Les manifestations auxquelles on assiste sont une expression de force et non de faiblesse
Le 14 mai 1948, en fin d’après-midi, David Ben Gourion et les membres du Conseil d’État provisoire ont signé la Déclaration d’Indépendance d’Israël.
Celle-ci stipulait, entre autres :
« ERETZ-ISRAEL – la Terre d’Israël – est le berceau du peuple juif. Ici, leur identité spirituelle, religieuse et politique a été façonnée…
« (…) Poussés par cet attachement historique et traditionnel, les Juifs se sont efforcés à chaque génération successive de se réinstaller dans leur ancienne patrie. Au cours des dernières décennies, ils sont revenus en masse. Pionniers, ma’pilim [immigrants venant en Israël au mépris des législations restrictives] et défenseurs, ils ont fait fleurir les déserts, ravivé la langue hébraïque, construit des villages et des villes, et créé une communauté florissante contrôlant sa propre économie et sa propre culture, aimant la paix mais sachant se défendre, apportant les bienfaits du progrès à tous les habitants du pays, et aspirant à devenir une nation indépendante…
« (…) Le 29 novembre 1947, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté une résolution appelant à la création d’un État juif en Eretz-Israël… Cette reconnaissance par les Nations Unies du droit du peuple juif à établir son État est irrévocable …
« (…) L’ETAT D’ISRAEL sera ouvert à l’immigration juive et au Rassemblement des Exilés ; il favorisera le développement du pays au profit de tous ses habitants ; il sera fondé sur la liberté, la justice et la paix comme prévu par la prophètes d’Israël ; il assurera l’égalité complète des droits sociaux et politiques à tous ses habitants sans distinction de religion, de race ou de sexe ; il garantira la liberté de religion, de conscience, de langue, d’éducation et de culture ; il sauvegardera les lieux saints de toutes les religions et il sera fidèle aux principes de la Charte des Nations Unies. »
La plupart des gens ont tendance à s’adapter aux situations données, si bien qu’on a parfois le sentiment que les choses auxquelles nous sommes habitués ont toujours existé, même si ce n’est clairement pas le cas.
Prenez par exemple le Burj Khalifa – le plus haut gratte-ciel du monde, devenu le symbole incontesté de Dubaï. Il a été inauguré il y a 13 ans. Ou bien les tours Azrieli, devenues un symbole de Tel-Aviv, inaugurées il y a moins de 25 ans. Dans les deux cas, le sentiment est que ces édifices ont toujours fait partie du paysage. Et c’est également vrai en ce qui concerne l’État d’Israël. Parfois, il est difficile de se rendre compte que le miracle appelé l’État d’Israël n’existe que depuis 75 ans.
Les historiens, contrairement à la plupart des gens, ont tendance à regarder les choses « d’en haut », avec une autre perspective, ce qui les amène à comprendre que les événements ou les crises, même les plus prolongées, ne sont qu’un point sur le continuum historique. Une période de 75 ans, dans la durée de l’histoire humaine, n’est rien de plus qu’un point.
Israël est un jeune Etat qui a fait face, avant et depuis sa création, à des défis existentiels presque impossibles à relever – depuis les guerres et les menaces stratégiques incessantes à l’absorption des immigrants et à la construction massive de logements au cours des premières décennies.
Par conséquent, des choses qui sont presque normales ou tenues pour acquises dans d’autres pays n’existent pas encore en Israël. C’est le cas notamment d’une Constitution. Ainsi, l’État d’Israël n’a pas de Constitution. Peut-être même devrait-on dire « n’a toujours pas de Constitution ». Mais peut-être aussi qu’elle n’en aura jamais.
Le 75e Jour de l’Indépendance d’Israël n’est pas un jour de l’indépendance ordinaire. Depuis quelques mois, le jeune pays fait face à une grave crise interne, qui amène chaque semaine des centaines de milliers de personnes dans la rue pour protester contre le gouvernement. Oui, il y a une lutte persistante pour les valeurs et la vision du monde. Oui, il y a un clivage entre les différents groupes de population. Oui, il y a division. Oui, il y a des disputes sans fin, partout – au Parlement, sur les lieux de travail et même lors des repas de famille.
Tous les symboles du pays ont été mobilisés pour la lutte des deux côtés – le drapeau, l’hymne, et aussi la Déclaration d’indépendance. Il y a environ 75 ans, les membres du « Conseil provisoire » ont signé un document dans lequel l’État s’engage en faveur de l’égalité et de la liberté de religion, de conscience, d’opinions sociales et politiques, de culture, d’éducation et de langue. La force de l’État d’Israël a toujours été la diversité.
Il y a ceux au Moyen-Orient et dans le monde entier qui voient les manifestations de masse en Israël comme une expression de faiblesse. Ils ont tort. Les manifestations, pour et contre la réforme, sont un exemple important de la force de la démocratie en Israël. Israël a déjà connu de telles crises internes dans le passé (le débat autour des accords d’Oslo et la division nationale sur le plan de désengagement de la bande de Gaza, pour ne prendre que deux exemples) et il en est sorti très rapidement. Certes, ces dissensions ont laissé des cicatrices, parfois nombreuses, mais c’est la nature des cicatrices de guérir. C’est un processus.
Il est indéniable que lorsqu’on tire trop sur la corde, elle finit par se casser. Mais honnêtement, je ne pense pas que nous en soyons là. Il est seulement important de se rappeler que comme le Burj Khalifa, l’État d’Israël n’a pas toujours été là, et il est important que tous les éléments de la société regardent les défis avec la bonne perspective, pour assurer l’existence d’Israël même dans les 75 prochaines années.
Au total, nous fêtons les 75 premières années de la vie d’un pays fort, intelligent et prospère, qui dans sa jeunesse continue d’acquérir des expériences – bonnes et douloureuses – et de grandir.
© Ariel Schmidberg
Ariel Schmidberg est Directeur de l’information sur i24NEWS
C’est pourtant sur i24news que ce genre de propos passe crême …
Dans l’entretien avec Pierre Assouline (https://www.i24news.tv/fr/actu/france/1682527417-israel-reforme-judiciaire-la-reaction-de-la-societe-aussi-inesperee-que-la-resistance-des-ukrainiens-face-a-la-russie-pierre-assouline?utm_medium=Social&utm_source=Twitter#Echobox=1682531403), je lis héberlué,
« Selon l’écrivain, le fait qu’Israël, démocratie du Proche-Orient, glisse vers « l’illibéralisme » à la suite d’un « coup d’état légal » doit inquiéter tout le monde et pas seulement au Proche-Orient ».
« La réaction de la société civile en Israël est aussi inespérée que l’était la résistance militaire extraordinaire des Ukrainiens face à la Russie, je n’en espérais pas tant », a-t-il confié. »
M. Pierre Assouline a le droit de dire ce qu’il veut, bien entendu, mais on se doit de dire sur i24news, que ces propos dépassent l’entendement et quel retournement des faits …
@Marcel L’inversion des rôles est systématique dans les régimes pré totalitaires comme l’UE ou les USA. Quand les minables propagandistes de ces régimes de non droit qualifient un pays extérieur d' »illibéral » cela veut presque toujours dire que le pays en question est plus libéral et démocratique que le leur. Dites vous bien que nos médias mentent et inversent le réel sur absolument tout.
Ce rappel mis à part, il me semble qu’une des causes rarement évoquées des tensions ethniques (qui ne datent pas d’hier mais n’ont rien de comparable avec celles des régimes réellement antidémocratiques comme la France) en Israël c’est l’absence d’ouverture symbolisée par cette méfiance envers les unions mixtes. Or d’où cela vient-il ? De l’influence excessive de certains religieux. Cette injustice envers des couples dits mixtes (juifs/non juifs) a pour effet supplémentaire de créer un cloisonnement entre les différentes composantes de la population et de la société Israéliennes. Ce n’est pas bon.