« Il aimait l’Algérie » et réciproquement: une cinquantaine d’amis d’enfance de Roger Hanin ont applaudi lorsque le cercueil de l’acteur français est arrivé au cimetière d’Alger pour y reposer à toujours.
Septuagénaires ou octogénaires, ces Algérois se sont rassemblés vendredi matin devant le cimetière israélite Saint-Eugène, entouré d’immeubles de style européen, en contrebas de l’imposante cathédrale Notre Dame .
Mais comme l’enterrement s’est déroulé dans l’intimité, ils ont dû suivre la cérémonie à distance après avoir applaudi avec émotion l’entrée du cercueil, arrivé peu avant en avion de Paris.
« Je suis au bord des larmes parce qu’on ne m’a pas laissé assister à l’enterrement de mon ami », s’émeut Mahieddine Bentir.
Cet ancien artiste décorateur ne tarit pas d’éloges sur Roger Hanin, décédé mercredi à 89 ans, qui « a aimé l’Algérie » et « est revenu à sa terre ».
« Il venait souvent se recueillir au cimetière sur la tombe de son père », désormais située à quelques mètres de la sienne, se souvient-il.
Sa décision de reposer dans la ville où il est né en 1925 « est un choix politique, en harmonie avec ses convictions car il a toujours milité pour les meilleures relations entre la France et l’Algérie », témoigne Mahieddine Bentir.
Selon lui, l’acteur avait « épousé la cause algérienne » pendant la guerre d’indépendance, dont les plaies restent à vif plus de cinquante ans après.
Amer Booughrab, qui partage sa vie entre l’Algérie et la Savoie, crie sa rage contre les ultras de l’Algérie française.
« Je voudrais dire à tout le monde que Roger Hanin n’a pas été chassé du pays par les Algériens. C’est l’OAS (Organisation de l’Armée secrète) qui a chassé les pieds-noirs dans le but de vider l’Algérie de ses cadres et de la voir s’écrouler après l’indépendance », fulmine-t-il.
Comme lui, El Hadj Boualem a sympathisé avec l’acteur lorsque, adolescents, ils habitaient et jouaient rue Marengo, dans la basse Casbah d’Alger.
Egalement présent devant le cimetière, un quadragénaire né après l’indépendance se félicite surtout de voir autant de kippas en ce vendredi jour de prière musulmane à Alger.
« Je n’en ai jamais vu autant. C’est formidable », applaudit-il. Avec son cimetière israélite et chrétien, sa cathédrale et son ancienne synagogue, le quartier Saint-Eugène, devenu Bologhine, pourrait devenir le symbole d’une cohabitation religieuse unique en Algérie.
« C’est un projet du gouvernement », précise un représentant de la petite communauté juive à Alger, dont au moins deux membres ont été assassinés par les islamistes dans les années 1990.
Le nouveau ministre des Affaires religieuses Mohamed Aïssa a récemment confié son voeu de rouvrir les synagogues fermées en raison de menaces terroristes.
Autrefois l’une des plus nombreuses d’Afrique du nord, la communauté juive d’Algérie ne compte plus qu’environ 300 membres, qui pratiquent leur foi dans la plus grande discrétion.
Abdelhafid Daamache
Poster un Commentaire