Mickaëlle Paty : «  »Samuel, de toute évidence, n’a pas été protégé »

« Samuel, de toute évidence, n’a pas été protégé. »
© Jean Catuffe / DPPI via AFP

Le 16 octobre, pour les trois ans de la mort de Samuel Paty, sa sœur Mickaëlle va prendre la parole, et dévoiler sa vérité au grand jour. D’abord lors d’un évènement exceptionnel dont « Marianne » est partenaire (« Honorer Samuel Paty, aider l’école »), puis le lendemain (17 octobre) lors de son audition devant les sénateurs. Elle nous explique ce qu’elle prépare.

« Honorer Samuel Paty, aider l’école » : le 16 octobre prochain, à l’occasion des trois ans de la mort du professeur d’histoire-géographie, se tiendra un évènement exceptionnel dont Marianne est partenaire. En la présence de sa sœur, Mickaëlle Paty, restée jusqu’ici très discrète, intellectuels, auteurs et professeurs seront réunis pour affronter, nommer et tenter de résoudre les problèmes que doit – a fortiori depuis les trois années écoulés – affronter l’école française. Pour faire vivre le combat de Samuel Paty, et redonner du sens à la laïcité et à la liberté d’expression. « Pour « être Samuel Paty », il faut d’abord savoir quel professeur il était et c’est ce que je vous invite à découvrir lors de cette soirée hommage », nous explique Mickaëlle Paty. Seront présents, entre autres : Mickaëlle Paty, Natacha Polony, Jean-Pierre Obin, Jean-Pierre Sakoun, Fatiha Boudjahlat, Sonia Mabrouk, Stéphane Simon… L’évènement aura lieu au Théâtre de l’Œuvre, à Paris, à partir de 19 h 30, le 16 octobre.

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Mickaëlle Paty, engagée depuis 2020 pour comprendre ce qui n’a pas fonctionné dans la protection de son frère et permis sa mort, nous parle, non seulement de cet évènement, mais d’un autre moment fort, qui aura lieu le lendemain, le 17 octobre : son audition dans le cadre de la commission d’enquête sénatoriale pour établir les « failles » qui ont conduit à l’assassinat de son frère. En conséquence de sa demande formulée dans une lettre (que nous avons publiée) aux sénateurs, elle prononcera un discours d’une trentaine de minutes. Elle nous explique le sens de sa démarche, sans nous dévoiler le contenu du discours qu’elle prononcera, et qui énoncera, pour de bon, sa vérité.

Marianne : Alors qu’approchent les trois ans de la mort de votre frère, Samuel, ce 16 octobre, une séquence importante s’ouvre pour vous. Vous allez participer, le 17 octobre, à la commission d’enquête sénatoriale pour établir les « failles » qui ont permis son assassinat. Dans une lettre vous avez annoncé vouloir « demander des comptes aux personnes responsables de la mauvaise gestion, du traitement erroné de la menace » pesant sur lui et questionné le « défaut de prévoyance qui en a découlé ». Qu’entendez-vous dire aux sénateurs ?

Mickaëlle Paty : Lorsque j’ai effectivement établi cette requête pour obtenir que s’ouvre une commission d’enquête parlementaire, je ne savais pas, à ce moment, que je serais conviée à une audition et que Messieurs les Présidents François-Noël Buffet et Laurent Lafon m’offriraient 2 h 30 de leur temps. Comme il est rare qu’on accorde une telle opportunité, j’ai mis un point d’honneur à préparer un discours qui, je l’espère, apportera les éléments nécessaires pour contribuer à l’élaboration de mesures correctives. Cela fait bientôt trois ans que je me prépare, non pas à un procès, ni même à cette commission d’enquête, mais bel et bien à apporter les connaissances nécessaires. À permettre à mon auditoire de prendre la hauteur suffisante pour comprendre la mécanique globale qui a permis à ce que mon frère se retrouve seul peu après 17 heures, un 16 octobre. Non pas face, mais dos à son assaillant.

« La descente aux enfers de Samuel aura duré 11 jours, et nul ne pouvait l’ignorer », avez-vous écrit dans une lettre aux sénateurs, pointant « l’inaction des hommes dits de bien ». Samuel n’a, selon vous, pas été assez protégé par les services de police et ses collègues ?

Samuel, de toute évidence, n’a pas été protégé.Cela n’est absolument pas de la responsabilité de ses collègues, bien qu’il lui ait été conseillé, lors de son dépôt de plainte, de ne pas se déplacer seul et de solliciter d’autres professeurs pour l’escorter. Ce qui leur incombait, en revanche, était de faire preuve de corporatisme, pour ne pas être des spectateurs complices. Quant aux services de l’Education nationale et du ministère de l’Intérieur, j’attends qu’ils apportent des preuves de la protection qu’ils auraient apportée à mon frère, et à défaut, de comprendre pourquoi il n’a pas été protégé.

Le 16 octobre, vous allez participer à la journée « Honorer Samuel Paty, aider l’école ! », que notre journal coorganise, aux côtés d’écrivains et de professeurs. Pourquoi y participer ?

« Honorer Samuel Paty, aider l’école ! » est un projet de longue date, nourri d’une volonté de rétablir certains faits, de faire taire les indignés de toutes sortes qui n’ont eu de cesse de travestir la vérité pour exciter ceux qui, avides de vengeance, cherchent un alibi pour ne pas agir. Il me paraît nécessaire également de rappeler ce que contenait vraiment le cours de mon frère, pour dissiper les malentendus et les contresens des partisans du « Oui, mais », qui défendent mon frère en renonçant à une partie de sa démarche. Il convient de rappeler qu’un juge d’instruction a été désigné pour poursuivre les investigations qui sont en cours depuis un an via une enquête préliminaire visant plusieurs agents du ministère de l’Intérieur et du ministère de l’Éducation nationale pour « non-assistance à personne en péril » et « non empêchement de crime ». Le sens profond de mon discours consistera ainsi à expliquer que nous ne sommes pas dans l’ « après Samuel Paty » mais dans le « pendant ». Et que certains ne feront pas l’économie d’un examen de conscience.

Cette soirée s’organisera également autour d’un débat entre intellectuels et professeurs afin de faire émerger les problèmes que rencontre l’école depuis longtemps mais, également, je l’espère, d’apporter quelques solutions. Pour ne plus avoir à entendre la phrase « Qu’est-ce qu’on peut faire ? », qui me pousse encore aujourd’hui à agir, mais de dire à plusieurs « On peut faire ça ! ».

© Etienne Campion

  • Par Etienne Campion
  • https://www.marianne.net/agora/entretiens-et-debats/mickaelle-paty-voila-trois-ans-que-je-me-prepare-a-faire-eclater-la-verite-sur-la-mort-de-mon-frere

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2 Comments

  1. Parmi les invités, il y a Marylin Maeso, mi-figue mi-raisin sur l’interdiction du port de l’abaya à l’école et qui a commis un livre avec une philosophe pro-islamiste, je me dis qu’on n’est pas sorti d’affaire.

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