« Chaque mot a le sens qu’il porte et revenir au sens de chaque mot est fondamental ». Au-delà de la juste sémantique, ce qui anime Antoine Sfeir dans chacune de ses interventions et de ses ouvrages dont le Moyen-Orient est le grand théâtre, c’est la rigueur, la précision, les vérités du travail qu’il mène depuis si longtemps aux Cahiers de l’Orient, formidable revue qu’il dirige mais aussi à l’Institut Libre des Études et des relations internationales (ILERI) qu’il préside. Il était ce mardi 5 Novembre l’invité des Amis du CRIF à une soirée-débat animée par le journaliste Paul Nahon où étaient assis côte à côte l’Imam Chalgoumi et le grand Rabin Sirat.
Au programme, « les printemps arabes et les hivers islamistes », du Maghreb à la Syrie et l’Irak en passant par la Libye et l’Égypte, un panorama brillamment troussé d’une actualité complexe voire difficilement compréhensible pour un esprit occidental sauf à commettre des contresens et bien insuffisamment éclairée par nos media nationaux.
Ponctuant son exposé d’anecdotes historiques ou personnelles, Antoine Sfeir sait aller à l’essentiel, relier les faits entre eux et éclairer notre compréhension d’un Moyen-Orient à feu et à sang : le rôle des États-Unis dans l‘anéantissement de l’Irak, celui de la France et de Bernard Henri-Lévy en Libye, l’Iran chiite qui se pose en adversaire de cette barbarie sunnite, le rôle plus que trouble de « notre ami » le Qatar et des Saoudiens, le grand retour en force de l’Égypte sur la scène arabe, l’incroyable rapprochement entre Israël et l’Iran qui soutient pourtant toujours le Hezbollah libanais… Antoine Sfeir ne mâche pas ses mots et n’épargne rien ni personne dans son questionnement. Arabophone, il cite une des premières phrases du Coran, « Il n’y a pas de contraintes en religion » pour rappeler tout de go que la soumission par l’Islam n’existe pas dans le Coran. Musulmans, salafistes, islamistes, djihadistes, califat, il précise, explique toute la complexité de ce Moyen Orient millénaire et toujours multiple : « Au Moyen-Orient, là où tu vas, tout le monde est minoritaire ».
Alors pour tout ceux qui n’ont pu assister à cette conférence, nous ne pouvons que vous conseiller chaudement la lecture du dernier livre d’Antoine Sfeir, « Islam contre Islam » (Grasset) qui vient de paraître au Livre de Poche ainsi que « Vers l’Orient compliqué », un peu plus ancien (2008), également au Livre de Poche. Sans oublier la revue Les Cahiers de l’Orient dont le dernier numéro s’intitule et ce n’est pas un hasard, « Syrie : un chaos pour durer ».
Brigitte Thévenot
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