C’est juste un Père qui a perdu sa fille. Delphine Horvilleur nous explique qu’en hébreu un parent qui perd un enfant est appelé שכול, Shakoul, terme presque impossible à traduire, emprunté au registre végétal et qui signifie la branche de la vigne dont on a vendangé le fruit et David Grossman a ajouté à propos de ce mot qui désignait le « sans enfant » : Il n’existe pas dans les autres langues, je ne sais pas pourquoi. Le peuple juif a connu énormément de tragédies et c’est intéressant de constater qu’il a tourné son regard vers ce point précis, ce mot précis. Car, en réalité, perdre un enfant vous donne un sentiment de renversement de l’ordre du monde…
Si nous parlons, nous, de veuf et veuve, d’orphelins, nous ne disposons d’ aucun mot qui désignât l’innommable : la perte d’un enfant.
Ce père, hier, est venu à la barre pour Nathalie, morte ce 13 novembre 2015 au Bataclan, où elle était régisseuse lumière.
Hier Patrick Jardin, annoncé par des media ignobles comme un homme haineux, – on se demande bien pourquoi il le serait- se savait attendu au tournant.
Il a expliqué que Oui, de la haine, il en éprouvait. Et il l’a dit, avec respect pour la Cour.
Après avoir dit son mépris pour la pleureuse Salah Abdeslam qui osait se plaindre de ses conditions de détention, et qui voulait se faire passer pour un combattant, alors qu’un combattant, un vrai , ne se serait jamais permis de tirer à bout portant sur des gens désarmés, après l’avoir traité de monstre, de voyou qui n’avait pas d’enfant et ne pourrait jamais comprendre la douleur d’en perdre un, ce père dénonça les politiques, auxquels il ne pardonnerait jamais leur négligence et leur manque de courage, dénonçant, après l’intervention en Syrie, ceux qui, de Valls à Cazeneuve et Le Drian, avaient été incapables de justifier l’absence d’intervention des militaires de l’opération Sentinelle qui auraient pu sauver de nombreuses vies.
Il estime que Cazeneuve aurait dû faire établir une surveillance du Bataclan, objet de menaces récurrentes, et que Manuel Valls aurait dû, lui, regarder de près la liste de djihadistes émanant des services syriens.
Ce Père ajoute à l’intention de ceux qui le qualifient de facho qu’il ne fait pas de politique.
Evoquant ces témoins, nombreux, venus dire à la barre que s’ils ne pardonnaient pas, ils n’avaient plus de haine à l’encontre des accusés, il s’étonne du témoignage livré par ce père qui fut capable, lui, d’écrire un livre avec le père d’un des terroristes.
Voilà.
Celui-là, en effet, a dit à la barre qu’il aimerait rencontrer ceux des accusés qui auraient le courage d’accepter une telle rencontre et avait parlé de justice restaurative afin que les victimes comme les auteurs puissent croiser leurs regards et que chacune puisse y lire l’humanité de l’autre.
Eh bien Patrick Jardin commente : Je ne pouvais imaginer à quel point l’être humain a la capacité de se soumettre…
Lui ? Il dit : Plus le temps passe et plus la douleur d’avoir perdu ma fille augmente. J’en suis à payer encore l’abonnement de son téléphone pour pouvoir entendre sa voix.
Sarah Cattan
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