Chapitre 3. Le mythe de l’État d’apartheid (page 85 à page 110).
Bref rappel quant aux origines du mouvement national palestinien. Il est le produit des trois grands totalitarismes du XXe siècle : les Frères musulmans, l’Allemagne nazie, l’Empire soviétique.
Dans « The Kremlin Legacy », Ion Pacepa rapporte comment fut créée l’O.L.P. et Yasser Arafat (son look destiné à séduire) par le K.G.B., en 1964, afin de lutter contre Israël considéré comme un allié de l’Occident.
Première étape. En 1961, Ahmed Choukeiri (il deviendra le dirigeant de l’O.L.P. en 1964) accuse Israël d’apartheid à l’O.N.U. On retrouvera dans la charte de l’O.L.P. « sionisme = racisme » (lire l’article 22 de cette charte). Deuxième étape. La Résolution « sionisme = racisme » est adoptée par l’Assemblée générale des Nations-Unies, le 10 novembre 1975. Cette Résolution affirme par ailleurs que « le régime raciste en Palestine occupée et les régimes racistes au Zimbabwe et en Afrique du Sud ont une origine impérialiste commune », etc., etc. L’accusation d’impérialisme et celle de colonialisme sont plus anciennes que celle de racisme. Pour s’en convaincre, il suffit d’étudier les déclarations successives des conférences des pays arabes et africains des années 1950 aux années 1970. L’association des mots sionisme/racisme lancée au milieu des années 1970 n’a rien perdu de sa virulence même si la Résolution qui en était le vecteur a été abrogée. La Conférence de Durban, en 2001, consacre l’accusation de racisme à l’encontre d’Israël, du sionisme et des Juifs de la part des États participants arabes et musulmans ; mais ce sont surtout les O.N.G. dont l’importance s’affirme sur la scène internationale qui sont à la manœuvre et accusent Israël d’être un État raciste, responsable d’actes génocidaires et pratiquant une politique d’apartheid. « Israël État d’apartheid », un slogan décliné de bien des manières. Ainsi, par exemple, les considérations sécuritaires (voir la barrière de sécurité érigée en 2002 suite à un attentat particulièrement meurtrier ou la fermeture partielle de la route 443 suite aux très nombreux attentats commis au cours de la Deuxième Intifada) sont retournées contre Israël qualifié d’État d’apartheid.
Idem avec l’adoption par la Knesset de la loi sur Israël État-nation du peuple juif, en juillet 2018, une loi qui ne fait que réaffirmer des principes fondamentaux tenant au caractère juif de l’État d’Israël contenus dans la Déclaration d’Indépendance et dans les Lois fondamentales. Le Premier ministre Benyamin Netanyahu n’a donc pas sorti cette loi de son chapeau ainsi que certains l’affirment à dessein ou par ignorance. L’idée d’un « État-nation pour le peuple juif » a été réclamée par le mouvement sioniste dès 1897, acceptée par les nations en 1917 et 1947, consacrée le 14 mai 1948. « Elle est juridiquement fondée, selon les termes de la Déclaration d’indépendance, tant sur le droit historique et naturel que sur le droit international », écrit Pierre Lurçat. Par ailleurs, le caractère juif de l’État d’Israël ne l’empêche pas d’être démocratique et depuis sa fondation, conformément au programme sioniste et à la pensée de ses Pères fondateurs.
Notons que la propagation du mythe « Israël État d’apartheid » doit beaucoup aux militants antisionistes juifs, notamment sud-africains. L’antisionisme de ces militants n’est pas seulement un engagement politique mais « une nouvelle religion politique ou séculière », « une doctrine de salut collectif » pour reprendre les expressions de P.-A. Taguieff. A ce propos, il faut faire un tour du côté de l’Union Juive Française pour la Paix (U.J.F.P.), fondée en 1982, organisation se déclarant laïque et progressiste mais qui est mue par une ferveur quasi mystique, ce que le philosophe Sergueï Boulgakov avait remarqué chez les révolutionnaires russes d’origine juive. Selon lui, ces Juifs avaient trouvé dans l’idéologie marxiste un substitut au judaïsme qu’ils avaient abandonné ou trahi.
Le vieil antisémitisme sommait les Juifs de se « déjudaïser », de se départiculariser pour entrer dans la communauté nationale. A présent, les Juifs sont sommés de se « désioniser » pour être enfin acceptables. Cette « désionisation » à laquelle sont conviés les Juifs rappelle la conversion à laquelle les Juifs étaient (et sont encore) plus ou moins aimablement conviés par l’Église et l’islam. Se « déjudaïser » en rompant toute solidarité avec Israël et si possible en l’accusant de racisme, d’apartheid, en boycottant ses produits et j’en passe. Or, le combat antisioniste depuis 1948 vise (presque toujours) à en finir avec l’État juif. Pour Shlomo Sand l’affaire est entendue, il n’y a pas de peuple juif, le peuple juif est une invention…
Il n’y a pas d’apartheid en Israël. Les non-Juifs ont les mêmes droits que les Juifs. Israël n’est pas un État juif au sens ethnique, c’est un État à la population très diverse mais majoritairement juive, une exigence inscrite dans le programme sioniste, une exigence refusée par les Arabes qui ne peuvent envisager des Juifs souverains et dans les mentalités desquels le dhimmi est la pièce maîtresse. Il faut avoir voyagé et travaillé en Israël pour comprendre que le mot « apartheid » est parfaitement inapproprié à ce pays. Israël n’est en rien une « démocratie ethnique », une ethnocratie. Le peuple juif n’est pas une communauté ethnique ni même une communauté religieuse. Vouloir réduire ainsi la communauté juive d’Israël est une abjection ou une méconnaissance. « Juif dans l’expression “État juif” signifie un fait national dans le sens politique du mot » écrit Elhanan Yakira dans son livre « Post-sionisme, post-Shoah ».
Chapitre 4. Le mythe du Shoah-business : la Shoah comme révélateur de la pathologie antisioniste (page 111 à page 137).
Les antisionistes ne cessent de revenir à la Shoah et d’une manière pathologique. Il faut lire ce qu’écrit Elhanan Yakira à ce sujet, à savoir que la Shoah est utilisée comme une arme idéologique afin d’attaquer Israël. Elhanan Yakira avance l’hypothèse suivante pour expliquer ce paradoxe, à savoir « que la Shoah est perçue à la fois comme la source, la raison, la cause et la seule justification possible de l’existence d’Israël ». L’affaire consiste donc à désigner la Shoah comme l’unique fondement moral et historique du sionisme afin d’ôter à Israël toute légitimité. De même que l’antisémite voit la main des Juifs partout, l’antisioniste voit celle d’Israël partout.
Le négationnisme est le produit d’une collaboration palestinienne et européenne. Les Palestiniens ont élaboré dès 1945-1948 la thèse négationniste, avec des hésitations certes, visant à présenter la Shoah comme une ruse de propagande, ainsi que le montre Shmuel Trigano dans « Les frontières d’Auschwitz », afin d’établir un État juif en Palestine. De ce point de vue, les Palestiniens ont précédé tous les théoriciens négationnistes de France et d’ailleurs.
L’antisémitisme arabo-musulman n’est donc pas une figure d’importation. Il est vrai que l’antisionisme occidental a contaminé un monde déjà gagné à ce discours par le Coran qui n’est pas avare d’invectives à l’égard des Juifs. La guerre contre les Juifs a commencé dès les débuts de l’islam et elle se poursuit contre Israël dans une parfaite continuité. Certes, l’antisémitisme européen a excité l’islam (par le biais des Chrétiens d’Orient) mais l’islam a volontiers élaboré des thématiques antijuives et antisémites à partir de son seul substrat.
Nier la Shoah (ou en minimiser l’importance) afin de mieux saper les fondements d’Israël est un procédé toujours très actif. En fait, l’essentiel dans cette affaire est bien de saper les fondements de ce pays et non de savoir si la Shoah a été exagérée ou inventée à des fins de business – le Shoah-business.
L’antisionisme radical sait nier la Shoah. Tel est le cas de Roger Garaudy qui accédera à la notoriété internationale grâce à son livre « Les mythes fondateurs de la politique israélienne » devenu un best-seller dans le monde arabe – après avoir été condamné chez nous pour contestation du crime contre l’humanité. Roger Garaudy prétend réviser les conclusions du tribunal de Nuremberg et il cite David Irving. Mais la radicalité de ses propos quant à la Shoah n’a qu’un but, délégitimer Israël, en finir avec « le mythe des six millions d’exterminés » car, toujours selon Roger Garaudy, il « justifie toutes les exactions de l’État d’Israël (…) en les plaçant au-dessus de toute loi internationale ». Le négationnisme de Roger Garaudy est obscène mais il n’est pas une fin en soi, il est « une forme d’instrumentalisation de l’Holocauste au service de l’antisionisme », ainsi que le fait remarquer Elhanan Yakira qui ajoute : « Par rapport à la négation de la légitimité du sionisme, la négation de la Shoah est seconde ». Et, ajoute Elhanan Yakira, c’est parce que la négation de la Shoah est seconde que la « communauté d’opprobre » peut réunir des négationnistes comme Roger Garaudy et Pierre Guillaume (de La Vieille Taupe), des alliés objectifs du négationnisme comme Noam Chomsky et des anti-négationnistes comme certains auteurs israéliens antisionistes. Ainsi, des intellectuels israéliens, arabes ou européens peuvent-ils s’opposer frontalement à la négation de la Shoah tout en partageant des éléments du discours antisioniste radical.
Parmi l, membres de la « communauté d’opprobre », Norman Finkelstein, auteur de « The Holocaust Industry: Reflections on the exploitation of Jewish Suffering ». Zygmunt Brauman aussi qui déclarait par exemple que la barrière de sécurité érigée par Israël était l’équivalent du ghetto de Varsovie. L’Israélienne Tanya Reinhart, spécialiste de Noam Chomsky, est devenue une figure de proue du mouvement BDS. Autre antisioniste israélien radical, Ilan Pappé qui évoque une violente répression du pouvoir sioniste en Israël sur les « dissidents ». Les antisionistes radicaux ont une forte propension à se présenter comme des victimes alors qu’ils doivent leur statut et leur salaire à l’État d’Israël. Ella Shorat, auteur du livre « Le sionisme du point de vue de ses victimes juives : les Juifs orientaux en Israël », tente de déconstruire la société israélienne en prenant comme prétexte non pas le conflit israélo-palestinien mais les clivages internes à la société israélienne, en présentant le sionisme comme une entreprise colonialiste des élites ashkénazes envers les « Arabes juifs » qui pensent leur propre histoire en rapport avec les Palestiniens, ces autres victimes du sionisme…
(A suivre)
© Olivier Ypsilantis
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