L’extrême gauche marxiste-léniniste
s’est toujours vue et voulue l’avant-garde
du prolétariat en lutte.
Mais quel prolétariat, quelle lutte ? L’historien Z Sternell considère le léninisme comme une réaction à une « crise » du marxisme issue du fait que, contredisant les analyses du fondateur de l’internationale prolétarienne, le capitalisme ne s’effondra pas sous le poids de ses contradictions et que le prolétariat révélait des aspirations petites bourgeoises plutôt qu’une nature révolutionnaire. Il fallait donc des « révolutionnaires professionnels » afin de former « l’avant-garde » du prolétariat qui ne manquerait pas de s’y reconnaître…
Perpétuellemnt à la recherche de l’introuvable prolétariat révolutionnaire par nature et par destin historique, l’extrême-gauche pousse sa quête dans tous les événements contemporains, quitte à recourir à des simplifications réductrices pour actualiser des schémas obsolètes et jamais vérifiés. Elle passe ainsi par exemple de l’anticapitalisme à l’anti-impérialisme sans se soucier d’analyser la nature exacte des luttes nationalistes : du soviet au vietcong, du vietcong au feddayin -figures essentiellement fantasmées- et du feddayin au djihadiste.
Aujourd’hui, le délinquant identitaire beur est devenu pour l’extrême-gauche marxiste-léniniste le feddayin de remplacement, contemporain et à portée de mains. Violence identitaire et communautaire, caillassages, contrôle des cités-ghettos, agressions de commerces « sionistes », toutes les dérives de ce nouveaux damnés de la terre sont à ses yeux la légitime expression de la colère du peuple, grosse de son idéale et fantasmatique révolution. Toute analyse est rejetée par la sublimation de la geste des peuples en lutte qu’elle se voit réanimer, toute critique de l’idéologie islamiste dénoncée comme complicité avec l’ennemi de classe.
S’il lui semble tout aussi pertinent de sommer les Juifs de France de se désolidariser de la politique d’Israël que de demander aux chrétiens des comptes sur la « Manif pour tous », le bricolage de l’opportuniste concept d’islamophobie lui permet de ne pas s’interroger sur la religion de ses nouveaux héros révolutionnaires estimables par principe.
Attendre un positionnement sur la Charte du Hamas qui inclut charia et meurtre des Juifs devient un intolérable amalgame inspiré par l’impérialo-sionisme pour discréditer et stigmatiser les très nobles aspirations de ses nouveaux héros.
J-Victor
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