Le seul pardon possible est donc bien le pardon impossible. Derrida
On a raison de rappeler toujours que le pardon n’est pas l’oubli. Au contraire, il requiert la mémoire absolument vive de l’ineffaçable, au-delà de tout travail du deuil, de réconciliation, de restauration, au-delà de toute écologie de la mémoire. On ne peut pardonner qu’en se rappelant, en reproduisant même, sans atténuation, le mal fait, ce qu’on a à pardonner. Si je ne pardonne que ce qui est pardonnable, le véniel, le péché non mortel, je ne fais rien qui mérite le nom de pardon. Ce qui est pardonnable est d’avance pardonné. D’où l’aporie : on n’a jamais à pardonner que l’impardonnable. C’est ce qu’on appelle faire l’impossible. Et d’ailleurs, quand je ne fais que ce qui m’est possible, je ne fais rien, je ne décide de rien, je laisse se développer un programme de possibles. Quand n’arrive que ce qui est possible, il n’arrive rien, au sens fort de ce mot. Ce n’est pas « croire au miracle » que d’affirmer ceci : un événement digne de ce nom, l’arrivée de l’arrivant(e) est aussi extraordinaire qu’un miracle. Le seul pardon possible est donc bien le pardon impossible. J’essaie d’en tirer les conséquences, en particulier pour notre temps. Et non seulement, peut-être même pas du tout dans l’espace public ou politique, car le pardon ainsi défini, je ne crois pas qu’il appartienne de plein droit au champ public, politique, juridique, et même éthique. D’où l’enjeu et la gravité de son secret.
Propos recueillis par Antoine Spire, sur le site de Derrida.
Faire et défaire. Fais et défais. Les choses, les mots, les lieux. Faits ou des faits divers pour les uns, d’armes pour d’autres, fais en sorte que tout semble parfait, fais semblant comme un fait exprès , fais écho pour ouvrir le silence, fais foi et fais face, fais fi des plis du temps, fais belle ou grise mine et fais grief ou attention à l’eau qui ruisselle.
Fait historique ? Ou fait d’honneur ? Fait intéressant, insolite, illicite, illusoire ou fait impératif, irréversible, irrespectueux et irréparable ? Fais la part belle aux mots, aux maux.
Fait maison, fait cousu main, fait naturel ou négatif ?
Fais objection dans ce fait d’opinion fais même offense en dernier fait d’obstacle. Fait pour faire valoir ce que de droit. Fais partie intégrante d’un monde sans âme. Fait réel, religieux.
Mais fais référence sans risette ni rage. Fais sur mesure ton dernier jour. Fais le surprenant. Un fait social, inédit, stylisé. Un fait urbain sans effort, mais éclat. Fais tout. Ou des faits tout. Si cela manque d’effet préfet parfait imparfait plus que parfait imparfait méfaits mais fais faitouts ainsi fait défait refait tout à fait surfait.
Les préparatifs de Kippour. Mettre sa pensée en attente avec cette idée en tête : pardonner.Vais-je pouvoir tout pardonner ?
En quel sens l’impardonnable est-il la condition du pardon ? Est-ce parce qu’il est sa limite infranchissable qui, si elle était transgressée, lui ferait perdre toute signification ?
Ici l’impardonnable marquerait l’impossibilité du pardon.
Ou, inversement, est-ce parce que l’impardonnable est précisément ce qui donne son sens au pardon, ce qui fonde sa possibilité, comme pardon de l’impardonnable ?
Il ne s’agit pas ici d’une relation d’équilibre entre soi et l’autre, mais d’un accès à la vérité de soi tant du côté de celui qui demande pardon que de celui qui pardonne. Sans la profondeur de cette relation qui nous change et qui change aussi autrui, le pardon est-il possible ?
C’est un des plus grands combats de notre vie. Pardon et ou non oubli. Un des plus importants questionnements de notre intériorité.
Mais, nous sommes seuls face au pardon et c’est en nous que nous pouvons trouver les clés à cette question : peut-on tout pardonner ?
© Felicia -France Doumayrenc
« Une justice inspirée par la pitié porte préjudice aux victimes. »
Si quelque chose est réellement impardonnable, il ne faut jamais pardonner.
Mais la question qui doit se poser est : qu’est-ce qui est réellement impardonnable ou ne l’est pas ? Tout le monde n’a pas la même idée sur le sujet.
Certaines choses jugées admirables par la société peuvent être en réalité impardonnables (et le sont à mes yeux) et ne mériter aucun pardon…Et inversement.
Mme Roy a raison.Le pardon ne peut pas se distribuer n importe comment,ce serait le devaloriser.Si on perd un parent a la guerre,il faut se dire que le meurtrier d etat est un homme comme vous,completement depersonnalise par l uniforme.Il se peut meme que ce soit quelqu un de tres valable.Mais on ne peut partager la meme analyse pour l assassin qui profite de la guerre pour assouvir sa crapulerie congenitale.Aussi,s il faut pardonner pour les guerres classiques,on ne peut ni oublier ni pardonner pour les assassinats de masse de civils innocents.Les camps d extermination et de concentration doivent conserver leur statut de crime impardonnable,meme si on est bien recu a la fete de la biere,et admirateur de l equipe de foot allemande.Nos morts n avaient rien demande.