Jacques Julliard : « De petites bandes d’aboyeurs et de sycophantes »

Tout, en vérité, tourne autour de la question de l’islam et de l’islamisme. Une partie de la gauche intellectuelle et un certain nombre de journalistes se sont constitués en chiens de garde pour décider, comme disait le trop célèbre président Delegorgue lors du procès Zola (7 au 23 février 1898), que « la question ne sera pas posée » : répétée des dizaines de fois, cette question concernait la culpabilité de Dreyfus. C’est ce qu’en termes d’artillerie on appelle un « tir d’interdiction ».

Jacques Julliard

C’est ainsi que j’ai été l’objet, ainsi qu’un certain nombre de confrères dont je considère la compagnie comme flatteuse, tels Marcel Gauchet, Michel Onfray, Alain Finkielkraut, Luc Ferry, Alexis Brézet, Vincent Trémolet de Villers, d’une mise au pilori pour m’être félicité (Marianne du 8 octobre 2021) que le surgissement d’Éric Zemmour dans la campagne présidentielle ait remis au premier plan la question de l’immigration que les gens convenables poussent régulièrement sous le tapis. « Étrange bienveillance », décrétaient Ariane Chemin et Ivanne Trippenbach dans Le Monde du 1er décembre dernier. La suite de mon article qui déclarait les solutions de Zemmour impraticables, et même susceptibles de mener à la guerre civile, n’intéressait pas celles que l’usage courant me contraint à nommer des « consœurs ». C’était assez, j’avais péché.

Il y a là une véritable dégradation. Au lieu de l’exposé loyal d’opinions divergentes – c’est depuis sa création une des fonctions et l’honneur de la profession -, on voit se multiplier, sous couleur de pétitions, de petites bandes d’aboyeurs et de sycophantes, spécialisés dans la stigmatisation de charrettes de réprouvés. Leur modèle journalistique n’est pas Chateaubriand, Hugo ou Mauriac, mais Fouquier-Tinville et Beria ; ajoutant l’odieux au dérisoire. Si elle se confirmait, une telle évolution serait un désastre pour la démocratie.

Reste la question essentielle. Pourquoi, je vous le demande, ne faut-il jamais parler de l’immigration en général et de l’islam en particulier ? Il n’y a qu’une réponse possible : c’est que le peuple est intrinsèquement raciste, et qu’il pourrait faire mauvais usage des informations – fussent-elles exactes – qu’on lui fournirait. Voilà ce qu’il y a d’étrange dans mon comportement: considérer le peuple comme majeur et responsable.

La vérité, c’est que la gauche politiquement correcte n’a que mépris pour le peuple depuis qu’elle l’a jeté par-dessus bord. À la lecture des sondages actuels, je crains que le peuple ne l’ait compris.

Source : Jacques Julliard / Le Figaro

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2 Comments

  1. Ce que vous appelez « La gauche intellectuelle » n’est pas de gauche au sens historique du terme et est encore moins intellectuelle.’ Ce sont les nouveaux Déat et Doriot

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