Jacques Neuburger. À contre courant. Tant pis

Ce fauve marin est intelligent, intelligent au point d’en être de toute évidence rigolard: on ne me fera pas dire que du bonheur de jouer de son intelligence et de vivre il est plus malheureux que mon chien d’être chien et non pas loup au fond des bois, plus malheureux que mon chat de dormir à mes pieds sur la couette.

C’est à la mode, soyons verts, soyons puristes, interdisons, soyons moralistes…..

Pour se mettre en accord avec la nouvelle loi un parc d’attraction va donc, ai-je entendu aux nouvelles, euthanasier ses dauphins: belle victoire.

Nous voici en route pour une civilisation où l’on tuera un jour le guépard pour protéger les gazelles et où seule l’insémination artificielle sera autorisée afin de mettre hors d’état de nuire les mâles prédateurs.

Je suis grincheux, je sais. Démodé, je sais. À contre courant, je sais. Rétrograde, je sais.

Mais toute mon enfance j’ai aimé aller au Jardin des plantes voir le lion, la girafe et le tigre, l’éléphant, l’ours et le pangolin. On les voyait de près, de les voir, de les connaître de dimanche en dimanche je les ai aimés. Cette proximité avec les bêtes, l’odeur des fauves, des bisons, des gazelles, l’haleine infecte des hippopotames ou des crocodiles, la douceur infinie de la chèvre et sa nervosité, tout était réel, rien n’était aseptisé, tout cela offrait à l’enfant un contact enchanteur avec le monde animal.

Oui, j’ai aimé tous les jeudis aller au cirque Medrano, voir les clowns, les trapezistes, la femme serpent, le magicien, le dompteur qui mettait sa tête dans la gueule du tigre, celui qui faisait faire des grâces aux éléphants, la cavale blanche qui dansait avec l’écuyère, et la chèvre qui savait compter comme l’âne qui savait désigner la plus belle dame de la salle.

Et le jour où j’ai vu passer sous mes fenêtres le dernier montreur d’ours avec sa chèvre savante, son petit singe vêtu de rouge, son tambourin, son petit bandonéon, son chapeau de paille, sa flûte, non, je n’ai pas hurlé au scandale lorsque le petit singe a tendu la sébille, lorsque l’ours muselé et tenu en chaîne à dansé, lorsque la chèvre à fait la révérence. Car j’étais sous l’enchantement, j’étais entré dans une toile de Chagall.

Qu’on interdise de tester les cosmétiques sur de pauvres bêtes, bien sûr.

Mais que de lois allant dans le sens d’une société aseptisée: madame la ministre les éleveurs de chiots vont-ils moins euthanasier les « invendus » que les animaleries et leurs cages sont-elles plus humaines?

On éloigne de l’enfant la proximité de la bête qui lui donnera l’amour des animaux et le souci de l’autre – cependant le commerce de foie gras de basse qualité issu des élevages chinois les plus infâmes se poursuit, cependant les éleveurs industriels broient toujours vivants les poussins mâles pour en faire des croquettes pour chien ou des nuggets de volaille pour les enfants qu’on emmène déjeuner au fast food.

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