Info ou intox ? Voici que Carla ne veut pas que Nicolas revienne. C’est dans « Le Parisien » de ce début de semaine.
L’épouse de l’ancien président qui entend le redevenir lui aurait fait une « scène de ménage » à Bali (oui, chez les Sarkozy, on se fait des scènes à Bali, sous un soleil paradisiaque, à deux pas d’une plage de sable fin, pas dans un trois pièces cuisine d’un HLM de Gentilly). Confrontée à la terrible réalité du retour, Carla aurait fait savoir combien elle désapprouvait l’idée. Un « fidèle » a confirmé l’existence de la divergence au sein du couple : « Carla lui a fait une crise à Bali, elle ne veut pas qu’il y retourne ! »
Ce que confirme un « ami » : « Ça lui sort par les yeux, la méchanceté, la haine. Elle a été blessée, elle est encore folle de rage. Elle se dit qu’ils pourraient vivre tranquille. »
Quant au retour lui-même, dans un tel contexte, un « partisan » avoue : « C’est l’impro totale ».
Installer l’idée qu’il revient « par devoir »
Qui sont ce « fidèle », cet « ami » et ce « partisan » ? Mystère. Et pourquoi ce « fidèle », cet « ami » et ce « partisan » racontent-ils à des journalistes les tourments intimes du couple Sarkozy ? Pourquoi balancer la « scène de ménage à Bali » ? Mystère. Et cette histoire, est-elle vraie ou fausse ? Mystère.
Mais qu’importe en vérité. Nicolas Sarkozy est le roi de la triangulation adaptée en permanence aux besoins de son storytelling. Vraie ou fausse, cette anecdote sera réécrite, ré-exploitée et triangulée pour les besoins du message qui sera délivré quand se déclenchera l’opération retour.
Voilà des mois, depuis le 6 mai 2012, 20h01, que Nicolas Sarkozy prépare le terrain médiatique. Chacune de ses désormais célèbres « cartes postales » porte un message identique :
« Si je reviens, c’est par devoir. Si je reviens, c’est par obligation. Si je reviens, c’est parce que la situation l’exige. Si je reviens, ce n’est pas pour moi, c’est pour la France. Si je reviens, c’est contre ma volonté d’homme. Si je reviens, c’est parce que je suis obligé. Si je reviens, c’est parce que vous me l’avez demandé. »
Cet ultime salve « off » dans « Le Parisien » de ce 1er septembre participe objectivement à la construction de l’édifice médiatique de la thématique du « retour par devoir ».
Ainsi s’est déployé depuis deux ans, de photos « volées » en unes de « Paris Match », de « confidences » à « Valeurs Actuelles » en « off » pour « Le Parisien » ou « l’Opinion », le « JDD » ou « L’Express », le grand air du « devoir ». Nicolas Sarkozy va revenir par devoir. Contre lui-même. Contre sa famille. Contre Carla.
Un élément de storytelling de plus
On imagine déjà l’entretien au 20h de France 2, face à un David Pujadas tremblant d’émotion dans son nouveau décor du JT (fabriqué au Portugal, mais pourquoi donc ? Y plus de menuisiers à France télévisions ?) :
« Nicolas Sarkozy, on dit que votre épouse, Carla, n’était pas favorable à votre retour en politique, ce monde dont elle redoute la cruauté, la méchanceté, la haine… Est-ce à dire que vous êtes devant nous, ce soir, par devoir ? Au nom de l’idée que vous vous faites de la France ? Parce que vous avez entendu l’appel des Français ? »
Et la réponse qui commencera ainsi :
« M’sieur Pujadas, ma vie privée, c’est ma vie privée… Et même si je reviens, parce que les Français me l’ont demandé, ma vie privée restera ma vie privée. Mais je dois vous le dire quand même. Oui, Carla a compris que lorsque le devoir s’impose à l’homme d’État, il ne peut s’y dérober. M’sieur Pujadas, on a pas de droit vis-à-vis de la France, on a que des devoirs, et c’est la grandeur de ma femme de l’avoir compris. Ce sacrifice que nous consentons à la France, nous le faisons par devoir, parce que l’on n’avait pas le choix ».
D’une façon ou d’une autre, vraie ou fausse, manipulée ou authentique, cette « scène de ménage » à Bali entre Carla et Nicolas deviendra, quand le temps sera venu, un élément de storytelling dans la mise en scène du « retour » de l’ancien président.
Une anecdote qui n’a rien d’improvisé
Car à bien lire « Le Parisien », il est évident que la part « d’impro » est en réalité réduite au strict minimum. Il est bien dit que le Monte Cristo 2.0 veut changer le nom de l’UMP, concocter un projet pour la France, instaurer des primaires élargies au centre (tiens donc, pour tuer dans l’œuf l’alliance Juppé/Bayrou qui se nouerait hors UMP ?) et faire monter des jeunes.
Le problème de Nicolas Sarkozy, et cette anecdote en est la preuve, c’est qu’il est devenu ultra-prévisible. De lui, on sait tout, on voit tout, on entend tout. Et quand l’un de ses « confidents » souffle au « Parisien » que ce retour ne peut se faire par un post de blog ou un tweet, qu’il « faut voir les choses en grand », on pressent que la politique spectacle des années bling bling sera de retour de Bali avec Nicolas Sarkozy.
Et l’on pense, encore et encore, au sujet de Nicolas Sarkozy, au célèbre mot de Talleyrand, constatant sous la Restauration que les nobles émigrés pour cause de Révolution étaient revenus en France, avec Louis XVIII, sans avoir tiré une leçon de leur défaite de 1789 : « Rien appris, rien oublié ».
Par Bruno Roger-Petit
Chroniqueur politique
http://leplus.nouvelobs.com/contribution/1236479-carla-bruni-opposee-a-un-retour-de-sarkozy-une-anecdote-qui-sert-son-storytelling.html
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