Bon nombre des ministres et secrétaires d’État du gouvernement de Vichy sont venus de la Gauche – anciens communistes, anciens SFIO, des syndicalistes comme René Belin au ministère du Travail, de nombreux technocrates. Le nombre des ministres antisémites dans le gouvernement de Vichy, de 1940 à 1942- ensuite la situation change radicalement, est assez limité. Une étude de ce sujet se trouve dans le livre de l’historienne Limore Yagil, L’homme nouveau et la révolution nationale de Vichy , Presses universitaires de Lille 1997.
LES LIENS DE LA GAUCHE
ET DE LA COLLABORATION
Plusieurs études ont ensuite démontré les liens de la gauche française et la collaboration. Le livre de Epstein, ne fait que reprendre une thèse déjà connue des historiens spécialistes, peut être pas du public, ce qui explique le silence concernant son ouvrage.
En réalité, se focaliser sur l’appartenance idéologique et politique des uns et des autres pour comprendre comment plus de 220 000 juifs – enfants et adultes ont survécu en France grâce à l’aide de nombreux français, est un faux débat.
Tous les résistants n’ont pas pris des risques pour secourir des Juifs, et tous les pétainistes n’ont pas dénoncé des Juifs et n’ont pas appliqué les lois de Vichy et les ordonnances allemandes pour arrêter et déporter les Juifs. En période de guerre et d’occupation, les attitudes sont plus compliquées.
On ne peut pas classer uniquement les gens comme » collabos » ou résistants », il existent de nombreuses zones d’ombres, que l’historien doit étudier, pour mieux comprendre comment en France on a sauvé 75% des Juifs et nettement moins de Juifs dans les autres pays de l’Europe occidentale – Hollande, Belgique, Italie etc.
Ainsi des catholiques « réactionnaires » ont pris des risques pour secourir des Juifs et ceci dès 1940. Cela ne signifie pas que tous les catholiques sont devenus philosémites, mais certains ont décidé de cacher, de faire passer la ligne de démarcation ou la frontière, des juifs qui autrement auraient été arrêtés. ces activités, ne sont pas décidés par la hiérarchie catholique, même si elles sont approuvées par certains évêques ( plus de 45 sur 80). Mais ce qui est important c’est l’attitude de l’individu, ses liens avec d’autres. Pour comprendre les motifs de cette attitude, qui n’est pas synonyme de résistance civile, il faut utiliser le terme de désobéissance civile, définit dans les 3 tomes de mon ouvrage: La France terre de refuge et de désobéissance civile 1933-1945: l’étude du sauvetage des Juifs (Cerf 2010 et 2011, 1300 pages).
Les classifications « gauche et droite » n’ont aucun sens pour comprendre le phénomène du sauvetage, mais ce sont les attitudes individuelles qui étaient durant cette période exceptionnelles qui méritent de surcroît toute notre attention, non pas pour comprendre la situation des Juifs aujourd’hui, mais pour mieux comprendre le passé. Ensuite, chacun pourra en tirer les conclusions qui lui semble convenables. Mais il ne faut pas mélanger l’histoire et le présent. C’est le rôle des sciences politiques et non des historiens.
Limore Yagil, historienne
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