L’accord conclu entre la police et la famille de la journaliste a été violé par les émeutiers palestiniens
Lors des obsèques de Shireen Abu Akleh, qui ont eu lieu vendredi matin dans l’est de Jérusalem, les Israéliens semblent, une fois encore, être tombés dans le piège tendu par les Palestiniens: les images montrant des policiers frappant à coup de battes des participants à la procession funéraire de la journaliste d’Al Jazeera ont très vite fait le tour du monde. Sans se poser trop de questions, l’Union Européenne et l’administration Biden ont condamné l’attitude d’Israël lors de ces obsèques.
L’Etat hébreu s’est retrouvé, une fois de plus, montré du doigt, qui plus est lors de funérailles chrétiennes d’une journaliste tuée dans l’exercice de son métier, et dans des circonstances qui ne seront probablement jamais élucidées. Une fois de plus, le narratif palestinien a réussi à prendre le dessus et à falsifier la réalité. Car, pour ceux qui s’y intéressent, la réalité est toujours plus complexe que les images que les Palestiniens ont pris soin de diffuser en temps réel.
La police prise au piège
La réalité, c’est que les forces de police avaient conclu un accord précis avec la famille Abu Akleh sur le déroulement des obsèques. Selon cet accord, dès la sortie de l’hôpital Saint-Joseph, où le corps reposait, le cercueil devait être introduit dans un corbillard surmonté d’une croix en direction du petit cimetière chrétien de la porte de Jaffa.
Or, à la sortie du corps, des émeutiers palestiniens, pour certains affiliés au Hamas et donc non chrétiens, ont voulu s’emparer du cercueil afin de le transporter dans les rues de la Vieille ville. Une initiative qui aurait sans aucun doute provoqué de très vives émeutes sur l’ensemble du parcours.
La police avait alors le choix entre deux mauvaises solutions: soit laisser faire et risquer de très graves débordements, soit veiller au respect de l’accord conclu, et faire en sorte que le cercueil soit introduit dans le corbillard. La police a choisi la seconde option. C’est alors que les fauteurs de troubles « professionnels » ont, dès la sortie de la dépouille, lancé des pierres et des bouteilles sur les forces de police qui se sont senties menacées.
Voilà pour l’origine véritable de cette réaction violente des forces de police israéliennes… Une fois de plus, il est certain que les responsables de la police auraient dû savoir que la scène serait filmée et qu’elle ferait les grands titres des journaux du soir. Mais avouons qu’il est difficile de se mettre à la place de ces policiers en temps réel.
La réactivité sans précédent d’Israël
Israël avait pourtant jusque-là réussi à limiter les dégâts médiatiques consécutifs à la mort tragique de Shireen Abu Akleh, mercredi matin à Jénine.
En effet, dès l’annonce de la mort de la journaliste, la comparaison avec l’affaire Mohamed Al-Dura sautait aux yeux. Comme il y a 22 ans, la machine de propagande palestinienne s’est très rapidement mise en marche, accusant Israël d’avoir « assassiné » la journaliste. Les médias, avec une palme d’honneur pour l’AFP, leur ont très vite emboîté le pas en adhérant pleinement à leur narratif. Ce matin-là, le sentiment dominant était que cette mort tragique risquait bien d’être le catalyseur de cette troisième Intifada que les Israéliens redoutent tant.
Israël s’est alors très vite ressaisi. Alors qu’en 2000, Tsahal avait trop vite endossé la responsabilité de la mort du petit Mohamed, cette fois le porte-parole de l’armée israélienne s’est empressé de diffuser sur les réseaux une vidéo montrant des Palestiniens tirant à l’aveugle. Il a, dans le même temps, précisé que les soldats en opération à Jénine n’avaient tiré que vers des cibles claires, alors que les Palestiniens avaient tiré des milliers de cartouches sans distinction.
Mais surtout, deux heures après l’annonce de la mort de Shireen Abu Akleh, le chef de la diplomatie israélienne Yaïr Lapid a proposé à l’Autorité palestinienne d’ouvrir une enquête commune et de procéder à une autopsie conjointe, y compris en présence d’un représentant officiel américain, puisque la journaliste possédait aussi cette nationalité. De l’avis des experts, si la balle retirée de la tête de la victime était israélienne, elle portait une numérotation, contrairement aux balles tirées par les Palestiniens. Il aurait donc été facile de résoudre cette macabre énigme.
Seul problème: Mahmoud Abbas a formellement refusé de coopérer avec Israël. En adoptant cette position, ce sont les Palestiniens, et non les Israéliens, qui ont paru vouloir masquer la vérité, ce qui constituait un premier bon point pour Israël dans cette bataille médiatique…
Gain de crédibilité
Le second bon point de l’Etat hébreu dans une telle crise provient de la crédibilité qu’il a acquise. L’un des changements majeurs intervenus depuis la seconde Intifada, c’est le rayonnement progressif d’Israël au sein de la communauté internationale. Depuis le milieu de la précédente décennie, l’Etat d’Israël s’est imposé comme un pays leader dans de multiples secteurs: la lutte antiterroriste (devenue une priorité majeure après les attentats de 2015 en France), la hi-tech, les techniques de désalinisation de l’eau, et plus récemment, la gestion de l’épidémie et de la campagne de vaccination. Dans ces secteurs, Israël a développé des relations privilégiées avec de grandes nations, émergentes ou non. Son sérieux et l’expertise de ses chercheurs ont considérablement augmenté la cote de crédibilité de l’Etat hébreu au sein des nations.
Or, c’est bien connu, pour être crédible en temps de crise, il faut l’avoir été en période d’accalmie. Voilà pourquoi aujourd’hui, lorsque ces pays qui traitent au quotidien avec Israël sont témoins des accusations factices palestiniennes, et lorsqu’ils assistent au refus formel de l’Autorité Palestinienne de coopérer, ils sont en mesure de se faire leur propre idée sur la question…
Et au final, cette crédibilité d’Israël, doublée de son intégrité et de sa quête de vérité, pèse bien plus lourd dans la balance que la victimologie perpétuelle des Palestiniens, qui a fini par lasser de nombreux pays comme les Emirats, Bahreïn ou beaucoup d’autres en dehors du monde arabe…
Alors certes, cette crédibilité est une arme moins tranchante et plus lente à utiliser que la machine de propagande palestinienne, mais elle correspond bien mieux aux valeurs morales et éthiques portées par l’Etat hébreu depuis sa création. De même que personne dans Tsahal ne tirera jamais délibérément en direction d’une journaliste ou d’un innocent, personne en Israël n’oserait lancer une campagne visant à biaiser la réalité. Et la réalité c’est qu’au cours des 30 dernières années, 1.442 journalistes ont été tués lors de conflits à travers le monde, et que 18 l’ont été dans le cadre du conflit israélo-palestinien…
Au bout du compte, il a semblé que cette approche portait ces fruits, et avait permis de maîtriser, au moins dans un premier temps, le raz de marée de condamnations qui menaçait de déferler sur Israël… et qui s’est finalement abattu sur l’Etat hébreu vendredi après-midi, avec les images choc des obsèques de la journaliste.
Cela prouve que même si dans sa position complexe, Israël aura toujours le plus grand mal à remporter la bataille des médias, il possède désormais quelques moyens efficaces de limiter les dégâts et de faire entendre sa voix, celle de la crédibilité et de la bonne volonté.
© Daniel Haïk
Journaliste franco-israélien, installé à Jérusalem depuis 35 ans, Daniel Haïk est analyste politique de la chaine I24news et rédacteur en chef de l’hebdomadaire Haguesher. Il a été pendant 30 ans l’une des « voix » connues de la fréquence juive parisienne.
Daniel Haïk a écrit une superbe biographie d’Ariel Sharon: Daniel Haïk. Sharon, un destin inachevé. Éditions in Press
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