même en tirer profit, ne survivrait pas à un « Frexit ». Je ne sous-estime pas le désamour de nos concitoyens pour l’Europe; je mesure l’ampleur des changements qui seront nécessaires pour la remettre sur la bonne voie. Mais liquider la construction européenne que nous avons patiemment édifiée serait une aberration. Car l’Europe a réussi. Elle nous a apporté 70 ans de paix, ce que notre continent n’avait pas connu depuis des siècles. Elle est aujourd’hui un espace de liberté et de prospérité comme il en existe peu au monde. Je comprends que ces affirmations choquent nos concitoyens qui vivent dans le chômage, la précarité, la pauvreté. Mais, au prix de réformes profondes, l’Europe peut nous aider à en sortir. Ce n’est pas sans raison qu’elle attire de si puissants flux migratoires. C’est en soi un problème qu’il faut traiter car nous ne pouvons pas accueillir « toute la misère du monde ». Mais c’est la preuve d’une réussite. Comparons-nous!
Certains invoquent les mânes du Général de Gaulle pour conforter leur euro-phobie. Quelle falsification historique! C’est De Gaulle qui a voulu nous faire entrer dans la Communauté européenne en 1958, en activant le traité de Rome qui n’était encore qu’un papier; c’est De Gaulle qui a imposé la Politique Agricole Commune; c’est De Gaulle qui a fait de l’entente franco-allemande la pierre angulaire de la construction européenne et du redressement français. Je suis gaulliste et européen et j’en suis fier!
La dislocation de l’Union européenne serait aussi une menace pour notre sécurité collective, pour l’Alliance atlantique déjà fragilisée par les déclarations contradictoires de la nouvelle administration américaine, et méthodiquement sapée par la diplomatie russe qui ne fait pas mystère de sa volonté de revenir au monde d’avant. Le monde sans l’Union européenne perdrait encore un peu de sa stabilité, en un temps où le mot de « guerre » refleurit dans certains discours.
Séisme géopolitique, désastre économique aussi. L’abandon de l’euro qui nous a si bien protégés dans les tempêtes récentes et qui nous garantit des taux d’intérêt historiquement bas serait une faute majeure, à laquelle d’ailleurs, quel que soit leur vote, la majorité des Français n’adhère pas. Tout le monde, y compris le parti de Mme Le Pen, s’accorde à prévoir une dévaluation immédiate du franc FN de l’ordre de 20 à 30%. Nos dettes et notamment celle de l’Etat seraient immédiatement augmentées d’autant. On nous dit que nos exportations en profiteraient; peut-être à terme si notre appareil productif répond à la demande internationale; ce qui est sûr, c’est que nos importations seraient mécaniquement renchéries de 20 à 30%, à commencer par le pétrole, d’où la hausse des prix, la baisse du pouvoir d’achat dont souffriraient comme toujours les plus fragiles. Tout cela, tout le monde le sait!
Défaite morale par dessus tout. Quelles que soient, ces derniers temps, les tentatives de dé-diabolisation des dirigeants du FN ou leurs danses du ventre à l’intention de l’extrême-gauche (ce qui est là une constante historique), la vérité est criante : l’histoire, l’idéologie, les hommes et les femmes qui ont fondé ou animent ce parti, bref le monde FN est depuis toujours aux antipodes du nôtre; son anti-gaullisme a été constant depuis 1940. De façon récurrente, les déclarations de ses chefs nous rappellent que nos valeurs n’ont rien à voir avec sa vulgate.
C’est pourquoi, Françaises, Français, je vous appelle solennellement à résister à la tentation de tout casser, de « renverser la table » comme hélas! vous y ont parfois incités certains responsables de ce qui fut un grand parti de la droite et du centre, le parti qu’avec d’autres j’avais fondé.
Quand, dans une élection à deux candidats, on veut éliminer l’un , il n’y a pas d’autre solution que de voter pour l’autre. L’abstention ou le vote blanc, c’est un coup de pouce à Mme Le Pen.
Je ne vous demande pas pour autant d’adhérer à la personne ou au programme d’E. Macron. Nous ne le connaissons pas bien . Sa « nouveauté » séduit, son peu d’expérience des hautes responsabilités inquiète. Quant à son programme, il reste flou et ambigu. Mais il faut choisir. Après le scrutin présidentiel viendront d’autres échéances, à commencer par les élections législatives. Nous devrons alors reconstruire une proposition politique, fondée sur la valeurs de la droite et du centre que j’ai toujours portées. Une droite humaniste qui conjugue liberté économique et justice sociale, une droite résolument et lucidement européenne, une droite confiante dans l’avenir, dans l’invention d’une croissance durable, dans la transformation numérique du monde, dans la jeunesse du monde.
Je vous adjure donc, mes chers compatriotes, de voter pour E. Macron parce qu’il est le seul le 7 mai à pouvoir éviter à la France le malheur du FN.
Je sais que vous n’avez pas de conseil à recevoir, que vous êtes majeurs et vaccinés, que les consignes des partis ou des dirigeants politiques vous insupportent. Mais si ma parole peut encore avoir un peu de crédit auprès de vous, et d’abord auprès des jeunes qui m’ont accompagné avec tant de foi, ne la balayez pas d’un revers de main. Je ne demande rien, je n’attends rien, je ne cherche pas à me placer. Je ne serai pas Président de la République, je ne re-deviendrai pas Premier Ministre, je ne serai plus ministre. C’est aux 30-40 ans de prendre la relève. Ma seule ambition est de les y aider.
Je ne me lasserai donc pas de vous dire : Peuple de France, ressaisis-toi, reste fidèle à ton génie, aie confiance.
Alain Juppé
Les beaux jours de l’Europe sont derrière nous depuis 1993 (abolition des frontières fiscales) et 1998 (accord sur l’euro). Depuis ces deux dates nous assistons au « sauve-qui-peut, chacun pour soi ». Même s’il y a encore eu quelques impulsions (libre-circulation en 1985, tentative d’unification européenne en 2007), elles ne furent pas décisives. Les désordres économiques à partir de 2008 ont contribué à maintenir encore un semblant de volonté unitaire. Mais le dernier quinquennat en France et la « Grande coalition » en Allemagne ont acté la survenue d’une période de doute : plus aucune intiative, perte de confiance totale, incapacité à réagir aux événements mondiaux, afflux désordonné de migrants, brexit. Aujourd’hui l’Europe a besoin d’être réformée. Il est cependant illusoire de penser qu’un état isolé va pouvoir imposer à lui seul la renégociation des traités. Il nous manque la farouche volonté commune d’y arriver. Alors oui, l’Europe nous a assuré quelques années de paix. Pas 70 ans, mais bien 48-53 ans, encore moins si on tient compte des années dangereuses de la guerre froide et de l’équilibre de la terreur.
Cependant, le monde change, la société aussi. La démocratie des états, qui n’est pas celle de l’Europe, a l’avantage d’amortir le contre-coup des révolutions mais elle ne les empêche pas. Quelle que soit l’issue du deuxième tour, une page est tournée, une nouvelle va s’écrire. Et elle ne sera pas le copié-collé d’une page ancienne. Elle s’imposera quel que soit le nouveau président. Chacun en prendra acte à sa manière, plus administrative ou plus démocratique, par la voie du référendum. La révolution a commencé par l’élimination pacifique des acteurs anciens, il ne sert à rien de se prévaloir de la démocratie et dans le même temps d’en avoir peur. C’est une bonne chose de laisser les 30-40 ans prendre la relève, ce serait encore mieux de leur épargner des conseils pas toujours avisés.
Vous etes au dessous de tout! Donner la parole a Ali Juppe qui etait en cheville avec les pires islamistes, qui sautaient de joie lorsque des attentats avec lieu en Israel.
Vous n’etes plus representatifs de la communaute. Honte a vous!
On donne la parole ! C’est pour cela que notre titre est Tribune juive, une Tribune où s’expriment des gens qui n’ont pas tous les mêmes convictions. Alain Juppé, ancien Premier Ministre, est convaincu du danger de voir le FN s’emparer du pouvoir et nous publions sa prise de position. À l’égard d’Israël, Alain Juppé défend la politique traditionnelle du Quai d’ Orsay telle qu’elle a été définie par le Général de Gaulle. Bien sûr, ce n’est pas celle que souhaitent les Israéliens et tous ceux qui les soutiennent. Faut-il faire d’ Alain Juppé un ennemi d’ Israël et le soutien des terroristes ? Non! Certainement pas.
Mr Juppé, votre sens de l’état ne fait aucun doute…mais la situation actuelle n’est elle pas due en partie à votre manque de réactivité lors du quasi empêchement de François Fillon, par les « affaires ».
Un empressement moins prompt à vous retirer, un engagement dans la bataille aurait peut être permis aux Français d’avoir un débat contradictoire au deuxième tour entre droite et gauche, et non entre centre et droite extrême.
Les jeux sont faits et il faut donc coûte que coûte soutenir le candidat républicain de ce second tour et le nommer E.Macron….les législatives seront un autre champ d’expression démocratique.