La bonne nouvelle (1)
Les bonnes nouvelles, moi, je les traque. Pas besoin qu’elles soient exclusives ni même sensationnelles. Juste bonnes, ça me suffit. Et dès que j’en attrape une, je la savoure et la diffuse. Parce que la joie se multiplie quand elle est partagée. Je laisse aux mathématiciens le soin de résoudre cette énigme. En général, je ne compte pas sur l’aide de la radio dans mes recherches. Et pourtant… Comme quoi on n’est jamais à l’abri d’une bonne surprise.
Branchée sur Galei Tzahal, j’écoutais le point du matin sur l’actualité – il faut bien s’informer. Premier coup de massue : la décision de Moody’s, l’agence de notation bancaire, de dégrader Ia note de crédit d’Israël, de « positive » à « stable ». Ça couvait depuis quelque temps. On en parlait. Je n’avais pas voulu y croire – vice et vertu du déni. Je ne prétendrais pas m’y connaître en finance, est-ce vraiment nécessaire pour comprendre qu’une mauvaise note n’est pas une bonne nouvelle ?
Je me tassai donc légèrement lorsque le journaliste rappela Yom Hashoah, journée du souvenir. Demain. Pas un scoop non plus. Mais la Shoah ne vieillit pas. L’inconcevable violence, la douleur et le sang, le gaz, le feu, les cheminées, les chiens furieux qui hurlent, les matraques qui claquent, les ombres décharnées, les squelettes entassés, les bébés massacrés. Et la solitude immense, définitive, de ceux qui survécurent. Leur silence. Celui que l’on entend au cœur de leurs témoignages, lorsque leur voix s’étrangle. Les mots qui manquent pour dire. Et ces vies qui s’éteignent, désormais, une à une. Comment se montrer digne d’eux ? De leur courage? Leur héritage?
Ben, et la bonne nouvelle ! me réclamez-vous, justement.
Alors voilà, j’y viens. Samedi, à 17h16, un grand boum a retenti dans le ciel d’Israël. Et ce n’était pas un missile. Pas un attentat. Pas la guerre. Rien de grave ! Juste un « bolide ». Un bolide? Je m’explique.
En traversant la couche atmosphérique, un météoroïde, corps céleste intermédiaire, entre astéroïde et poussière interplanétaire, a explosé dans le ciel à 45 kilomètres au-dessus de nos têtes, d’où le boum en question. Et devinez quoi. Rien. Ni blessés, ni morts, ni dégâts. Le samedi a continué comme si de rien n’était. Le soir les manifestants des deux camps sont sortis dans les rues du pays. Et le lendemain tout le monde est retourné au travail. Comme si de rien n’était, je vous dis.
Oh non ! Maintenant vous vous inquiétez. Forcément. J’aurais dû m’en douter. Vous pensez ok, d’accord, cette fois, tout s’est passé tranquillement, mais si ce fameux corps céleste avait été de la taille d’un terrain de football et pas juste du ballon, que serions-nous devenus ? Les plus optimistes d’entre vous se voient déjà sales, brisés, frigorifiés, derniers vivants de la planète, réfugiés au sommet d’un gratte-ciel en attendant la décrue apres la fonte simultanée de l’ensemble des glaciers. Victimes d’un mystérieux mécanisme, les humains croient plus aisément à la fin du monde qu’à la paix. À la haine qu’à l’amour.
Eh bien, ce défaitisme ne passera pas par moi. Aussi, ai-je mené mon enquête pour éclairer votre chandelle, dans l’espoir de vous rassurer. Risquons-nous d’être écrasés par un astéroïde ? De disparaître, comme nos grands frères à pattes – longs cous et autres tyrannosaure -, et notre civilisation dans un nuage de fumée ? J’ai la joie de pouvoir vous annoncer que non. En tout cas pas avant plusieurs millions d’années.
Alors, elle n’est pas bonne, ma bonne nouvelle ?
Et si vous ne me croyez pas, parce que ce serait trop beau, lisez le prochain « invisible ».
© Judith Bat-Or
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