Le jour où l’on fête les FêtNat en France, on fait sa fête à un dirigeant en Israël.
Dans une cour de récré ce serait drôle et les instituteurs infligeraient aux protagonistes un sermon sur le respect de la loi et l’égalité de tous devant icelle. Quand il s’agit de destituer un dirigeant élu par une large majorité à la tête d’un État, c’est grave.
Depuis trois mois, les médias, notamment français et américains, se font l’écho des protestations d’une minorité pour qui tous les moyens sont bons afin de gagner dans la rue une deuxième manche, la première ayant été perdue dans les urnes.
Non, nous ne parlons pas de Mélenchon mais des protestataires israéliens contre le premier ministre Netanyahou.
« Netanyahou est prêt à risquer une guerre civile pour rester au pouvoir », expliquait ainsi le « New York Times », sous la plume de Thomas Friedman, un éditorialiste proche de Joe Biden.
Rappel des faits pour ceux qui se réveillent d’un coma de plus de 27 semaines
Netanyahou, qui avait résisté à Obama lorsque celui-ci avait signé un accord léonin unilatéral au bénéfice des mollahs iraniens, ne s’était pas fait un copain en étant applaudi au Congrès.
Le clone mouillé d’Obama, qui est aux manettes depuis janvier 2021, éprouve pour le Premier ministre israélien une aversion amplifiée par la voix de son maître.
Quand l’occasion lui a été donnée d’affaiblir son ennemi en finançant ses ennemis, qui devenaient de facto ses amis, Biden ne s’est pas privé. C’est ainsi que les opposants à la modification juridique israélienne ont pu bénéficier de moyens que n’ont jamais les manifestants étasunien : bus à air conditionné pour se rendre sur les lieux des manifs, déguisements de servantes écarlates pour les femmes, T-shirts au logo de leur révolution pour les hommes, les bi et les hésitants, et tracts et gigantesques pancartes publicitaires imprimés à grands frais pour les badauds et l’opinion publique.
La polémique israélienne concerne les élargissements de son champ de compétence que la Cour Suprême s’est attribuée depuis 1992 et qui lui donnent la possibilité de révoquer un ministre, un traité international, une loi ou un contrat privé pour la cause extensible à l’infini de « déraisonnabilité ».
Tous les gouvernements, y compris ceux dont les dirigeants défilent aujourd’hui pour empêcher de le faire, ont essayé de résoudre cet abus de pouvoir quand ils étaient au gouvernement.
La coalition de droite de Netanyahou a été élue notamment sur ce thème et a aussitôt entrepris de faire ce pourquoi elle avait été élue.
Les juges au pouvoir ne se laissent pas emm… par de simples députés
On apprenait en effet, le 13 juillet 2023, que la Cour suprême avait jugé recevable une plainte pour destituer le Premier ministre. Là où cela prêterait à rire, si ce n’était pas à pleurer, c’est que le motif est une plainte déposée en mai par un groupe pour « conflit d’intérêt » contre le premier ministre, car des procès étaient en cours contre celui-ci.
L’argument était peut-être recevable en mai, où les opposants pouvaient faire ce qui leur plaisait, mais début juin, les juges présidant l’affaire ont convoqué les procureurs et les avocats de la défense et leur ont dit qu’il était improbable que l’accusation obtienne une condamnation dans l’affaire 4000, le plus grave des trois dossiers contre Netanyahou.
C’est alors que le chef de la police a admis que « Personne n’aurait pu deviner qu’en fin de compte, le Premier ministre déciderait de ne pas démissionner, qu’il combattrait de l’intérieur du système et affaiblirait la police ». Ce n’est pas la police qui a été affaiblie, mais les arguments des militants pour le « tout sauf Netanyahou ».
Sauf que si les accusations contre l’accusé sont tombées parce qu’elles n’avaient aucun fondement, si leurs promoteurs se sont trouvés fort dépourvus quand le procès fut venu, car le premier ministre n’a pas suivi leur scénario, ils ont quand même gagné : quand il s’est avéré que les dossiers étaient vides, la rue israélienne et l’opinion internationale avaient déjà été convaincues du contraire.
Le KO impossible, la juge veut gagner la partie aux points
Le 13 juillet 2023, la juge Ruth Ronen a décidé que la plainte demandant la destitution du Premier ministre était recevable. La Cour suprême va donc débattre d’une éventuelle infraction à l’accord de conflit d’intérêts de la part de Netanyahou.
La juge n’a pas jugé qu’être juge et partie disqualifiait a priori la Cour suprême d’une compétence sur un sujet qui la mettait directement en question et ce d’autant que, comme le précise un communiqué commun des chefs de la coalition gouvernementale, « la Knesset a voté une loi qui empêche de destituer un Premier ministre élu dans un pareil cas ».
Et puisque le procès sera perdu, l’opposition appelle l’Oncle Sam à la rescousse parce que sur place, le résultat n’est pas plus garanti que celui des urnes avant-hier ou celui de la Justice hier.
En mars, Netanyahou avait mis un arrêt au processus pour parvenir à un accord avec les partis d’opposition menés par les perdants aux élections : Yaïr Lapid et Benny Gantz. Mais fin juin, ceux-ci se sont retirés de la table des négociations.
Des nouvelles du front
Reportage sur I24News : « Une journée de manifestations avait eu lieu mardi après le vote en première lecture d’une mesure visant à annuler la possibilité pour le pouvoir judiciaire de se prononcer sur « le caractère raisonnable » des décisions du gouvernement. Pour autant, le gouvernement n’entend pas renoncer. Interrogé ce jeudi soir sur i24NEWS, le député Likoud Boaz Bismuth s’est exprimé sur la clause controversée. « Elle détermine qui a le dernier mot. En démocratie, c’est l’électeur qui a le dernier mot, alors qu’en Israël, ce sont les juges. C’est inconcevable ».
Qu’ajouter à cela, sinon qu’on se croirait en France où, chaque fois que la gauche perd une élection, elle comprend que c’est parce qu’elle n’a pas été assez d’extrême gauche. De la même façon, quand la mort d’un délinquant entraîne une insurrection, comme chaque fois qu’un délinquant musulman est tué par la police (les délinquants des autres religions ne suscitent aucune révolte), le Président de la République est le seul à se demander qui aurait pu le prévoir …
© Liliane Messika
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