Le cinéma israélien, tel Janus, possède un double visage. D’un côté, il y a celui que connaissent bien les cinéphiles étrangers, à travers des films comme ceux d’Amos Gitaï, de Nadav Lapid ou de Samuel Maoz, qui abordent régulièrement des sujets comme le conflit israélo-palestinien ou les « fractures de la société israélienne ». C’est un cinéma engagé, parfois prétentieux et souvent ennuyeux. C’est aussi un cinéma qui reçoit les louanges (et les prix, souvent lucratifs) des festivals internationaux, le plus souvent en raison de l’image critique et parfois caricaturale qu’il donne de l’Etat juif.
Pas plus tard qu’hier, le film Le genou d’Ahed de Nadav Lapid a ainsi été couronné du Prix du jury à Cannes. Ce film, selon un journal français, présente « une charge explosive contre la situation politique de son pays« . Mais comme le reconnaît un quotidien suisse, c’est un film « maniéré » et « calibré pour les festivals » (1). Il raconte de manière romancée et ampoulée l’histoire d’Ahed Tamimi, jeune « activiste » palestinienne qui avait connu son jour de gloire pour avoir giflé des soldats israéliens.
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Le retour du cinéma israélien : « Honeymoon », de Talia Lavie
De l’autre côté, il y a celui d’un cinéma plus populaire, souvent méconnu à l’étranger, qui aborde des thèmes plus ordinaires et universels, comme l’amour, la famille ou la vie des gens… Car, contrairement à ce que semblent croire parfois les médias étrangers, Israël n’est pas seulement un pays en guerre, c’est un pays où il fait bon vivre ! Le dernier film de Talia Lavie (Zero Motivation, Bet Lehem), « Ehad ba-Lev » (Honeymoon), appartient incontestablement à la seconde catégorie. C’est un film drôle et touchant, plein d’humour et de poésie, qui se déroule tout entier à Jérusalem, dans l’espace d’une nuit.
Ran Danker et Avigaïl Harari y incarnent un jeune couple qui vient de célébrer son mariage, et dont la nuit de noces mouvementée va les entraîner à la poursuite de leurs « ex » respectifs. A partir de ce scénario simple, qui évoque un peu celui d’After Hours de Scorsese, Lavie a bâti un film original, servi par une distribution excellente. Citons notamment, outre Ran Danker, acteur et musicien, Avigaïl Harari (qui a joué au théâtre dans Othello et Ha-Nekhed), Elisha Banaï (petit-fils de Yossi Banaï, de la mythologique famille Banaï).
Une des prouesses de cette comédie est de se dérouler tout entière à Jérusalem, qui est filmée la nuit avec beaucoup de poésie. Certaines scènes du film méritent de devenir des morceaux d’anthologie, comme celle où la jeune mariée se retrouve devant la résidence du Premier ministre, entourée de gardes de sécurité qui entonnent une véritable sérénade à plusieurs voix en son honneur. Les influences cinématographiques, bien présentes (Scorsese déjà cité, Woody Allen), ne font rien perdre au film de son originalité et de son identité israélienne très marquée.
Avec humour et sans prétention, le nouveau film de Talia Lavie présente un visage d’Israël très actuel, bien différent de celui qu’on connaît à l’étranger et que Nadav Lapid a offert au public de Cannes. Jérusalem y est décrite comme la ville pleine de charme et de poésie qu’elle est, à mille lieues de son image dans les médias internationaux. Alors, courez voir “Ehad BaLev”, vous serez étonnés et heureux de retrouver le cinéma israélien plein de verve et de vie, après une interruption prolongée.
© Pierre Lurçat
(1) Voir https://www.letemps.ch/culture/genou-dahed-manierisme-nadav-lapid et https://www.politis.fr/articles/2021/07/le-genou-dahed-de-nadav-lapid-cannes-competition-43394/
Article publié initialement sur mon blog http://cinema-israelien.over-blog.com/
Je suis d’accord.J’ai vu des extraits de « Synonymes »un tres beau film cinematiquement parlant .Mais Nadav Lapid y bavait de rancoeur et d’amertume.
Je n’irai certainement pas voir « Le genou »,mon ouverture d’esprit a ses limites!
Quand a la petite dinde gifleuse ,je lui aurait retourne la baffe de sa vie.
Et quand elle se serait calmee,on aurait cause…