En Israël, le gouvernement semble miser sur la quatrième dose, le pass sanitaire et le traitement de Pfizer pour éviter de nouvelles restrictions
- Alors que les contaminations et les hospitalisations augmentent en Israël, le pays entrouvre ses frontières, teste moins et supprime le contact tracing.
- La preuve que face à Omicron, le pays a choisi de modifier sa stratégie.
- L’Etat hébreu mise en réalité sur deux choses : la protection des personnes vulnérables, avec le traitement de Pfizer que le pays vient de recevoir, et la quatrième dose de vaccin, proposée aux plus de 60 ans et aux immunodéprimés.
« Ici, on peut boire son café debout dans un bar ! », ironise Julien Bhaloul, ancien journaliste franco-israélien résidant à Tel-Aviv. Une référence aux nouvelles restrictions imposées en France depuis le 3 janvier. Selon les derniers chiffres, Israël, où 64,8 % de la population est totalement vaccinée contre le Covid-19, aurait environ 15.000 nouveaux cas en moyenne par jour sur une semaine. Le 25 décembre, ce chiffre plafonnait à 1.200.
Côté hospitalisations, l’augmentation est nette, mais lente. Il y aurait aujourd’hui 222 cas graves, contre 78 le 18 décembre. C’est dire si le pays, souvent cité en exemple, n’échappe pas à la flambée due à Omicron. Pourtant, la stratégie d’Israël semble avoir radicalement changé ces derniers jours.
Moins de restrictions en pleine vague Omicron
La vie sur place semble plus « normale » que dans nombre de pays européens, qui pour certains ont imposé à nouveau couvre-feu et autres restrictions. « Honnêtement, plus personne ne comprend rien au protocole, assure Julien Bahloul, qui vit en Israël depuis onze ans. Il n’y a presque plus de restrictions. Normalement, le masque est imposé en intérieur, mais pas en extérieur, le pass sanitaire est exigé partout, mais jamais vérifié, les restaurants, bars, boîtes, concerts restent ouverts. Même la fermeture des frontières vient d’être retirée ! »
Fermé à de nombreux pays depuis début décembre, Israël accueille depuis dimanche les ressortissants, à condition de présenter un test PCR ou antigénique négatif en provenance de pays classés orange. Dont la France et la Belgique.
Omicron et la pilule Pfizer, deux nouveautés fondamentales
Moins de restrictions face à une flambée des contaminations ? Le pays avait pourtant habitué ses habitants à davantage de prudence… Il faut dire que deux grands paramètres ont modifié l’équation. Tout d’abord, l’accès au Paxlovid, une pilule développée par Pfizer qui permet d’éviter les cas graves pour 90 % des patients. Israël a commencé à en recevoir le 30 décembre. « C’était un an jour pour jour après l’arrivée des vaccins Pfizer, et cela s’est déroulé dans la même hystérie : on a filmé l’arrivée des caisses à l’aéroport », raconte l’ancien journaliste. Le gouvernement a assuré que tous les patients ayant besoin de ce traitement précoce pourraient y avoir accès.
Deuxième nouveauté : le variant Omicron, extrêmement contagieux mais moins létal. Comme partout en Europe, les contaminations explosent… « Aujourd’hui, il y a une certaine fatalité, on se dit que de toute façon on va l’attraper, que ça soit en boîte, dans le bus, à la salle de sport… Alors autant vivre normalement ! », résume Julien Bahloul. Par ailleurs, le système de dépistage ne peut plus suivre. Depuis vendredi, le gouvernement a donc modifié les choses : les personnes de plus de 60 ans, immunodéprimés et non vaccinés, sont prioritaires pour les PCR. Les autres peuvent faire des antigéniques ou des autotests.
« On a vu d’immenses files d’attente devant les centres de dépistage, explique ce Franco-Israélien. Le problème c’est que les personnes à risque recevaient leurs résultats trop tard. Or, le médicament de Pfizer doit être pris dans les cinq premiers jours de l’infection. S’il est pris tard, le risque d’hospitalisation demeure. »
« Vivre avec », un changement radical de stratégie
Pour Julien Bahloul, cette nouvelle stratégie est un véritable revirement. « On a dit aux Israéliens « si vous êtes cas contact, vous pouvez faire un autotest à la maison ». Donc il n’y a plus de suivi, plus de contact tracing, reprend-il. Avant, on était traqué. Le gouvernement renonce à cette stratégie de vérification des cas et se concentre sur les personnes à risque. »
Mais d’autres considérations sont évidemment rentrées en ligne de compte. Au premier rang desquelles l’économie. « Ce gouvernement a souligné que les confinements ont un impact sur l’économie, la vie des couples, les enfants, la santé mentale… Tant qu’on n’est pas au bord du gouffre, il faut vivre avec. On n’est plus en 2020 où on n’avait aucun outil. Aujourd’hui, on en a trois : le gouvernement base sa stratégie sur le vaccin, le médicament Pfizer et le pass. »
Un pari périlleux ?
Le coordinateur de la lutte contre le coronavirus en Israël donnait une autre version des faits sur i24NEWS jeudi dernier. « Nous ne croyons pas en l’immunité collective ; des personnes qui ont été infectées par le variant Delta ont été de nouveau infectées par Omicron. Nous n’avons aucune donnée qui nous permette de dire que l’immunité collective avec Omicron nous protégerait, personne n’a dit que ce serait le dernier variant ou la dernière vague », a nuancé Salman Zarka.
Alors pourquoi rouvrir les frontières ? « Israël est déjà un pays rouge, donc nous ne pouvons pas interdire aux Israéliens de se rendre dans les pays rouges. C’est pour cette raison que nous avons décidé d’annuler la liste des pays rouges », a-t-il insisté.
« L’immunité collective est un mot qu’ils ont du mal à admettre, critique Julien Bahloul. Dans les faits, c’est pourtant ce qui se passe. Sauf qu’ils protègent les plus à risque. » Depuis début janvier, les personnes de plus de 60 ans, celles atteintes de comorbidités et les soignants, soit les premiers à avoir reçu les injections, peuvent faire une quatrième dose. Avec quel résultat ? Elle multiplie par cinq les anticorps, selon une étude de l’hôpital Sheba, près de Tel-Aviv. Mais attention, l’essai clinique ne porte que sur 150 soignants et seulement une semaine après l’injection. « On espérait mieux, reconnaît Julien Bahloul, mais on verra deux semaines après l’injection si l’effet booster est plus important. »
Ouvrir tout – ou presque – en pleine vague Omicron ressemble à un pari risqué. « Il y a encore quelques jours, le gouvernement était encensé : « pas de confinement, bravo », remarque Julien Bahloul. Ces derniers jours, on voit un changement. Tous les sites, de gauche comme de droite, le critiquent. Les spécialistes écrivent « on risque de vivre une vague Omicron de deux ou trois semaines, mais le gouvernement va-t-il tenir ? » » Ou changer de stratégie. Une énième fois .
Source : 20minutes
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