Glenwood (Etats-Unis) (AFP)
Répondre au noir par la couleur: c’est lorsqu’elle a vu les images de femmes portant le niqab lors d’une manifestation de soutien aux talibans à Kaboul que le Dr Bahar Jalali a décidé de lancer une campagne pour faire connaître les robes traditionnelles afghanes, chatoyantes et pleines de vie.
L’universitaire née en Afghanistan lance alors sur les réseaux sociaux le mot-dièse #DoNotTouchMyClothes (Ne touchez pas à mes vêtements, en anglais) pour protester contre le voile intégral noir imposé par les talibans aux étudiantes afghanes.
« J’étais très préoccupée par le fait que le monde puisse penser que le vêtement porté par ces femmes à Kaboul est l’habit traditionnel afghan », dit-elle à l’AFP dans sa maison de Glenwood, dans le Maryland, en allusion à la manifestation qui s’est tenue plus tôt ce mois-ci.
« Les femmes afghanes ne s’habillent pas comme ça. Les femmes afghanes portent des robes colorées que nous avons montrées au monde », sur Twitter notamment, ajoute-t-elle.
Dans son sillage, de nombreuses Afghanes publient en effet des photos d’elles portant des robes éclatantes et multicolores, vertes, jaunes, orange ou rouges, inondant les réseaux sociaux des célèbres broderies de leur pays.
Bahar Jalali, 56 ans, a émigré enfant aux Etats-Unis. Elle est retournée en Afghanistan en 2009 pour enseigner l’histoire et les « gender studies » (qui décortiquent les rapports sociaux entre les sexes) à l’Université américaine de Kaboul – le premier programme de ce type en Afghanistan. Elle est aujourd’hui enseignante à l’université Loyola dans le Maryland.
« Je veux que ces robes colorées éclipsent » le noir du niqab, « je veux que les gens s’en souviennent comme étant (…) le visage de la culture afghane », insiste-t-elle.
Bahar Jalali est aujourd’hui inquiète pour ses anciennes étudiantes « coincées en Afghanistan », dont « beaucoup ont peur pour leur vie ».
« Mes étudiants sont passionnés par l’égalité entre les sexes, qu’ils soient hommes ou femmes. Alors je ne sais vraiment pas comment cette nouvelle génération, qui n’a jamais vécu sous la férule des talibans, qui a grandi dans une société ouverte et libre, va pouvoir s’adapter à cette période sombre », dit-elle.
Mais c’est aussi parce que ces jeunes ont goûté à la liberté que Mme Jalali pense que les nouveaux maîtres de l’Afghanistan trouveront des obstacles sur leur chemin.
La société afghane est « différente de ce qu’elle était la dernière fois que les talibans ont gouverné le pays. Beaucoup de femmes gagnent leur vie, sont cheffes de famille », lance-t-elle.
« Ce sera extrêmement difficile pour les talibans d’imposer cette main de fer sur la population afghane, comme ils l’avaient fait avant », veut-elle croire.
Avec AFP
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