Je n’aime pas la compétition. Sans doute parce que j’ai peur de perdre. Au lycée, par exemple, je n’aurais pas détesté être déléguée de classe, je me serais bien vue dressée face à l’autorité défendant « mes camarades », sauf que je n’en avais pas vraiment, des camarades, et qu’il m’en aurait fallu pour remporter l’élection. Je n’avais aucune chance. Je ne l’ai donc jamais tenté.
Je n’aime pas non plus les sports de groupe. C’est réciproque d’ailleurs. Chaque fois qu’à l’école, en colo ou en camp d’ado, des équipes devaient se former, j’étais la dernière choisie. Le choix par défaut, comme on dit. Quand je ne restais pas carrément sur la touche. Ce que je méritais, d’ailleurs. Paralysée à l’idée de manquer une passe et de me faire crier dessus, je manquais toutes les passes et me faisais crier dessus. Un boulet, quoi.
J’aime encore moins le foot. Cette aversion m’a aveuglée. J’en étais devenue injuste, affirmant, je résume, que c’est un jeu débile, joué par des triple-abrutis, voire pire. Jusqu’au jour où, excédée, une de mes filles m’a assise devant son ordinateur. « Et maintenant, tu te tais et tu regardes. » Incroyable, cette génération, pas le moindre respect… J’ai obéi. Elle m’a passé une vidéo des « plus beaux buts de Zlatan ». Je n’ai eu aucun mal à me taire. J’étais bouche bée devant l’art et l’artiste. Bluffée. J’ai avoué à ma fille avoir trouvé ça beau. Elle a savouré sa victoire. Je n’en ai pas pour autant aimé le foot. Je ne parle pas du sport en soi, mais des rituels qui l’entourent.
Quand je vois les images de stades, où des foules portant drapeaux – de leur pays ou de leur club – se lèvent et hurlent, comme un seul homme, d’autres s’imposent à mes yeux. Drapeaux, mains levées, tous ensemble. Drapeaux encore, drapeaux toujours. La passion qui les accompagne, répandant son feu dans la foule, d’homme en homme, comme dans les bois, d’une brindille à l’autre. « Les groupes n’ont pas d’âme », disait un jour en interview le sculpteur Shlomo Selinger, rescapé de la shoah. Combien il avait raison ! On l’observe régulièrement dans les débordements des fans – fanatiques – qui précèdent ou suivent les matchs.
Mon coeur a battu de joie
Ainsi, vous l’aurez compris, je ne m’intéresse pas à l’actualité sportive. Pourtant certaines informations me parviennent par inadvertance, au hasard d’un titre d’article que je croise en lisant les nouvelles. Ou parfois sur Galei Tsahal. Comme ce matin. Or curieusement, ce matin, mes oreilles se sont dressées, et mon cœur a battu de joie.
Ces derniers temps, la sélection israélienne des moins de vingt ans se fait joliment remarquer. Depuis sa création en 1977, l’équipe junior avait toujours échoué à se qualifier pour la Coupe du monde. Pas cette année. En effet, non seulement elle a pu y participer mais elle s’est classée troisième. Et la fête continue. Puisque ce soir, à Batoumi en Géorgie, elle affrontera l’Angleterre en demi-finale du Championnat d’Europe. Certains ricanent déjà, croyant me prendre à défaut : “Les groupes et les drapeaux non, sauf quand c’est Israël. Pfff !” Ils se trompent. Ce qui m’a réjouie, c’est d’entendre que cette équipe dont les joueurs portent un maillot aux couleurs, bleu et blanc, d’Israël, constituée de Juifs et d’Arabes israéliens, est soutenue dans le pays, avec la même ferveur, de Nazareth à Ashkelon, en passant par les colonies juives et les villages arabes.
Aussi, pour moi, quel que sera le résultat tout à l’heure en Géorgie, l’équipe a déjà gagné.
© Judith Bat-Or
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