Yana Grinshpun. Comment concocter un article mensonger : la recette parfaite du « Monde » 

La rhétorique israélophobe du journal Le Monde est celle du loup qui s’habille en Grand-Mère pour mieux tromper les lecteurs du quotidien « le plus lu en France ». Demandez aux enseignants à l’Université ce qu’ils savent d’Israël, de son histoire, de sa géographie et de sa politique et vous obtiendrez les phrases toutes faites, apprises par cœur et directement extraites des pages du journal Le Monde : « territoires occupés », « violation du droit international », « apartheid », « démolition des maisons palestiniennes » …

« Quand cesserez-vous de coloniser les Palestiniens » m’a demandé une collègue, pourtant bienveillante. Le « vous » que j’ai trouvé significatif. Bah oui, les Juifs (ceux qui ne se rangent pas dans les rangs de la France Insoumise), les Israéliens, les sionistes, tout ça, c’est la même chose, et pas seulement dans la tête d’un Mohammed Merah ou d’un Amedy Coulibaly, mais dans la tête des lecteurs éduqués, cultivés et polis du journal Le Monde.

Cette question est pour moi la preuve que le discours médiatique participe à la haine anti-juive à travers les mensonges, la manipulation des faits et du langage, l’occultation, les fausses accusations, les amalgames, bref, moyennant toute cette panoplie usée mais efficace d’une incitation à la haine et d’une propagande anti-israélienne.

La déontologie mise de côté

Le Monde dispose d’une équipe de « journalistes » pour qui les obligations suivantes n’existent pas. Le journaliste, selon cette charte[1] :

  • « Tient l’esprit critique, la véracité, l’exactitude, l’intégrité, l’équité, l’impartialité, pour les piliers de l’action journalistique ; tient l’accusation sans preuve, l’intention de nuire, l’altération des documents, la déformation des faits, le détournement d’images, le mensonge, la manipulation, la censure et l’autocensure, la non vérification des faits, pour les plus graves dérives professionnelles ;
  • Exerce la plus grande vigilance avant de diffuser des informations d’où qu’elles viennent »

Ces obligations concernent en effet les journalistes, pas les propagandistes experts dans le militantisme et le mensonge. Lorsqu’il s’agit d’Israël, le Monde laisse de côté la déontologie et donne le feu vert (ainsi qu’un bon salaire) aux spécialistes rodés de ces discours que je qualifie de « meurtriers », car leur particularité est d’instiller la négativité et la haine d’Israël,  laquelle se répercute sur les Juifs de France. Mohammed Merah l’a très bien expliqué.

Je vais me concentrer, en guise d’exemple, sur la production d’une spécialiste du discours propagandiste anti-israélien : Clothilde Mraffko, – (le départ de Piotr Smolar a été certainement une grave perte pour la branche anti-israélienne du Monde ! mais avec Mme Mraffko, Le Monde s’est bien rattrapé). Les procédés discursifs et la rhétorique anti-israélienne de cette journaliste sont toujours les mêmes. Son dernier texte que j’analyse ici concentre à lui seul tous les procédés usés jusqu’à la moelle de la rhétorique israélophobe du Monde. Ces procédés contribuent à la construction du dispositif victimaire où les bourreaux et les victimes sont clairement désignés. Les éléments doxiques mobilisés par ces procédés s’installent progressivement dans la langue commune et dans la mémoire collective, façonnent la perception du lecteur et donnent à des opinions les apparences de l’évidence.

Discours de manipulation : occultation, manipulation, mensonge

Par discours manipulateur, j’entends un discours qui répond à deux mécanismes psycho-discursifs. Le premier consiste à implanter chez le sujet des croyances à partir d’informations déformées ou filtrées ou d’analyses non étayées par une argumentation rigoureuse et rationnelle. 

Le deuxième sous-tend le premier : le discours manipulateur se présente comme « objectif et neutre » moyennant des procédés discursifs divers dont certains seront analysés ici en détail.

Les techniques essentielles  sont l’occultation des faits, la manipulation des faits et du langage. 

Les textes de Mme Mraffko suivent en général, sans variation, ce schéma argumentatif. Son dernier article[2] peut s’enseigner comme un cas d’école de la rhétorique de la manipulation. Lisons plutôt :

« Dans les territoires palestiniens occupés, l’Europe paye, Israël détruit », titre Mme Mraffko, dont la réputation de militante  n’est plus à discuter[3]

Les forces israéliennes démolissent des tentes et d’autres structures appartenant à des Bédouins au hameau de Khirbet Humsa dans la vallée du Jourdain, en Cisjordanie, le 7 juillet 2021.  Mardi Mohammed / AFP

« 21 septembre, l’armée israélienne a envahi le hameau bédouin d’Ein Samiya, dans les collines rocailleuses près de Ramallah, en Cisjordanie occupée, pour y démolir deux maisons. L’école, construite avec des aides européennes et inaugurée en janvier, est, elle aussi, menacée: le 10 août, un tribunal israélien a ordonné sa destruction, arguant qu’elle a été construite sans permis – Israël n’en délivre quasiment jamais pour les Palestiniens en zone C, les 60 % de la Cisjordanie qu’il contrôle totalement.»

Mensonge et occultation

Mme Mraffko n’est pas à son premier coup d’essai.  Les secrétaires de rédaction et chefs de service du Monde, censés vérifier la production de leurs employés, sont forcément dans la même configuration propagandiste, ou bien dans l’ignorance. 

La zone C, qui couvre une large partie de Judée-Samarie, se trouve sous le contrôle administratif d’Israël. Citons Wikipédia, cette source qui- jusqu’à preuve du contraire -ne se trouve pas sous le contrôle du gouvernement israélien. 

« L’Autorité palestinienne est responsable des services médicaux et éducatifs des Palestiniens de la zone C, tandis que la construction des infrastructures est faite par Israël ».

L’école est considérée comme une infrastructure et le permis de construire, selon la loi, ne peut être délivré que par l’administration officielle. Lorsque la construction est illégale, elle tombe sous le coup de la loi israélienne, votée en 2017 par les députés du Parlement israélien, démocratiquement élu : « La loi prévoit une peine pouvant aller jusqu’à trois ans d’emprisonnement, augmente les amendes et réduit le pouvoir des tribunaux de reporter la date des ordres de démolition ». 

Par conséquent, tout ce qui est écrit dans le texte de Mraffko relève de l’occultation de la vérité, du mensonge et de l’induction en erreur des lecteurs. 

Ce qui est donc illégal dans cette affaire, c’est 

La construction des maisons et des écoles sans permis délivré par l’administration israélienne.

La zone C, répétons-le pour la nième foisse trouve sous la juridiction administrative israélienne depuis la signaturedes accords d’Oslo. Pour les lecteurs sérieux, qui ne se fient pas aux sources citées par Wikipédia, citons ici les références françaises :

« Enfin la zone C représente 73 % de la superficie de la Cisjordanie et couvre les zones non peuplées, les zones dites stratégiques et les colonies. Cet ensemble reste placé sous le contrôle exclusif d’Israël – à l’instar de la partie de la bande de Gaza encore non évacuée (soit 30 à 40 % de ce territoire) » (https://www.senat.fr/rap/r96-159/r96-1591.html), consulté le 2 novembre 2022.

Comme il nous est difficile d’imaginer que Le Monde engage des journalistes incompétents, nous avançons l’hypothèse d’un engagement anti-israélien utilisant des procédés manipulatoires cautionnés par la rédaction.

Pour étayer ses mensonges, Mme Mraffko recourt à l’argument d’autorité, en citant un diplomate européen. Mais celui-ci commet une double erreur : il parle de la zone C comme d’un « territoire occupé », et il évoque « le droit international » sans jamais citer un seul article dudit droit, pour la bonne raison que ce droit, tel qu’il est invoqué, n’existe pas. 

« La pratique continue des démolitions et évictions en zone C et à Jérusalem-Est occupée est en violation du droit international humanitaire et doit cesser », a déclaré le représentant de l’Union européenne (UE), Sven Kuhn von Burgsdorff, dans un communiqué accompagné d’une belle photo de groupe des représentants, en rang sous un soleil de plomb ».

Ce que Mme Mraffko présente comme le cri d’indignation d’un diplomate européen, accablé, qui plus est, par le soleil dont il ne peut sa cacher dans des constructions démolies, est en fait l’occultation du fait que ledit diplomate est dans l’illégalité, qu’il essaie de masquer.

Le 22 août 2022, David Isaac, (le cousin éloigné de Jules Isaac[4], dont il a hérité le goût de la vérité) signe un article d’une grande importance dans JNS (Jewish News Syndicate), « La tentative furtive de l’Autorité palestinienne de s’emparer de la Judée et de la Samarie »[5]. Le journaliste d’investigation explique que l’Autorité Palestinienne poursuit un plan de constructions illégales. Isaac écrit :

Semblables à des villages Potemkine, de nombreuses structures sont vides, creuses, sans fenêtre, seules ou regroupées. L’accaparement des terres a connu un énorme succès parce que les contre-mesures israéliennes ont été si faibles…

Les constructions illégales sont subventionnées par les ONG européennes et par certains gouvernements européens. Le contribuable français, éduqué dans le respect de la loi, n’aurait-il pas le droit d’en être informé ? 

Manipulation

Mme Mraffko continue : 

« Israël détruit régulièrement des structures financées par l’argent du contribuable européen, sans être sanctionné. Entre novembre 2020 et juillet 2021, Khirbet Humsa, un hameau bédouin dans le nord de la vallée du Jourdain, a ainsi été partiellement ou entièrement démoli sept fois par l’armée israélienne ».

La métonymie « le contribuable européen » mérite qu’on s’y arrête. L’article défini désigne une généricité et implique donc tous ceux qui paient les impôts pour financer l’Union Européenne. Ce pauvre contribuable sait-il que son argent est utilisé à des fins sans noblesse pour nourrir une campagne anti-israélienne ?

Voyons également la création de la doxa entourant la destruction du hameau bédouin. Les Bédouins ont installé leur campement dans cette zone de tir, en 2010, sans demander l’autorisation de l’administration. Pour empêcher leur retrait du site, les Bédouins ont fait appel à trois reprises (en avril et juillet 2011, et en novembre 2014) devant la Cour Suprême. À chaque fois, les appelants ont invoqué une nouvelle excuse – le ramadan, la météo, – pour justifier leur accaparement du terrain. Les appels ont tous été rejetés, et l’avant-poste illégal a été démantelé, mais reconstruit à plusieurs reprises depuis les arrêts de la Cour Suprême. En fait, il s’agit d’un jeu. L’armée enlève les structures illégales, les militants des « droits de l’homme » de gauche viennent avec leurs caméras, puis les responsables de l’Autorité Palestinienne entreprennent de reconstruire les « structures ». Pendant ce temps, la population vulnérable qui vit là est exploitée par l’Autorité Palestinienne, et sert bien malgré elle les intérêts des manipulateurs tels Mme Mraffko et alii qui fabriquent leurs textes pour le gentil lecteur du Monde, lequel ignore tout de la loi internationale, de la loi israélienne, de la manipulation permanente de l’opinion publique. 

Les Bédouins sont envoyés par l’Autorité Palestinienne pour s’emparer d’emplacements stratégiques en Judée et en Samarie, attirés par divers avantages, souvent financiers. C’est une situation gagnant-gagnant pour l’Autorité Palestinienne et son organe de presse français,  Le Monde. Si les Bédouins parviennent à consolider leur implantation contrairement à la loi, c’est une prise de terres illégale réussie ! Et s’ils sont chassés par Israël, des mensonges sont colportés par les médias internationaux, et Israël peut être dépeint comme une entité cruelle et oppressive. 

Fonctionnant comme des formules incantatoires ces procédés propagandistes ne sont pas sans rappeler ce que dit V. Klemperer de la Lingua Tertii Imperii qui analysa comment se déploie la propagande d’un groupe qui a pris le pouvoir :

«… les mots peuvent être comme de minuscules doses d’arsenic : on les avale sans y prendre garde, ils semblent ne faire aucun effet, et voilà qu’après quelque temps l’effet toxique se fait sentir. […] la langue nazie imprègne les mots et les formes syntaxiques de son poison, elle assujettit la langue à son terrible système, elle gagne avec la langue son moyen de propagande le plus puissant, le plus public et le plus secret. » 

C’est ainsi que des journalistes comme Mraffko, ou plutôt des militants qui font œuvre de journalisme, distillent régulièrement un poison qui nourrit la logique antisémite. 

© Yana Grinshpun


[1] https://www.snj.fr/content/charte-d%E2%80%99%C3%A9thique-professionnelle-des-journalistes

[2] https://www.lemonde.fr/international/article/2022/10/02/dans-les-territoires-palestiniens-occupes-l-europe-paie-israel-detruit_6144075_3210.html

[3] https://infoequitable.org/une-militante-anti-israelienne-acharnee-correspondante-du-monde-a-jerusalem/

[4] Jules Isaac est un historien français, spécialiste de l’antisémitisme chrétien, auteur d’un ouvrage important L’enseignement du mépris. David Isaac est un journaliste américain, auteurs de nombreux articles d’investigation dans JNS (Jewish National Syndicate).

[5] Ma traduction,  https://www.jns.org/palestinian-authoritys-stealth-attempt-to-take-over-judea-and-samaria/

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7 Comments

  1. Une simple remarque sur votre texte.
    Vous dites : »« Quand cesserez-vous de coloniser les Palestiniens » m’a demandé une collègue ».

    Il me semble que les juifs français vivant en France ne colonisent personne. Il me semble que les juifs français sont anti-sionistes puisqu’ils pourraient aller vivre en Israël et qu’ils ne le font pas. Après qu’ils estiment devoir prendre la défense de ce pays c’est une autre affaire.

  2. Incompétence et racisme/antisémitisme ne sont pas incompatibles ! La plupart des journalistes, notamment francophones et anglophones, sont aussi racistes qu’incompetents. Et réciproquement. D’ailleurs leur antisémitisme viscéral est une conséquence de leur médiocrité intellectuelle, de leur ignorance crasse et de leur bassesse morale.

    • Merci de votre commentaire. Je dois vous decevoir, de nombreuses études américaines et russes montrent que plus le niveau intellectuel est élevé, plus les penchants antiémites sont élaborés, sophistiqués et argumentés. J’ai écrit plusieurs articles sur l’antisionisme universitaire, dans beaucoup de cas il s’agit de l’antisémitisme à peine caché, émanant des gens très cultivés. Il ne s’agit pas de la rationalité.

  3. Vouloir savoir vraiment quoique ce soit de l’histoire d’Israel où bien une connaissance profonde et …vérifiable, des journaux ne suffisent jamais …excepté comme livraison journalière des articles divers.
    Tout à fait pas la même chose que la connaissance.

    • Ce que je trouve étonnant c’est que certain(e)s qui savent que les médias français mentent au sujet d’Israël, de la France ou des USA croient tout ce que les mêmes médias disent au sujet de la Russie !…Et paradoxalement les choses les plus réellement répréhensibles chez Poutine et la Russie actuelle (l’alliance avec le Taliban tchetchene) sont celles dont l’on parle le moins !

  4. @Il me semble que vous confondez intelligence et diplômes, culture et études universitaires…Or ces choses n’ont strictement rien à voir. Ce qu’on dit avec justesse au sujet de l’école (une machine à fabriquer des crétins) pourrait tout aussi bien s’appliquer à certains milieux universitaires (les sciences molles) dont le naufrage intellectuel et l’obscurantisme talibanesque sont notoires. Nos dirigeants, folliculaires et sociologues imbéciles et incultes sont souvent bardés de diplômes. Le milieu médical lui-même n’est pas épargné. Cordialement.

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