Etgar Keret, l’un des auteurs israéliens les plus aimés des Français

Cette semaine dans le magazine Culture, Etgar Keret accorde un entretien à i24NEWS.

Au cours de cette interview avec Valérie Abecassis, le célèbre scénariste, metteur en scène et auteur israélien, dont le dernier ouvrage était listé pour le prix des Inrocks, revient sur les sujets qui agitent le monde : la pandémie, les attentats, la politique, la liberté d’expression et l’avenir de la société israélienne.

Il aborde également l’écriture et ses inspirations, mais aussi ses collaborations avec les artistes français Eddy Mitchell et Mathieu Amalric.

Etgar Keret, qui estime que les « attentats font maintenant partie de nos vies », partage ses réflexions quant à la pandémie et ses effets sur la société : « C’est dans la nature du monde de changer, on s’en rend particulièrement compte en temps de pandémie. Chaque changement peut aussi être synonyme d’espoir. » « C’est le moment idéal pour se livrer à une introspection et faire preuve de solidarité » poursuit-il. « C’est peut-être cet événement qui fera émerger ou encourager les valeurs humanistes dont on ne parle pas assez en ce moment. »

A propos de son dernier livre, « Incident au fond de la galaxie », il commente : « Je suis vraiment ravi que mon livre ait reçu un si bon accueil en France. Il parle des effets de la pandémie alors que je l’ai écrit avant la crise du COVID. Il aborde la solitude et l’isolement, de ces gens qui essaient en vain de conserver une trace de ce monde. Quand je l’ai écrit, c’était mon expérience que je retranscrivais. Mais aujourd’hui, avec la pandémie, j’ai l’impression que tout le monde ressent ça. »

Il partage son inquiétude quant à la fermeture des librairies en temps de confinement : « En ce moment, la plupart des pays ont tendance à considérer la culture comme un luxe. C’est comme si on avait rangé la culture entre les spas et les massages, dans la catégorie bien-être. Je crois que la culture est vitale parce qu’avec le confinement, nous sommes tous isolés, et ça nous rend un peu sociopathes et misanthropes ».

Pour décrire son style littéraire, il compare ses livres à des « borekas, ces chaussons orientaux à base de pâte feuilletée, mais avec une farce au foie gras ! Mon style est une fusion entre deux cultures. Je trouve que dans la forme, mes livres sont très israéliens : c’est agressif, cru, très frontal. Mais dans le fond, c’est très yiddish, comme les auteurs juifs de diaspora. »

Il poursuit sur ses sources d’inspirations : « Les idées viennent d’une image, d’une phrase ou d’une personne rencontrée dans le train et que je n’arrive pas à chasser de mon esprit. Écrire une histoire, c’est toujours une découverte personnelle et une expérience qui me permettent de comprendre des choses sur moi-même. »

Etgar Keret a récemment obtenu le prix littéraire Sapir en Israël : « Mon livre a été traduit en arabe et en yiddish. C’est logique parce que là où je vis, la plupart des habitants lisent et parlent arabe. Quand je sors un nouveau livre, c’est important que je puisse en parler avec mes voisins. Et pour le yiddish, c’est aussi mon héritage parce que mes parents parlaient yiddish. »

Le metteur en scène a collaboré avec Mathieu Almaric et Eddy Mitchell pour la réalisation de la série « L’agent immobilier ». Il revient sur ses choix de casting et sur le tournage : « On adore ce que Mathieu fait et la connexion entre nous a été immédiate. L’une des raisons pour lesquelles nous avons tourné cette série en France, avec des dialogues en français, c’est parce que nous voulions absolument que Mathieu Amalric joue le rôle principal. Cette fusion entre le talent français et l’imagination israélienne a créé quelque chose que je trouve totalement unique. »

« Pour jouer le personnage du père de Mathieu Amalric, nous étions à la recherche d’un acteur qui soit vieux mais qui dégage une énergie très jeune. En fait, il nous fallait un adolescent de 80 ans ! La meilleure solution était de trouver une rock star, et on a tout de suite pensé à Eddy Mitchell ! Lors de notre première rencontre, je l’ai vu boire son whisky, je me suis rendu compte qu’il était plus alerte et énergique que tous les gens assis autour de la table », s’amuse-t-il.

Interrogé sur la situation politique actuelle en Israël, il affirme avec virulence : « Je crois qu’on n’a jamais connu ce genre de situation : un Premier ministre accusé de fraude et de corruption dans trois affaires très graves, mais qui refuse de démissionner. Je pense que si Netanyahou aime le pays autant qu’il le revendique, il devrait démissionner et essayer de prouver son innocence. La moitié de la population israélienne ne veut pas être gouvernée par un Premier ministre qui trempe dans des affaires de corruption. »
Il ajoute : « J’aimerais juste conseiller à Netanyahou de réécouter ce très beau discours qu’il avait fait pour Olmert et qu’il se l’applique à lui-même : qu’il démissionne et qu’il ne revienne que le jour où il sera blanchi, si tant est qu’il y arrive. »

Etgar Keret exprime de grandes réserves quant à l’influence des auteurs et de la littérature sur la société face aux réseaux sociaux : « Nous ne vivons qu’à travers nos réseaux sociaux, un artiste ne peut pratiquement pas créer de polémique. Nous sommes tellement occupés à nous détester mutuellement et à nous monter les uns contre les autres qu’on ne peut quasiment plus entretenir un dialogue rationnel. Ce n’est pas maintenant que les artistes auront la possibilité d’influencer le cours de l’Histoire. Au cours de ces dernières décennies, le pouvoir des artistes a considérablement diminué. »

Enfin, à propos de la liberté d’expression, il la juge « indispensable, même si elle peut parfois avoir des répercussions malheureuses. Nous ne pouvons pas nous laisser intimider et museler nos pensées parce que nous avons peur d’une organisation terroriste. Nous devons rester fidèles à notre liberté d’expression au quotidien. »

Source I24

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