Lucia Bensimon. « Je n’écrirai pas sous pseudo: C’est un honneur d’évoquer Sarah Halimi »

Sarah Halimi. Une Femme « entre les pages de l’épais dossier ». Et pas « Une vieille Dame », comme nous l’entendons sans cesse…

Ma chère Sarah Halimi

Sarah a une place particulière dans mon cœur. Là, elle est au chaud et nous conversons.

Car Sarah avait accueilli mon bout de chou de 2 mois et demi (pile le congé légal !) dans sa crèche Ganone, dans le Marais, il y a bientôt 29 ans. Je bossais à 2 pas et gentiment, elle acceptait que je vienne allaiter à la pause du midi. Ça fuyait de partout, mes chemisiers étaient trempés et mes jupes pas assez longues.

Je déparais.

Elle avait repris les choses avec moi, fermement et sans acrimonie.

Mes longueurs devaient rallonger pour  respecter le vivre-ensemble de cette structure du Pletzel où se côtoyaient toutes les tendances du judaïsme.  

Ma petite Eva s’approchait aussi  « dangereusement » sur le tapis de jeux du fils Bernheim et je lançais blagueuse « ma fille s’est trouvé un mari ! » Sarah me fit remarquer qu’on  ne plaisantait pas avec certaines hiérarchies, qu’entre mon Eva et le fils d’un rabbin, pas de plan sur la comète donc.

La crèche était désuète,  aurait eu besoin d’un coup de peinture, d’un peu de clinquant mais j’aimais l’ambiance qui y régnait. Je sentais mon enfant parfaitement sécure.

Il y avait une telle humilité chez Sarah

Il y avait une telle humilité chez Sarah.  Dans sa manière de se vêtir,  toujours très sobre. De ne jamais élever la voix, de poser les bonnes limites, d’avoir une haute échelle de valeurs et de ne pas y transiger.

Mais les rires fusaient et l’ambiance était harmonieuse dans l’équipe.

Les enfants grandissaient dans la bonne humeur  et l’attention portée sur laquelle on ne lésinait pas. Sarah veillait au grain.

« C’est une super directrice, très humaine », le genre de phrase que formulaient ses professionnelles. Et croyez mon expérience, cela est assez peu courant dans les crèches.

Mon Eva quitta la crèche. Et des années plus tard,  j’étais recrutée pour animer un service dans le cadre communautaire dédié à la formation des ressources humaines dans le sanitaire et social.

Des années plus tard, je retrouvais Sarah comme Partenaire

Une grande partie de ma fonction consistait à mobiliser les structures de la petite enfance et du champ de l’action sociale pour favoriser la formation professionnelle des équipes. Je retrouvais Sarah comme partenaire.

Toujours à l’écoute. Repérant les besoins. Accueillant des stagiaires quand je lui en faisais la demande.

Sarah allait créer une école d’auxiliaires de puériculture au sein de la communauté

Sarah n’avait pas bien vécu l’arrêt de ses fonctions, la fermeture de sa structure,  puis son départ en retraite. Elle m’avait plusieurs fois sollicitée pour que nous réfléchissions ensemble à un projet qui lui tenait à cœur : la création d’une école d’auxiliaires de puériculture, au sein de la communauté. Elle visait juste. Avait bien repéré le terrain.  Les besoins étaient grands dans le champ de la petite enfance.  Nous avions pris des informations, mesuré les enjeux, les résistances

Quand l’onde de choc est arrivée, je me suis liquéfiée.  Quelques semaines avant le drame, nous avions échangé au téléphone. Son projet avait mûri et il était question que nous nous retrouvions pour une réunion avec d’autres partenaires dans les locaux de mon association.    

Je souhaitais lui faire une place dans le cadre des formations que je mettais en œuvre. Je découvrais une autre femme derrière la Directrice de crèche. Une femme passionnée par son métier qui voulait goûter à l’entreprenariat, accéder à une autonomie de projet.

J’avais peu à peu mieux saisi toute la passion qui couvait chez cette dame discrète. J’aimais qu’elle m’appelle par un « Bonjour Lucia », elle m’offrait sa confiance désormais. Les accents dans sa voix étaient doux, amicaux. Elle avait tellement envie d’être active, de mettre son expertise au service de ce projet qui lui tenait à cœur.

J’étais émue.   Et quand l’horreur est arrivée,  le sentiment qu’on m’avait aussi arraché une amitié naissante.

Sarah était dans une nouvelle jeunesse d’âme quand « on » a décidé d’interrompre sa vie. Elle accédait à l’entreprenariat. Elle avait tant à transmettre.   

© Lucia Bensimon

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1 Comment

  1. Merci a Mme Lucia Bensimon pour décrire la vie professionnelle de ma sœur .
    Un texte rempli de la même humilité qui caractérisait Sarah.
    Une femme et une mère de exception

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