Un pavé en mémoire des victimes du génocide nazi, un pavé où est inscrit le nom et le destin de la victime: à Bruxelles, deux symboles de ce type ont été placés devant les habitations où vécurent des enfants juifs. Sung-Shim Courier et Didier les ont découverts pour RTL info 13 heures.
Nina Aronowicz est née le 28 novembre 1932 dans une maison de Bruxelles. Comme des centaines de milliers de Belges, elle s’est réfugiée en France suite à l’invasion allemande en 1940. Elle a vécu à la maison des enfants d’Izieu jusqu’à cette nuit du 6 avril 1944 où « la Gestapo, emmenée par Klaus Barbie, arrêta les 44 enfants et les 7 adultes qui les encadraient », explique devant cette habitation un des membres de l’Association pour la Mémoire de la Shoah.
Cette fondation place des pavés un peu partout en Belgique, en hommage aux victimes du nazisme. Ces pierres sont une création de l’artiste berlinois Gunter Demnig. Elles sont aussi un souvenir cher pour celui qui a connu autrefois la fillette. « On ne marche pas sur ce pavé, mais on bute dedans. C’est un pavé qui est coloré, qui reflète la lumière, et quelle lumière… Avec un nom gravé dessus, on ne peut pas faire autrement que de s’arrêter et de lire le nom », explique Samuel Pintel, rescapé de la rafle d’Izieu.
En se souvenant du nom des victimes de la Shoah, c’est l’occasion de prendre de la perspective. Parce que, pour les organisateurs de cette journée, commémorer, c’est aussi voir plus clair dans le présent.
« Ici on parle d’antisémitisme, qui est encore présent aujourd’hui, mais par ailleurs on parle aussi de la barbarie d’hier et de celle d’aujourd’hui, qui font qu’il y a des millions de réfugiés et d’enfants qui se mettent sur la route du départ… », ajoute Bertrand Weert, administrateur de la maison d’Izieu.
Le nom de Paulette Heber se trouve désormais aussi devant la maison qu’elle a occupée avant de se réfugier à Izieu.
Génocide juif: des pavés de la mémoire peuvent désormais être placés devant les maisons des victimes
Je n’aime pas ça. En plus si on bute dessus c’est dangereux…
Cette « Association pour la Mémoire de la Shoah » en Belgique, et toutes les autres, devrait méditer ce propos de l’historien Henri Rousso, fils d’un juif égyptien chassé de son pays par Nasser en 1956.
» Jusqu’à quand cette responsabilité de réparation doit-elle être transmise ? Jusqu’à quand les générations qui portent ces fardeaux vont-elles accepter de les porter ? Il suffit de regarder ce qui se passe dans l’est de l’Europe aujourd’hui pour comprendre qu’on atteint des limites. Ce qui se passe actuellement en Pologne est stupéfiant. Les flambées réactionnaires ou nationalistes s’accompagnent d’un rejet de la Shoah comme paradigme mémoriel. La Pologne veut ainsi retirer à l’un de ses plus grands historiens, Jan Gross, la médaille qu’elle lui avait donné en 1996 [ayant travaillé sur la complicité polonaise dans le génocide juif, le chercheur est accusé d’être «antipatriote» par le gouvernement du pays, ndlr].L’Europe paie sans doute les excès de la «mémoire négative. »
Le mot essentiel est le mot « limite » et cette histoire de pavés éblouissants (sur lesquels on bute!) dépasse la limite du « devoir de mémoire ».
Faudrait les aider à oublier ?
Non, mais de là à les faire se casser la gueule sur des pavés…
Aujourd’hui la Shoah est enseigné à l’école et l’on peut lire des centaines de livres et visionner des dizaines de films sur le sujet. Il y a aussi des monuments, des musées, des commémorations. Je pense que c’est suffisant pour ne pas oublier sans en rajouter encore et encore au point que cela devienne contre-productif comme nous pouvons l’observer depuis quelques années avec ceux, non-juifs et de plus en plus nombreux, qui en viennent à parler de saturation.