Rafles ou raids de l’armée israélienne, occupation israélienne, résistance palestinienne, terroristes palestiniens requalifiés de combattants. En empruntant, depuis des dizaines d’années, la terminologie de la Seconde Guerre mondiale, pour parler du confit israélo-palestinien, les médias français ont largement contribué au développement et à la diffusion du narratif selon lequel Israël est un État nazi, génocidaire. Les mots ne sont pas innocents. Jamais. Tout le monde le sait. Surtout ceux dont c’est le métier. En contextualisant les actes terroristes, expliquant qu’ils seraient commis en réaction à l’injustice, à l’oppression, ils les ont légitimés. Peut-être qu’en accusant Israël des pires crimes, ils espèrent se décharger de leur culpabilité d’héritiers du colonialisme et de la collaboration. Ce qui est indéniable, c’est que, par leurs colonnes, ils ont nourri les slogans scandés, hurlés, aujourd’hui dans les manifestations antisémites à Paris, Lyon, Marseille, Toulouse… ou tagués sur les murs des villes : Israéliens nazis, Israël État d’Apartheid.
Dans la même veine, ils ont en 2017 célébré Ahed Tamimi, âgée de 16 ans à l’époque, qui, devant les caméras, avait « osé » gifler deux soldats israéliens. Il m’est difficile de comprendre comment, après cette histoire, a survécu le mythe du nazi israélien. Cela dit, tout semble possible quand on sait que le mythe du peuple déicide a encore la vie dure. Parce que, sérieusement, peut-on même imaginer une Juive, dans la France occupée, giflant un soldat allemand et ne pas être exécutée ?
Passons.
Et donc, en deux gifles médiatisées, la jeune Ahed Tamimi était, du jour au lendemain, devenue l’égérie de la « résistance palestinienne ». C’est qu’avec ses longs cheveux et son visage poupin qui prenait bien la lumière, elle portait avec grâce cette cause gagnée d’avance dans le cœur des antisionistes.
Ce matin, Ahed et ses boucles blondes sont réapparues dans la presse de France et de Navarre. Ouest-France, Hufftington Post, Libération, Le Point, et les autres ont tous, en des termes identiques, sans doute directement copiés de la dépêche de l’AFP, évoqué l’arrestation de la « militante palestinienne » lors d’un raid « en Cisjordanie occupée » pour incitation au terrorisme. Le Point, pour ne citer que lui, en a profité pour rappeler les « raids incessants de l’armée israélienne » depuis le début de la guerre, ajoutant qu’ils étaient venus chercher Ahed « dans son village » – bien, le village, ça fait Jeanne d’Arc – occupé depuis 1967.
La plupart des titres évoquent rapidement la raison de l’arrestation, encore dans des termes identiques et au conditionnel – comme toujours lorsqu’il s’agit d’affirmations d’Israël. En cause, un post sur Instagram où la jeune femme « promet de “massacrer” les Israéliens dans toutes les villes de Cisjordanies… » Libération, on n’en attend pas moins de lui, ni plus d’ailleurs, ne prend même pas la peine de citer cette histoire anecdotique de massacre. Pour lui, « l’étau se resserre autour des activistes palestiniens », et c’est pourquoi, il consacre le reste de son article sur les persécutions subies par Ahmed Tamimi et sa famille de résistants.
Aussi, comme j’ai l’impression que les journalistes français peinent à faire des recherches approfondies sur les sujets dont ils prétendent pourtant informer leur public, je me permets de les aider en livrant l’intégralité du message que cette militante a publié sur Instagram. Message à l’origine de son arrestation. Et après, à chacun la liberté de juger par lui-même.
« Notre message à la meute de colons : nous vous attendons dans toutes les villes de la Cisjordanie, de Hébron à Jénine. Nous vous égorgerons et vous direz que ce que Hitler vous a fait était une plaisanterie. Nous boirons votre sang et mangerons vos crânes. Allez, on vous attend ».
© Judith Bat-Or
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