Habitué de la Berlinale, le réalisateur israélien Guy Nattiv y a présenté lundi soir son « Golda », avec Helen Mirren dans la peau de Golda Meir, la « dame de fer » israélienne.
D’une femme de pouvoir à l’autre : après Elizabeth II, Helen Mirren, oscarisée en 2007 pour « The Queen », interprète la moins consensuelle Golda Meir.
« Golda », dont TJ a déjà parlé, est centré sur la guerre du Kippour en octobre 1973 et ces jours qui continuent de hanter la mémoire collective en Israël à la fin du mandat de Premier ministre de Golda Meir.
Nous sommes en septembre 1973 et la première ministre israélienne, Golda Meir, vient de rentrer des négociations en Autriche alors qu’elle reçoit des informations sur une guerre en cours avec l’Égypte. Craignant de porter un jugement hâtif, elle décide d’attendre d’autres preuves au lieu de donner à ses compatriotes un avis d’évacuation. Les jours qui suivent sont les plus difficiles non seulement de sa carrière, mais aussi de sa vie, car -à l’insu du public à l’époque- elle lutte également contre un cancer. Pris par surprise en pleine fête de Kippour, l’Etat hébreu vacille sous le feu croisé de l’Egypte et de la Syrie et l’armée israélienne ne parviendra à reprendre le dessus qu’après de graves revers et au prix de plus de 2 500 morts, ce qui a autorisé Guy Nattiv à parler en conférence de presse « du Vietnam d’Israël ».
Une entreprise de réhabilitation
Dans le film, « Golda n’est pas montrée comme un personnage totalement lisse, elle a fait des erreurs, mais elle a pris ses responsabilités, ce que les dirigeants politiques ne font pas aujourd’hui », a-t-il déclaré.
Celle qui fut l’un des fondateurs de la nation, signataire de la déclaration d’indépendance, démissionnera en 1974 et mourra quatre ans plus tard.
Pour Helen Mirren, Golda Meir, « dirigeante totalement dévouée sans être ivre de pouvoir ou dictatoriale », a été « injustement dénigrée en Israël ».
Une entreprise de réhabilitation
A noter: le film faisant le choix de se concentrer sur le point de vue des autorités civiles et militaires israéliennes, les combats ne sont montrés que du ciel. Né lui-même en 1973, le réalisateur israélien revendique « une entreprise de réhabilitation d’une figure politique parfois contestée, forte mais inflexible », et « qui a affiché des positions radicales sur la question palestinienne ».
Entreprise de réhabilitation, sans pour autant taire la paralysie initiale du pouvoir israélien, ni les difficultés à convaincre l’Amérique de Richard Nixon, en pleine Guerre froide, d’aider son allié.
Tout en gérant la plus grave crise qu’ait connue son pays, la PM fait soigner en secret le cancer qui la ronge, et que tous les hommes placés sous son autorité doivent ignorer, sa seule confidente étant son assistante.
Helen Mirren, 77 ans, se fond dans le rôle et interprète une dirigeante travailliste crépusculaire, seule face aux décisions les plus difficiles, fumant cigarette sur cigarette.
On taira la polémique dite « jewface »
Tourné en anglais, avec une actrice principale britannique, le film a déjà fait avant même d’être montré l’objet d’une polémique au Royaume-Uni, certains s’interrogeant sur le choix d’une actrice qui n’est pas juive pour interpréter Golda Meir: « J’ai été surpris de voir cette réaction », a raconté à ce sujet Guy Nattiv en conférence de presse, estimant qu’il était aussi absurde de décider que seuls des acteurs juifs puissent jouer des rôles de personnages juifs que d’interdire aux juifs de jouer des rôles de non-juifs: « Et si demain on fait un film sur Jésus-Christ, qui va le jouer ? Un juif ou un non juif ? », a ironisé Lior Ashkenazy, le général David Elazar dans le film. « En tout cas, pas moi ! », s’est esclaffée Helen Mirren.
Golda Meir serait « horrifiée » par la situation en Israël
Golda Meir, décédée il y a 45 ans, serait « complètement horrifiée » par la politique conduite actuellement dans l’Etat hébreu, estime Helen Mirren dans une interview à l’AFP, ajoutant que la dirigeante travailliste partageait « l’idéalisme » des fondateurs de l’Etat hébreu, bien loin de la réforme en cours du système judiciaire, laquelle marquerait selon l’actrice « l’arrivée de la dictature ». Guy Nattiv a partagé le point de vue de son actrice, affirmant que « si Golda était vivante et voyait ça, elle voudrait retourner dans sa tombe ». A ce propos, TJ a publié ce matin le « billet » de Jonathan S. Tobin sur « JNS », qui n’hésite pas à « moquer » Helen Mirrren, et va jusqu’à affirmer, lui, que Golda serait aujourd’hui d’accord avec Netanyahou.
In fine, après les 100 minutes passées avec « Golda », si la PM n’est pas dépeinte comme une figure sympathique, elle est présentée comme l’un des rares dirigeants politiques prêts à prendre des responsabilités.
Golda sortira dans certains cinémas le 25 août 2023.
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