Semaine du 14 au 18 octobre 2013
La presse israélienne a rapporté, cette semaine, le déroulé de la session des négociations entre le E3+3 et l’Iran, à Genève, les journaux y consacrant leur « une » ainsi qu’un grand nombre d’articles factuels et de commentaires.
Les responsables israéliens se sont, pour la plupart, gardés de commenter la teneur des négociations ou les déclarations de l’une ou l’autre des parties. Mardi matin, avant le début de la session à Genève, le cabinet de sécurité israélien a toutefois publié une déclaration du cabinet de sécurité dans laquelle il est indiqué qu’Israël ne s’opposait pas à une solution diplomatique ou à des capacités nucléaires civiles iraniennes, mais qu’il ne fallait pas alléger les sanctions avant d’avoir la certitude que le programme nucléaire militaire iranien soit totalement démantelé.
Lors d’une réunion de la commission parlementaire des Affaires étrangères et de la Défense, le ministre des Affaires stratégiques, Yuval Steinitz, a déclaré qu’Israël suivait la rencontre à Genève « avec espoir et inquiétude. De l’espoir, parce que nous n’avons pas encore fermé la porte à la solution diplomatique (…) De l’inquiétude, parce que nous craignons que Genève 2013 ne se transforme en Munich 1938. L’histoire a déjà connu un accord, encensé par le monde entier, avant de voir éclater une deuxième guerre mondiale, juste un an après. »
Ce scepticisme et cette méfiance vis-à-vis des intentions iraniennes caractérisaient également la majorité des articles factuels et des commentaires de presse. Pour les quotidiens israéliens, le fait que les négociations se soient déroulées en anglais, sous la direction charismatique du ministre iranien des Affaires étrangères Javad Zarif et de son adjoint Abbas Araqchi, n’est que la suite de l’offensive de charme iranienne, qui facilite également la tâche de l’Occident, pressé de conclure un accord.
Si certains commentateurs ont estimé que rien de concret ne sortirait de ces négociations car les Iraniens ne chercheraient qu’à gagner du temps, d’autres ont redouté que l’Occident ne soit encore plus motivé que l’Iran pour parvenir à un accord. Selon eux, l’Occident serait plus préoccupé par l’instabilité globale que par le nucléaire iranien, et désirait ardemment une normalisation des relations avec la République islamique.
COMME UN AIR DE DEJA VU
par DR EMILY LANDAU – MAARIV
L’auteure est la directrice du Programme de Sécurité Régionale et de Contrôle des Armes de l’Institut d’Etudes de Sécurité Nationale.
Les discussions à Genève se sont terminées, avec comme on pouvait s’y attendre, des déclarations optimistes sur la progression des discussions et sur la prévision d’une prochaine rencontre afin d’examiner en détail les différentes propositions évoquées. A part un ton plus détendu et une approche particulièrement positive, aucun contenu significatif n’a été révélé cette fois, que nous n’avions déjà entendu précédemment. Gary Samore, un interlocuteur-
clé dans l’administration d’Obama sur la question iranienne, considère qu’il n’y a pas eu de changement particulier dans la proposition iranienne comparée aux propositions précédentes, qui avaient été faites du temps d’Ahmadinejad.
Une question essentielle se doit d’être au cœur des négociations avec l’Iran: nous savons pertinemment que l’Iran est disposé à faire des concessions mais la problématique majeure, actuellement, est de savoir si une décision sera prise concernant l’arrêt des activités nucléaires à des fins militaires.
La meilleure façon d’appréhender ces négociations est à travers le prisme de l’art des négociations. Tant que nous n’obtenons aucune véritable indication concernant le changement de direction du programme nucléaire iranien et de la décision de l’Iran d’abandonner ses intentions de développer les capacités nucléaires à des fins militaires,
l’ensemble des propositions devraient être considérées comme des étapes tactiques de la part des iraniens dans les négociations avec la communauté internationale.
Par conséquent, on peut supposer que l’objectif principal de l’Iran dans ces négociations est tout simplement la levée des lourdes sanctions qui pèsent actuellement sur le pays. L’Iran espère obtenir, grâce à un minimum de concessions de son programme nucléaire, un assouplissement maximum des sanctions économiques et financières. L’Iran a probablement réalisé que tactiquement, il est plus efficace de montrer un visage souriant qu’un visage
menaçant.
Et que dire de la position d’Israël ? Dans le cadre de la stratégie iranienne, si Israël est perçu comme étant le seul à s’opposer avec vigueur au déroulement de ces négociations, il sera facile de balayer ses arguments et de le présenter comme l’unique pays dont les positions ne correspondent pas à celles du reste du monde.
Dans ce contexte, il convient de mentionner que les positions d’Israël, telles que présentées par Netanyahu, à New York, il y a quelques semaines, correspondent totalement aux positions des Etats-Unis, y compris concernant la question de l’enrichissement de l’uranium sur le territoire iranien.
La frustration d’Israël est compréhensible : il ne peut s’asseoir à la table des négociations avec l’Iran, mais sera celui qui subira certainement le plus de conséquences négatives si jamais un mauvais accord avec l’Iran était conclu. Cela dit, il vaut mieux qu’Israël ne se démarque pas trop des positions de la communauté internationale car il serait encore plus facile pour l’Iran de le pointer du doigt comme un pays aux positions isolées. Israël ferait
mieux de relayer ses arguments aux pays faisant partie des négociations par des moyens plus discrets.
Poster un Commentaire