En réalité, rien n’est fondamentalement « nouveau » en matière de révisionnisme, sinon le révisionnisme lui-même. C’est un phénomène qui surfe sur trois éléments qui sont peu étudiés :
– la culpabilité européenne à l’égard des juifs et sur laquelle le nationalisme de l’idéal panarabe post-colonial joue allègrement (c’est le mot : » jouissance « ).
– la déviation de l’enseignement de l’histoire qui s’est incurvée dans les plis des sciences sociales appliquées à une minorité musulmane vécue comme accusation du colonialisme et à qui ont été donnés tous moyens de faire pression sur les systèmes éducatifs des États, depuis les premiers chocs pétroliers, les intifadas et les guerres musulmanes (on souligne peu l’influence des 2M de victimes de la guerre Iran/Irak, dite « Défense sacrée » et ceux de l’invasion de l’Afghanistan par la Russie).
– la pression considérable, aussi, de la gauche européenne, pacifiste et internationaliste : elle a perdu tous ses combats internationaux (elle n’est pour rien dans l’élection de l’ANC et de Mandela en Afrique du Sud et la fin du régime d’Apartheid et se tait sur le nationalisme « noir » et les conflits ethniques dans ces territoires de l’Afrique australe ) ; une gauche qui a eu et a des grandes influences, positives sur la prise de conscience humaniste, mais qui a toujours placé son idéal comme devant justifier tous les moyens, quitte à tordre le coup au réel et à truquer les termes de la vérité historique.
Lorsque, par exemple, M.Manuel Valls, d’origine catalane, marqué par la résistance républicaine espagnole et conjoint d’une femme juive, réitère le terme « apartheid » par trois fois pour parler des populations « ghettoisées » dans les banlieues françaises, il perpétue une terminologie que la gauche radicale française emploie à l’égard d’Israël, qui est un Etat lui-même perçu comme « ghetto », né du Ghetto (ce qui dans le judaïsme n’a rien de péjoratif) et « ghettoisant » et pratiquant l’ « apartheid » pour sa sécurité, au mieux, ou en vue de son hégémonie, au pire.
Cette mixité sociale dénigrante entre « Apartheid » et « Ghetto » dans la pensée politique remplace sournoisement la « lutte des classes » à gauche et concurrence de très près la négation chauvine de toute vocation « sioniste ». Sion est découplé d’Israël et Israël est arraché aux juifs qui sont « embaumés » par des qualificatifs louangeurs pour mieux être d’une autre main déniés par des approximations incestueusement proches de la Malédiction. Affirmer « les juifs de France, c’est la France », cela signifie-t-il qu’ils en sont l’âme (ce qui équivaut aussi à ne pas comprendre qu’ils puissent nécessairement la quitter comme on croit que l’âme quitte un jour le corps) ; ou cela veut-il dire que la France est d’essence juive, auquel cas on comprend mal qu’il soit intolérable d’affirmer les « racines chrétiennes de l’Europe » dont la France a tout de même un certain nombre de symboles et d’évidences.
On le voit, tout est au croisement du langage et du territoire. Et la bataille israélienne au sujet « des » Territoires palestiniens, c’est-à-dire des « frontières reconnaissables de la Terre sainte, vue de France, est intrinsèquement une projection du « territoire » sémantique de celle de la République actuelle bousculée par l’Europe qui se trouve déchirée entre un nord protestant, un sud latin catholique, un Est orthodoxe et un Ouest qui vient à peine d’entrer dans l’Euro et de sortir de ses possessions du Mahsrek et du Maghreb. Tout se bouscule : Liban, Syrie, Israël : trois pays où la France est et a été présente et où elle n’existe plus comme ce fut le cas. Trois pays où son « exigence » démocratique est fluctuante et changeante. Israël, qui est le seul Etat où on vote librement et où on n’exécute pas les condamnés dans tout le Moyen-Orient, est régulièrement l’objet de « propositions de « paix » toutes aussi autoritaires et arbitraires les unes que les autres car unilatérales et comminatoires. Le Liban attendra. La Syrie est défaite.
Accuser Israël de « rater » sa vocation d’exemplarité pacifiste « eu égard » à son passé persécuté, c’est s’accuser finalement soi-même d’impuissance à comprendre que l’Histoire n’est pas une ligne droite accidentée à dominer par la vitesse et la résistance des pneus, mais un progrès ascensionnel de la Vie sur la Mort, et qui ne regarde pas en arrière.
L’Histoire n’est pas le passé, comme enseigné et traduit, mais le mouvement général du temps et de l’espace où l’Humain n’est ni sujet ni objet mais acteur et contemplateur.
Ce qu’on appelle le « devoir de mémoire » n’est pas de refaire mentalement le chemin tragique, ni de le revivre, ni de le figer dans une statuaire, mais de le transformer en énergie culturelle, en art, en parole de vie, en soutien aux victimes et aux indigents, en échange inter-communautaires, en apprentissage des langues, en « Alliance ». L’Alliance donne la Mémoire et la Mémoire la rend apparente et tangible.
La « révision » part donc de là : la simplification de l’Histoire pour la faire rentrer dans l’escarpin étroit du Pouvoir dualiste : pied gauche, pied droit… pour une seule sandale… Forcer le réel a correspondre à l’imaginaire, et modeler le monde sur le mannequin inerte de sa peur.
Car de quoi s’agit-il en réalité? Il s’agit d’avoir barre sur un déroulement historique hors de contrôle de la modernité, un fond religieux qui à chaque fois qu’on le comprime remonte tel l’air surpressé dans un ballon écrasé, jusqu’à l’éclatement, et de « rationnaliser » de façon manichéenne, dualiste, ce qui sort du champ binaire.
Ainsi le judaïsme qui est une pensée non idolâtrique, non fermée sur soi, sur une « révélation » d’incarcération mentale, et qui livre littéralement à l’inconnu promis à reconnaître, est en butte aujourd’hui tout spécialement à une volonté procédurière d’ « atterrer » ceux qui sont coupables d’élévation et aussi, dans l’idéal rigoriste religieux et politique, d’ « éthérer » ceux qui sont coupables de s’affirmer implantés, et cultivateurs de l’Histoire, récolteurs et transmetteurs de l’Histoire qui est, ici-bas, une partielle jachère.
L’Echelle de Jacob est ainsi désertée, puisqu’il est interdit d’y accéder et d’y déambuler par le moyen du dia-logue, de la prière, de la ren-contre et de l’é-change.
Sur cette échelle, désormais, ceux qui se trouvent en haut y restent et ceux qui se trouvent en bas y restent. C’est ce qu’on appelle un arrêt cardio-respiratoire. Une embolie.
Or, le judaïsme est précisément ce mouvement respiratoire de l’Histoire à la Transcendance, et de la Transcendance à l’Histoire qui est en soi un Commentaire de tout le cheminement divin et de tout le cheminement humain, et l’un par l’autre, avec l’autre et en l’autre.
Une société marquée par le dualisme, pour qui un et un font deux et dont la principale activité est de générer du « deux », ne peut évidement comprendre aisément que le but de l’échange gazeux provoqué par ce double mouvement de diastole-systole entre le Temps et l’Espace est de créer de l’Unité : Unité de temps, Unité d’espace, Unité de l’Homme, Unité de Dieu.
Une Unité qui se montre sous toutes ses dimensions et dont Israël rassemblé à Jerusalem, est en quelque sorte le Roc visible.
Le révisionnisme est donc l’ordre autoritaire de cessation de la libre circulation des hommes et de D.ieu sur l’Echelle de l’Histoire, la permutation de la Bénédiction en Malédiction et de la Malédiction en Bénédiction, et la subversion des consciences en y instillant une culpabilité éternelle par l’indélébilité du sang, au lieu d’en faire une marque de libération. Le sang devient ainsi marque de condamnation non de rédemption.
L’ennemi, qui dépasse la conscience en l’investissant, à une parfaite connaissance du travail à faire et des structures mentales. Il sait où taper pour que ça fasse mal, où frapper la cognée pour faire tomber d’un coup l’arbre branlant.
Car enfin, ce qui est visé dans cette « torsion » de la Mémoire, c’est essentiellement et en définitive, l’Alliance qui doit être impérativement rompue et ne pas TOUCHER à son but.
Le dénigrement du « religieux », où la caricature et l’exagération prennent la place de la pensée et de l’estime mutuelles, l’obscénité des scènes de mort et de violence qui subvertissent les jeunes consciences et se substituent à la « davar » de vie, la rendant ridiculement silencieuse et faible, la manipulation des opinions européennes sempiternellement placées et ramenées, tout comme la conscience juive derrière les barreaux et les barbelés des camps par une accusation permanente de trahison, de « fidéicide », d’indignité, de blasphème et de lâcheté, participent au Révisionnisme.
Et je crains que l’usine à gaz des lois « sanctuaristes » de la Mémoire, qui ne sont que des lois humaines, soient contre-productives à empêcher cela, et que seuls le courage éducatif d’affronter des familles ignorantes ou isolées ou désintégrées, l’audace des Etats d’assumer la vérité et les chocs de l’Histoire, et la décision des communautés de montrer ensemble l’exemple de la fraternité et de la reconnaissance mutuelles sont des solutions viables.
Le gouvernement israélien fiché, typé et réputé pour être un summum d’intransigeance et de raideur (là encore un confortable siège pour le conformisme idéologique qui ne s’embarrasse pas des détails ni des contextes) a demandé aux écoles primaires du pays d’enseigner obligatoirement l’arabe aux enfants juifs à partir de 6 ans. C’est une réponse. Il y a des obstacles, des refus, des préjugés, mais c’est une information! Une « formation » de la conscience de l’intérieur.
Le but de l’Alliance éternelle (donc qui a toujours cours) est de faire que l’Homme touche Terre un jour et pour toujours.
C’est ce qu’on pourrait appeler une arme contre-révisionniste très efficace. Si ce n’est pour tout de suite, au moins pour demain.
Il faut, à la tête de l’Histoire où nous parcourons la Terre sanctifiée, une Postérité, une Onction et un But. L’Alliance a touché Terre une fois pour toutes. Mais ceux qui y circulent de l’Est à l’Ouest et du Nord au Sud ne doivent pas être découragés d’y traverser l’Histoire « à pieds secs ». (Gn 28:11)
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révisionnisme : http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/10/30/un-nouveau-revisionnisme-cherche-a-nier-le-lien-du-peuple-juif-avec-la-terre-d-israel_4800008_3232.html
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