Alors que la nouvelle édition du Routard Paris est sortie, le cofondateur du guide de tourisme le plus vendu en France nous livre son regard sur la capitale et partage ses bonnes adresses.
Philippe Gloaguen retrouve le sourire. Les ventes du Guide du routard repartent en flèche. Les Français reprennent le chemin des librairies pour préparer leur prochain voyage. « Plusieurs pays ont rouvert leurs frontières et levé les restrictions sanitaires. On commence à voir le bout du tunnel », se réjouit le cofondateur du guide touristique le plus vendu de France, même si la guerre en Ukraine laisse à nouveau planer un doute sur certaines destinations.
À la tête de son petit empire éditorial dédié au voyage, Philippe Gloaguen partage sa vie entre le XIVe arrondissement de Paris, à deux pas de la très commerçante rue Daguerre, où il fait ses courses, et ses bureaux nichés au pied de la Butte aux Cailles (XIIIe), dans une ancienne biscotterie artisanale érigée dans la très pittoresque rue du Moulin-des-Prés, où la rédaction est installée depuis douze ans.
« Paris est une ville passionnante mais elle est sale et rien n’est fait pour faciliter les déplacements. Tout est mis en œuvre pour faire fuir les Parisiens. Et pourtant, j’aime toujours Paris » , critique Philippe Gloaguen, tout en citant en exemple la gestion des villes de Bordeaux et de Strasbourg. De là à soutenir le mouvement #SaccageParis, il n’y a qu’un pas qu’il se refuse à franchir. « Je n’ai pas besoin des réseaux sociaux pour me faire une idée de l’état de la capitale », rétorque celui qui y vit depuis près de cinquante ans.
Un Guide du routard vendu toutes les 8 secondes
Le tout récent Guide du routard Paris 2021-2022 trône sur son bureau. « La première édition, en 1983, a rencontré un énorme succès. Elle s’est hissée en tête des guides touristiques en France. On y trouve une sélection de bonnes adresses pour manger et dormir et des idées de balades. Nous avons pris le parti de donner un coup de projecteur sur les quartiers oubliés, les bars, les lieux de vie… Sur le Paris des Parisiens ! » explique Philippe Gloaguen, lui-même amateur de petits troquets de quartier où se croisent ouvriers, cadres et bobos, et de bonnes tables, où il va se restaurer, d’un coup de scooter.
L’ouvrage prendra place dans la bibliothèque où sont rangés les quelque 160 titres de la collection. « 2,5 millions d’exemplaires sont vendus chaque année en période normale. Au cours des deux dernières années, les titres sur l’étranger ont reculé fortement et ceux sur la France ont augmenté », précise le directeur du Routard. Depuis la création, il y a près d’un demi-siècle, 55 millions d’exemplaires ont ainsi été vendus. Il en partirait un toutes les 8 secondes.
Sauf quand le Covid vient mettre un coup d’arrêt au tourisme et fait plonger cette affaire florissante (40 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2019). « Nous avons traversé une période très difficile. Les rédacteurs du Routard, en tant qu’auteurs, n’avaient pas le droit au chômage partiel. Avec mon épouse, nous avons pris la décision de continuer à rémunérer à 100 % l’ensemble de l’équipe pendant toute la période du Covid », explique ce chef d’entreprise au management mâtiné de paternalisme, fidèle à ses 120 salariés.
Tout est parti d’un voyage en 1973
Avec la réouverture des frontières, c’est reparti. « 96 voyages à l’étranger et 29 voyages en France sont inscrits au planning pour l’année 2022. Les collaborateurs restent en moyenne 10 à 15 jours sur place et les guides sont également remis à jour, en tenant compte des remarques des lecteurs. » Lui-même assure voyager en temps normal une fois par mois pour ses affaires.
Rien ne prédestinait ce fils d’un instituteur originaire du Pays bigouden et d’une assistante sociale berrichonne, qui a grandi à Meudon (Hauts-de-Seine), à prendre la tête d’un petit empire éditorial dédié au voyage. L’aventure a démarré en 1973. Diplômé de l’École supérieure de commerce de Paris (ESCP), 21 ans à l’époque, Philippe Gloaguen part, sac à dos, sur la route des Indes, en compagnie de Michel Duval, un copain de prépa. C’est de leurs carnets de route qu’est né le Guide du routard.
Le nom de la collection est déposé au registre des marques de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) en 1975. Depuis 1979, Philippe Gloaguen dirige seul le Routard, il est directeur de collection chez Hachette, qui édite ses guides depuis 1975. Au cours des dernières années, la marque s’est enrichie d’un site Internet créé en 1996, l’un des premiers sites de voyage en France, et d’un magazine trimestriel, lancé il y a un an.
Les bonnes adresses de Philippe Gloaguen
Pour manger, Philippe Gloaguen recommande Au P’tit Zinc, 2, rue des Plantes (XIVe). Il apprécie l’humanisme d’Éric Mauboussin. « Un patron de bistrot de quartier parisien, comme tous les Auvergnats, sauf qu’il est de la Sarthe, plaisante-t-il. On y vient à toute heure. On y croise une clientèle populaire, les vieux du quartier, les politiques et les vedettes de cinéma. On y sert une cuisine bistrotière, notamment un chou farci qui vaut le détour. Côté vin, c’est le patron qui décide. »
Pour boire un verre, il adore aller du côté de la Butte aux Cailles et a une préférence pour La Folie en tête, 33, rue de la Butte-aux-Cailles (XIIIe), bar traditionnel au décor vieillissant, où on avale un casse-croûte le matin avec un verre de blanc et qui s’anime le soir avec une clientèle plus jeune.
Pour se balader, il conseille de déambuler sur la coulée verte de la Bastille (XIIe), aménagée sur une ancienne voie ferrée, entre le viaduc des Arts et Vincennes (Val-de-Marne). Une promenade suspendue entre ciel et terre par endroits, qui permet de trouver le calme et de découvrir des vues inhabituelles de la capitale.
© Christine Henry
M. Gloaguen indique, « De là à soutenir le mouvement #SaccageParis, il n’y a qu’un pas qu’il se refuse à franchir. “Je n’ai pas besoin des réseaux sociaux pour me faire une idée de l’état de la capitale”, rétorque celui qui y vit depuis près de cinquante ans. »
Tout à fait d’accord, mais sans les réseaux sociaux, la mairie de paris n’aurait pas bouger d’un iota !