Les parents du jeune homme de 35 ans, arrêté le 28 septembre 2022 à Téhéran, ont dévoilé son identité. Sept Français sont incarcérés en Iran.
Il s’appelle Louis Arnaud et est détenu dans la prison Evin de Téhéran. La famille de ce touriste français de 35 ans, qui se trouvait en Iran depuis le 2 septembre dernier dans le cadre d’un tour du monde entamé un mois et demi plus tôt à partir de la France, a décidé de briser le silence dans un communiqué transmis ce 26 janvier à l’Agence France-Presse. On y apprend que le jeune homme, consultant en services financier à Paris, a été interpellé dans la capitale iranienne le 28 septembre, soit douze jours après la mort de Mahsa Amini qui a provoqué un soulèvement populaire sans précédent en Iran.
« Connaissant avec certitude ses propres engagements et ayant eu quelque écho de témoignages de ses compagnons de route, nous sommes sûrs que notre fils Louis n’a pris part à aucune manifestation ni exprimé d’idées hostiles à l’Iran, à son gouvernement ou à l’islam », assurent ses parents Jean-Michel et Sylvie Arnaud dans le communiqué. « Notre fils n’est ni comploteur, ni espion, ni malfaiteur. Il est un simple citoyen du monde, qui souhaite le parcourir pour mieux le connaître et le comprendre ».
Le gouvernement français investi
Incarcéré dans des « conditions de détention très rudes », Louis Arnaud a pu recevoir une fois la visite de l’ambassadeur de France à Téhéran, Nicolas Roche, le 11 décembre. Il a également pu s’entretenir à deux brèves reprises au téléphone avec ses parents au mois d’octobre. « Nous sommes conscients de l’investissement du gouvernement français et de la ministre de l’Europe et des Affaires étrangères pour l’amélioration des conditions de détention et la libération des otages français », écrivent ces derniers dans le communiqué. « Mais nous voulons alerter et mobiliser plus largement le public sur la situation de nos compatriotes et de notre fils, car nous voyons bien que l’idée de rester discret et silencieux ne fonctionne pas ».
Louis Arnaud est donc le sixième détenu français dont le nom a été rendu public après le cas de la chercheuse Fariba Adelkhah, emprisonnée depuis juin 2019, du touriste Benjamin Brière, arrêté en mai 2021 alors qu’il manipulait un drone de voyage dans un parc naturel, des touristes et syndicalistes Cécile Kohler et Jacques Paris, interpellés en mai 2022 après avoir rencontré des collègues iraniens impliqués dans des manifestations, et de Bernard Phelan, consultant en tourisme franco-irlandais de 64 ans, arrêté le 3 octobre 2022. Un septième Français, dont l’identité n’est pas connue, est emprisonné dans le pays.
«Diplomatie des otages »
Leur cas entre dans le cadre de la « diplomatie des otages », une pratique de longue date de la République islamique, qui vise à arrêter arbitrairement des ressortissants étrangers sur son territoire pour s’en servir de monnaie d’échange sur des sujets de contentieux avec leur pays d’origine. « Ces arrestations visent à faire pression sur la France pour obtenir de notre part des concessions sur tel ou tel dossier », explique un diplomate. C’est ainsi que l’universitaire français Roland Marchal, emprisonné en juin 2019 à Téhéran, n’a été libéré que neuf mois plus tard en échange de Jalal Rohollahnejad, un ingénieur iranien qui était détenu en France sur ordre de la justice américaine.
Les prises d’otages de citoyens européens, et plus particulièrement de ressortissants français, se sont accélérées depuis l’interpellation en Allemagne le 1er juillet 2018 d’Assadollah Assadi, un diplomate espion iranien impliqué dans une tentative d’attentat avortée contre un rassemblement d’opposants iraniens à Villepinte, en banlieue parisienne, le 30 juin 2018. Officiellement troisième conseiller de l’ambassade d’Iran à Vienne, cet Iranien de 50 ans agissait en réalité sous couverture pour le ministère iranien du Renseignement. Le tribunal d’Anvers l’a condamné en juin 2021 à vingt ans de prison pour terrorisme. Depuis, le régime des mollahs fait tout pour récupérer son agent secret.
Valeurs universalistes
La récente vague d’arrestations de Français en Iran répond aussi à la volonté du régime iranien, en proie à une révolte intérieure sans précédent, de renforcer auprès de ses partisans l’idée d’un complot ourdi par l’Occident. « Le complot américano-britannique ne suffit plus », ironise un autre diplomate. « La France demeure suffisamment importante à leurs yeux pour justifier la théorie du complot sans prendre de risques inconsidérés. Le pays représente aussi une certaine identité universaliste… » Des valeurs qui séduisent une grande partie de la jeunesse iranienne, au grand dam des ayatollahs.
© Armin Arefi
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