Charles Meyer. Un sentiment d’insurrection

A l’heure où nous venons d’apprendre qu’un célèbre journaliste de LCI officialise son engagement au Rassemblement National, ses anciens collègues s’agitent en annonnant frénétiquement la proximité de quelques généraux en retraite avec ce même Rassemblement National. C’est tout un symbole et un message qui s’organise.

Cette affaire de cornecul de la « Tribune des militaires » est l’exemple parfait d’un lamentable contre – feu dont se saisissent tous les lâches et ceux qui trouvent encore rassurant de se donner le frisson avec la guerre d’Algérie depuis trois jours. Il fallait entendre les hurlements d’Agnes Pagnier Runacher, dite « la fée des bonnes affaires en bourse », ou les gesticulations de la France insoumise. Cette manœuvre est tellement grossière, tellement minable, qu’elle pourrait faire rire, s’il ne s’agissait pas d’effacer systématiquement des mémoires vives les terribles évènements que vivent jour après jour, mois après mois, année après année les Français, qui sont décidément bien patients, pour qu’on ose encore leur extorquer quelque silence sous la menace du bon sentiment et de la culpabilisation idiote ad nauseam.

Avant de dire ce qu’on pense de cette tribune, quelques rappels utiles à l’adresse des matamores de la gauche soumise, de la start-up nation en marche et des quelques clubs d’anciens combattants du parti socialiste. A tous ces zozos qui brandissent encore à la moindre occasion la défense des idéaux et valeurs qu’ils hypothèquent tranquillement et avec eux, l’avenir des Français.

Dernière trouvaille de Jean-Luc Melenchon, dont il n’y a strictement plus rien à attendre si ce n’est ce genre d’esbroufe, fabriquer des crimes imaginaires et déposer des plaintes pour faire mouliner le ventilateur de la démagogie. On se rassure comme on peut.

Mais regardons cela de plus près.

Sont convoqués au registre de ces clowns politiques, les articles 412-4 et 412-6 du code pénal. Soit le fait de participer à une insurrection ou de la diriger. Si Mélenchon et ses sbires s’étaient donnés la peine de consulter avant de profaner le caveau des bonnes idées et de réinventer le code penal, ils se seraient aperçu que ces dispositions incriminent des faits précis. En l’espece actuelle on ne parle d’insurrection que s’agissant d’une violence collective de nature à mettre en péril les institutions de la République ou à porter atteinte à l’intégrité du territoire national. L’insurrection ne se décrète pas dans un tweet, elle n’est pas la supputation d’une guerre civile. Il sagit concrètement, s’agissant de l’article 412-4, d’édifier des barricades, des retranchements ou en faisant tous travaux ayant pour objet d’empêcher ou d’entraver l’action de la force publique; d’occuper à force ouverte ou par ruse ou en détruisant tout édifice ou installation ; d’assurer le transport, la subsistance ou les communications des insurgés ; de PROVOQUER à des rassemblements d’insurgés, par quelque moyen que ce soit ; d’être porteur d’une arme; de se substituer à une autorité légale.

Quant à l’article 412-6, celui-ci ci  incrimine spécialement le fait de diriger ou d’organiser un mouvement insurrectionnel. Cette disposition vise les chefs d’un mouvement dépourvu autant par nature que par raison d’une personnalité morale. Dans les deux cas, il s’agit d’infractions intentionnelles disposant d’un élément matériel particulier, ce qui implique, d’une part, une conscience du dirigeant de mener un mouvement insurrectionnel ou d’y participer selon les modalités de l’article 412-4 et, d’autre part, la caractérisation d’un tel mouvement insurrectionnel ou à tout le moins et à suivre l’approche la plus prudentielle de ces textes, des éléments préparatifs concrets et la volonté de  déstabiliser l’autorité de l’État au point de menacer les institutions de la République ou l’intégrité du territoire national.

A l’ évidence, la lecture de cette tribune et quel que soit ce qu’on en pense, amène à constater qu’aucun des éléments réprimés par les dispositions qui précèdent n’y figure et que la plainte de LFI ou les « enquêtes » qui pourraient être menées pour amuser la galerie seraient davantage de nature à décrédibiliser encore un peu plus la justice et l’État de droit que de leur rendre service.

C’est précisément ce piège que les magistrats saisis de la plainte en forme de panneau publicitaire de la France insoumise devront désamorcer sous peine, si l’idée venait de faire durer encore la séquence, de conforter auprès d’une majorité naissante de nos concitoyens, l’idée que la justice est au service des plus forts et l’armée une sorte de recours : en bref, la pire des configurations qui donnerait raison aux plus excités des nostalgiques de la France OAS, le tout sous le bénéfice des délires de Jean-Luc Mélenchon. J’écris ces lignes car dans la situation de délitement actuelle, tout est malheureusement possible.

Venons-en à présent à cette tribune qui évoque en un passage éclair une « mission » ( soit dit en passant et à moins qu’elle soit divine, celle-ci impliquerait donc un commandement du pouvoir politique sur le militaire et les mots ont un sens), mission au service de la sauvegarde de valeurs. Pour le dire fanchement, non seulement ce type de tribune n’est pas ma substance préférée, mais je suis même tout à fait enclin à reconnaître que s’y trouvent des profils avec lesquels je n’ai strictement rien en commun, la détestation des maux que nous endurons n’étant jamais par ailleurs une ligne directrice. Sans doute même, s’y trouvent quelques douteux exaltés. Mais ce n’est pas le problème et c’est surtout oublier que beaucoup de militaires du rang à la retraite ou de sous-officiers ont souscrit à ces quelques phrases qui expriment une crainte et un désarroi qu’il faut toujours entendre.

Comment en est-on arrivés là ?

Comment en est-on arrivés là ? Dans une puissance mondiale en voie de désintégration sociale, politique et économique, voir quelques militaires de haut rang interpeller les autorités et le monde politique, cela n’a rien d’anodin et si le parallèle avec un « putch » est des plus groteques, l’hypocrisie et la lâcheté des uns ne doit pas faire oublier le sentiment profond de colère et d’abandon des autres. Ce sentiment d’insurrection en germe depuis quelques années, est bien là et il se tient droit debout, pour faire face, peut-être, aux abandons successifs que la Nation essuie pendant qu’on la sédate, en lui expliquant qu’elle est plus forte que les événements qui l’engourdissnent. Jusqu’à quand ? La vraie question que pose cette tribune est celle de la politique qui est partout et nulle part; qui est celle du juste équilibre rompu, entre désertion et insurrection pour reprendre le vocable militaire ; entre Français qui attendent tout des autres et ceux qui n’attendent plus rien; entre l’action politique et l’esbroufe ou la mise en scène de l’inaction qui terrifie quand chaque jour on s’y enfonce davantage.

Ce sentiment appelle une réponse politique. Il n’a trouvé sur sa route que le porte-clé de l’opportunisme de Marine le Pen et son utilisation comme gadget de la fourberie par les autres. Tout cela ne dit rien de bon.

 © Charles Meyer

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2 Comments

  1. Macron n est pas Petain et Le Pen n est pas de Gaulle.Seul le president de la republique,en tant que chef des armees,a le droit de faire sortir la troupe.Et comme elle est inapte au maintien de l ordre,sauf a tirer dans le tas,c est la police et la gendarmerie,formes pour ca,qui doivent mater les trublions des nouvelles zones.Commencons deja par leur rendre leurs effectifs au lieu de se feliciter des departs en retraite non remplaces.

  2. Afin d’écarter tout sentiment d’insurrection, osons demander que les politiques se concertent et se mobilisent pour envisager ensemble une attitude de responsabilité collective apte à rassurer la population.
    Voeux pieux ?

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