“Pauvre Liban”. Par Raphaël Jerusalmy

Dommage de laisser tomber ainsi le seul pays du Proche-Orient, à part Israël, qui soit aussi proche de la mentalité et de la culture occidentales

Des avions à l’aéroport international Rafik Hariri de Beyrouth, au Liban, le 19 mars 2020
AP Photo/Hassan Ammar

L’offensive que mène actuellement Tsahal contre le Hezbollah offre au Liban une occasion inespérée de reprendre son destin en mains. La nation libanaise ne peut néanmoins saisir cette occasion sans l’aide de la communauté internationale, avec les Etats-Unis et la France en tête. Washington apporte un soutien inestimable à l’armée libanaise à raison de 500 millions de dollars par an. Le délégué américain Amos Hochstein ne cesse de tenter d’établir des conditions énergétiques et économiques meilleures pour le Liban qui connaît une crise économique d’une gravité catastrophique.

La France, quant à elle, aspire à jouer un rôle diplomatique, faute de venir en aide économiquement et militairement à ce pays ami à qui elle doit une implication bien plus concrète et affirmée de par les relations historiques et affinités culturelles entre les deux pays. En gros, toutefois, on peut dire que la communauté internationale est loin de faire le nécessaire pour sauver le Liban. Dommage de laisser tomber ainsi le seul pays du Proche-Orient, à part Israël, qui soit aussi proche de la mentalité et de la culture occidentales.

Face à la pusillanimité de la communauté internationale et la regrettable apathie du gouvernement français actuel, le Liban se voit abandonné à son triste sort. Si ce n’est que, soudain, les Israéliens lui offrent une dernière chance en débarrassant le pays du Cèdre du boulet auquel il est enchaîné depuis de nombreuses années : le Hezbollah qui, non content d’une mainmise maffieuse sur une partie de l’économie et d’une ingérence fanatique islamiste dans la vie politique d’un état libéral et démocratique, fait régner la terreur parmi la population.

Pour que le Liban puisse sortir de la crise, il lui faut ne plus être infesté par le Hezbollah et normaliser ses relations avec Israël.
Malheureusement, Beyrouth est paralysée par la corruption endémique d’oligarques qui se partagent le gâteau à la façon de familles de la pègre se délimitant des territoires et des champs d’activités. Les Hariri, les Gemayel, les Geagea, les Aoun, les Jumblatt, les Mikati, les Sleiman sont des clans puissants qui s’enrichissent, même aujourd’hui, alors que la population chute dans la misère. C’est pourtant avec eux qu’il faut traiter en l’absence de partenaires plus fiables, en utilisant justement l’appât du gain.

De fait, il y a bientôt un an, le 27 octobre dernier, Beyrouth a signé un accord historique avec Jérusalem. Au bout de décennies de vaines négociations, une frontière maritime a été agréée, permettant aux Libanais d’exploiter des puits de gaz naturel en Méditerranée. À noter que le Liban n’a de frontières reconnues ni avec Chypre, ni avec la Syrie, ses autres voisins. Et pas encore de frontière terrestre avec Israël. Quoiqu’il en soit, cet accord obtenu grâce à l’intercession américaine, a permis au Liban de lancer des appels d’offre auxquels des investisseurs lourds tels que Total Énergies, ENI et Qatar Energy ont répondu. Autrement dit, tout accord du Liban avec Israël offre un indice de stabilité qui encourage les acteurs financiers.

Maronites, sunnites, alaouites, druzes, bédouins et même une partie éclairée de la population shiite en ont assez du pouvoir disproportionné qu’exerce le Hezbollah
Pour que le Liban puisse sortir de la crise, il lui faut ne plus être infesté par le Hezbollah et normaliser ses relations avec Israël. Seulement alors, viendront les capitaux et placements. Inclus ceux de la puissante et aisée diaspora libanaise qui, comme la diaspora juive à l’égard d’Israël, joue un rôle crucial de soutien, de solidarité, de lobbying, d’assistance.

Maronites, sunnites, alaouites, druzes, bédouins et même une partie éclairée de la population shiite en ont assez du pouvoir disproportionné qu’exerce le Hezbollah. Sans compter le danger auquel il les expose comme l’a montré l’explosion meurtrière des entrepôts illégaux de nitrate d’ammonium dans le port de Beyrouth, en août 2020. Des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent contre la guerre et en faveur d’un apaisement avec le voisin israélien. Elles sont encore timides alors que la main d’Israël est tendue.

Pas plus tard qu’hier, jour de Kippour, des membres des partis d’opposition se sont réunis sous l’égide du parti des Forces Libanaises alors que le président du parlement iranien, Mohammad Ghalibaf, effectuait une visite officielle à Beyrouth. Ces partis ont appelé à un cessez-le-feu négocié avec Israël, au désarmement du Hezbollah et de toutes les faction et milices, à l’application de la résolution 1701 de l’Onu et à l’élection d’un nouveau président qui aura pour mission « de se réapproprier l’état après la chute causée par la dominance des armes et des forces étrangères sur les décisions relatives à la guerre, ainsi que de bannir l’usage des Libanais comme boucliers humains», comme l’a clamé hier après-midi le leader chrétien Samir Geagea.

Les Libanais sont-ils prêts à saisir l’occasion géopolitique qui se présente à eux d’échapper enfin aux griffes de l’Iran ? Et si oui, qui les y aidera ?
À eux seuls, les Israéliens peuvent relever l’économie libanaise. Ils peuvent, dans l’immédiat, fournir une assistance humanitaire en nourriture et médicaments, rétablir l’électricité, les télécommunications, et même refaire démarrer le tourisme avec un afflux assuré de visiteurs israéliens vers Beyrouth, les stations de sport d’hiver, les vignobles de la Bekaa. Utopie, direz-vous ? Sans doute. Mais quelle alternative y a-t-il ?

Les Libanais sont-ils prêts à saisir l’occasion géopolitique qui se présente à eux d’échapper enfin aux griffes de l’Iran ? Et si oui, qui les y aidera ? Le président Macron ? MBS ? Donald Trump ? Une nation est au bord de l’abime. Comment la sauver si n’est par sa libération du joug de ceux qui l’oppriment et par l’offre de conditions propices à la paix et la croissance ? L’indolence de la communauté internationale face au désastre humanitaire qui frappe le pays du Cèdre ne laisse aucun doute quant à la dimension salvatrice de l’opération de Tsahal. C’est ici la bataille de la dernière chance. Sans Israël, le Liban est perdu.

© Raphaël Jerusalmy

Raphaël Jerusalmy ■ Ancien officier du renseignement militaire israélien, Auteur d'”Evacuation” chez Acte Sud

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