Iran: Ils ont peur de la voix de ces femmes, car ils savent qu’une voix née d’un siècle d’oppression a fait écho dans les rues

Sepideh Gholian, militante des droits humains et journaliste iranienne, est actuellement emprisonnée dans la tristement célèbre prison d’Evin, à Téhéran. Arrêtée pour la première fois en 2018 pour son engagement en faveur des droits des ouvriers, elle a été condamnée à plusieurs reprises à de lourdes peines de prison. Malgré des conditions de détention brutales, elle est devenue l’une des voix les plus audacieuses et influentes de la résistance contre la répression en Iran.

Dans cette lettre, elle s’exprime non seulement en tant que militante, mais aussi comme co-détenue de Pakhshan Azizi, militante kurde condamnée à mort. La peine capitale prononcée contre Pakhshan a récemment été confirmée par la justice iranienne. Malgré une demande de réexamen judiciaire, son dossier a été transmis au bureau d’exécution des peines, plaçant ainsi sa vie en danger imminent. Aujourd’hui, Pakhshan incarne la lutte des femmes kurdes pour la liberté et la dignité, tout en étant victime d’une répression impitoyable qui s’abat sur les femmes et les minorités ethniques en Iran.

Voici le texte complet de la lettre de Sepideh Gholian, traduit en français :

« Jin, Jiyan, Azadî » n’est pas un slogan, mais une plaie ouverte ; une blessure imprimée sur le corps de cette terre, qui, pourtant, a vu renaître la vie chaque fois depuis ses tréfonds. Ces trois mots, nés du Kurdistan, se sont propagés dans les rues, ont pris place dans les bouches, se sont enracinés dans les cœurs, non comme de simples paroles, mais comme un battement vital. Ce slogan est une carte pour survivre dans une terre où la mort est devenue une loi.

Les adeptes de la mort veulent enrouler leurs cordes de pendaison autour de ces trois mots, non pas seulement pour tuer deux femmes, mais pour déraciner la liberté elle-même. Werîsha Moradî et Pakhshan Azizi, deux femmes kurdes, sont aujourd’hui des combattantes visibles. Leurs noms résonnent sur nos lèvres, mais l’ombre de la pendaison plane sur nous toutes et tous.

Les ordonnateurs et exécuteurs de la mort ont déclaré la guerre au soleil et à la lumière. Ils veulent courber les montagnes, arrêter le cours des rivières. Mais ils ignorent que les racines du chêne demeurent toujours vivantes sous la terre, puisant leur force dans les sols imbibés du sang de cette terre. Ils craignent la voix de ces femmes, car ils savent qu’une voix surgie d’un siècle d’injustice a fait écho dans les rues. Ils savent que « Jin, Jiyan, Azadî » n’est pas un slogan ; c’est une chaîne qui relie les mains aux mains, les voix aux voix.

Les semeurs de mort tentent de cacher leur visage hideux derrière des masques factices. Ils donnent des directives, ils sèment la peur, espérant briser cette chaîne de voix. Mais nous savons qu’il ne suffit pas de s’éloigner de la ligne du pouvoir. Nous devons transformer notre voix en cri. Nous devons faire entendre, à tous et toutes, que nous refusons la mort.

Werîsha et Pakhshan doivent vivre. Elles sont les artères de cette chaîne. Cette lutte pour la vie, des montagnes du Kurdistan aux plaines du Baloutchistan, des rues de l’Azerbaïdjan aux villages du Khuzistan, a relié nos mains les unes aux autres. »

Sepideh Gholian
11 janvier 2025
Prison d’Evin

Traduction : Hengameh Hoveyda

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